ROME, 31 juillet (Reuters) - Cinq organisations non-gouvernementales d'aide aux migrants en Méditerranée ont refusé de signer le code de conduite présenté par le gouvernement italien, a annoncé lundi le ministère de l'Intérieur, qui précise que ces règles ont été acceptées par trois autres groupes.

Les bateaux des ONG ont pris en rôle de plus en plus important dans les sauvetages en mer Méditerranée: plus d'un tiers des migrants ramenés à terre cette année sont passés par leurs bateaux, contre seulement 1% d'entre eux en 2014, selon les garde-côtes italiens.

L'Italie redoute que leur travail ne facilite celui des passeurs depuis l'Afrique du Nord, et n'encourage les migrants à se lancer dans la traversée.

Rome a en conséquence présenté la semaine dernière un code de conduite en 12 points, qui prévoit entre autres d'imposer la présence de policiers à bord de leurs bateaux et d'interdire le transfert des migrants secourus sur d'autres navires.

Les organisations qui ont refusé de signer le document seront désormais "en dehors du système organisé de sauvetages en mer, avec toutes les conséquences concrètes que cela implique", a annoncé le ministère de l'Intérieur italien.

Rome avait précédemment menacé de fermer ses ports aux ONG non signataires, mais une source au ministère de l'Intérieur a confirmé que ces groupes y seraient finalement autorisés mais avec des contrôles accrus des autorités.

L'organisation Médecins sans frontières (MSF), qui a participé à de nombreux sauvetages cette année, a pris part à une réunion au ministère de l'Intérieur sur le sujet mais a refusé de signer le code.

REFUS DE MSF

MSF s'est dit opposé notamment à l'obligation faite aux ONG de transporter elles-mêmes à terre les migrants secourus, plutôt que de transférer les rescapés sur d'autres navires, pour permettre aux sauvetages de se poursuivre.

"Nos bateaux sont souvent débordés par le grand nombre de bateaux (de migrants) (...) et la vie et la mort en mer sont une question de minutes", a dit le directeur de MSF en Italie, Gabriele Eminente, dans une lettre au ministre de l'Intérieur Marco Minniti.

"Le code de conduite fait courir des risque à cette fragile équation de collaboration entre les différents bateaux", a-t-il estimé, ajoutant que MSF souhaitait continuer à travailler avec les autorités pour améliorer les opérations de sauvetage.

Les ONG allemandes Sea-Watch, Sea-Eye et Jugend Rettet ont elles aussi refusé de signer le texte, tout comme l'organisation française SOS Méditerranée.

L'ONG maltaise Migrant Offshore Aid Station (MOAS) et le groupe espagnol Proactiva Open Arms ont pour leur part accepté ce code de conduite, tout comme Save The Children, qui a précisé qu'elle respectait déjà la plupart des règles contenues dans le texte et qu'aucun "point du code n'entraverait ses activités", selon son directeur en Italie, Valerio Neri.

MSF, SOS Méditerranée et Jugend Rettet ont demandé des éclaircissements sur la présence de policiers à bord.

"Pour nous le point le plus polémique (...) était l'engagement d'aider la police italienne dans ses enquêtes et possiblement de prendre à bord des policiers armés", a déclaré le coordinateur de l'ONG allemande, Titus Molkenbur. "Cela est contraire aux principes humanitaires de neutralité auxquels nous adhérons"

Près de 100.000 migrants sont arrivés en Italie depuis le début de l'année. (Isla Binnie et Antonio Denti, Julie Carriat pour le service français)