Richard Barley,

The Wall Street Journal

LONDRES (Agefi-Dow Jones)--L'économie européenne ne cesse de tutoyer les records en ce début d'année. C'est évidemment une bonne nouvelle, mais les marchés auraient intérêt à se préparer à l'inévitable contraction qui s'ensuivra. Ce n'est sans doute pas pour tout de suite, mais une nouvelle embellie est peu probable.

Markit Economics, qui publiait mercredi ses données préliminaires pour l'activité du secteur privé dans la zone euro, a présenté des chiffres assez remarquables. Son indice PMI composite, en se révélant bien supérieur aux attentes, est venu s'ajouter à une longue liste de surprises économiques. L'indice s'est établi ce mois-ci à 58,6, son plus haut niveau depuis juin 2006, contre 58,1 en décembre. Depuis 1999, l'indice n'a été supérieur à ce niveau que pendant 16 mois.

"Cette accélération de l'activité économique dans la région s'accompagne de la plus forte croissance de l'emploi depuis l'année 2000 ainsi que d'une intensification des tensions inflationnistes, celles-ci atteignant un plus haut de près de sept ans", a en outre précisé IHS Markit. Toutes ces données s'inscrivent dans le sillage de la publication, mardi, d'un indice provisoire de confiance des ménages dans la zone euro qui a atteint pour janvier son plus haut niveau depuis 2000, s'approchant d'un record absolu depuis le début de la collecte de ces données en 1985.

Selon IHS Markit, cette accélération de l'indice PMI laisse attendre une croissance trimestrielle proche de 1%. A environ 4% en rythme annualisé, cette expansion est bien supérieure aux estimations de croissance potentielle et surestime sans doute un peu la réalité, même si le dynamisme de l'économie est indéniable.

Le défi de la BCE

Pour la Banque centrale européenne (BCE), dont le conseil des gouverneurs se réunit jeudi, la vigueur de ces statistiques constitue un réel défi dans le contexte d'une politique monétaire ultra-accommodante encore d'actualité. Reste que l'institution de Francfort guette toujours - et il s'agit là d'un facteur déterminant - les signes d'une remontée convaincante de l'inflation. Pour les gouvernements, une croissance soutenue crée des conditions favorables à une réforme du marché du travail et des marchés de produits, à même d'apporter un soutien structurel à ce cycle d'essor économique et d'assainir les finances publiques. Une occasion à ne pas manquer, qui risque fort d'être gâchée.

Pour les investisseurs, la gageure vient du fait que l'expansion ne peut pas accélérer indéfiniment. En fait, l'indice PMI du secteur manufacturier de la zone euro a légèrement reculé en janvier, même s'il reflète toujours une solide croissance de l'activité. La réaction des marchés à l'inévitable détérioration des statistiques méritera d'être suivie de près, même s'il ne s'agit pas d'un retournement majeur.

L'euro s'est hissé mercredi à son plus haut niveau depuis trois ans face au dollar, ce qui pourrait potentiellement freiner la croissance et les bénéfices. Les marchés d'actions ont pour leur part démarrer l'année sur les chapeaux de roue, avec un gain de près de 5% pour l'indice Euro Stoxx. Une déroute pourrait poindre à l'horizon lorsque les indicateurs seront en perte de vitesse.

-Richard Barley, The Wall Street Journal

(Version française Emilie Palvadeau) ed : ECH