TUNIS, 6 août (Reuters) - Des dizaines de milliers de personnes se sont rassemblés mardi soir dans le centre de Tunis pour réclamer le départ du gouvernement dirigé par les islamistes.

C'est la manifestation la plus importante depuis l'assassinat, le 25 juillet dernier, du député laïque Mohamed Brahmi.

Ce rassemblement intervient également six mois jour pour jour après le meurtre de Chokri Belaïd, autre grande figure de l'opposition laïque.

Un peu plus tôt dans la soirée, le président de l'Assemblée nationale constituante tunisienne (ANC) a annoncé la suspension des travaux de la chambre jusqu'à l'ouverture d'un dialogue entre le gouvernement et l'opposition laïque, rapporte l'agence officielle de presse Tap.

Mustapha ben Jaafar a expliqué sa décision au nom des intérêts du pays qui traverse la pire crise politique depuis le renversement de Zine el Abidine ben Ali en janvier 2011.

L'opposition réclame la démission du gouvernement d'Ali Larayedh, issu du parti islamiste Ennahda, ainsi que la dissolution de l'Assemblée constituante.

Ses chefs de file sont galvanisés par l'exemple de l'Egypte, où le président Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans, a été déposé le 3 juillet par l'armée malgré sa large victoire électorale un an plus tôt.

Lundi, le président d'Ennahda, Rachid Ghannouchi, a répliqué en excluant le départ du Premier ministre et la dissolution de l'ANC. Dans un entretien accordé à Reuters, il s'est dit favorable à la tenue d'un référendum sur la poursuite du processus de transition.

Tout en se disant ouvert au compromis, Rachid Ghannouchi n'a pas mâché ses mots vis-à-vis de l'opposition, qu'il accuse de mener une "contre-révolution". "Nos mouvements de protestation soutiennent la progression du mouvement de transition, les leurs veulent faire éclater la transition", a-t-il dit.

Il a récusé l'idée selon laquelle Ennahda allait connaître le même sort que les Frères musulmans en Egypte. "Nous avons exporté notre révolution en Egypte. Aujourd'hui, (l'opposition) veut importer un coup d'Etat. Mais en Egypte, l'opposition aurait dû attendre quatre ans pour un changement, alors qu'ici elle a juste à attendre quelques mois."

La semaine dernière, cherchant à apaiser l'opposition, Ali Larayedh a promis d'organiser de nouvelles élections le 17 décembre.

Mardi, il a exhorté les députés de la Constituante à accélérer leurs travaux. (Tarek Amara et Erika Solomon; Jean-Loup Fiévet et Henri-Pierre André pour le service français)