par Paul Carrel et Michael Nienaber

BERLIN, 4 septembre (Reuters) - Angela Merkel a été jugée meilleure que son challenger social-démocrate Martin Schulz lors du débat télévisé qui a opposé dimanche soir les deux principaux candidats à la chancellerie lors des élections législatives allemandes du 24 septembre.

La chancelière, qui brigue un quatrième mandat consécutif et dont l'alliance conservatrice est largement en tête dans les sondages, a bien résisté aux assauts de son rival sur des sujets comme les réfugiés, les liens de l'Allemagne avec la Turquie ou la présidence de Donald Trump.

Elle a été jugée victorieuse de l'affrontement par une majorité d'Allemands dans les enquêtes effectuées à la fin de l'émission.

Cinquante-cinq pour cent des téléspectateurs l'ont ainsi trouvée plus convaincante que son adversaire, contre 35% pour Martin Schulz, dans un sondage de l'institut Infratest Dimap réalisé pour la chaîne ARD.

A trois semaines du scrutin fédéral, l'ancien président du Parlement européen a joué son va-tout pendant les 97 minutes de cet unique duel télévisé avec Angela Merkel, qui a semblé par moments déstabilisée tout en affichant une certaine autorité et en mettant en avant son expérience après douze années aux commandes de l'Allemagne.

Martin Schulz l'a ainsi poussée dans ses retranchements sur la Turquie, où Angela Merkel a été manifestement surprise lorsque son adversaire social-démocrate s'est engagé à faire pression en faveur d'un arrêt des négociations entre l'UE et Ankara s'il accédait au poste de chancelier.

Dans un premier temps, Angela Merkel a mis en garde contre une telle initiative en jugeant irresponsable de fragiliser davantage les relations avec la Turquie alors que des Allemands sont emprisonnés dans ce pays.

Mais alors que les journalistes avaient changé de sujet et interrogeaient les deux adversaires à propos du président américain Donald Trump et la Corée du Nord, Angela Merkel est revenue sur le thème de la Turquie en prenant brusquement parti en faveur d'un arrêt des négociations d'adhésion à l'UE.

"Il est évident que la Turquie ne devrait pas devenir membre de l'UE", a dit la dirigeante conservatrice, une déclaration susceptible de plaire à sa base électorale. "Je discuterai avec mes collègues (de l'UE) pour voir si nous pouvons parvenir à une position commune à ce sujet afin que nous puissions mettre un terme à ces négociations d'adhésion", a ajouté Angela Merkel.

FEMME D'ETAT

Dans un échange sur la Corée du Nord, Martin Schulz a accusé le président américain de "mettre le monde au bord de la crise avec ses tweets" et exhorté l'Allemagne à collaborer avec ses partenaires européens, avec le Canada, le Mexique et avec l'opposition américaine.

Angela Merkel a répondu en faisant valoir son expérience de femme d'Etat, soulignant qu'elle s'était entretenue de la Corée du Nord avec le président français Emmanuel Macron dès dimanche, et qu'elle ferait de même dans les prochains jours avec les dirigeants américain, russe, chinois, japonais et sud-coréen.

"Je ne crois pas qu'on puisse résoudre ce conflit sans le président américain. Mais je crois qu'il faut dire dans les termes les plus clairs que pour nous, il ne peut y avoir qu'une solution diplomatique pacifique", a dit la chancelière.

Sur les réfugiés, Martin Shulz a jugé que l'Allemagne aurait dû mieux se coordonner avec ses partenaires de l'UE lors de la crise migratoire de 2015, quand un million de réfugiés ont afflué sur le territoire allemand, ce à quoi Merkel a répondu qu'il fallait alors réagir vite à une situation dramatique.

A l'issue du débat, Martin Schulz a demandé aux Allemands, face caméra, de faire preuve de courage en choisissant le changement. Mais il a refusé d'écarter la possiblité d'une coalition avec le parti de gauche Die Linke, ce qui pourrait lui aliéner une partie des électeurs modérés.

Angela Merkel, qui a exclu de relever l'âge de départ à la retraite à 70 ans comme le suggèrent certains responsables conservateurs, a déjà écarté toute possibilité de coalition avec Die Linke ou le parti de droite ultra Alternative pour l'Allemagne (AfD). (Avec Noah Barkin et Emma Thomasson; Bertrand Boucey et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)