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Avec vingt fonds spécialisés, Dexia AM est leader en France sur le marché de l'investissement socialement responsable (ISR). Comment constituez-vous ces fonds ?
Nous avons une approche best in class. Pour chaque zone géographique, nous ne retenons qu'un tiers environ des entreprises en fonction de leur performance sociale et environnementale. 

Par exemple, en Europe, nous partons de l'indice MSCI Europe qui comprend environ 600 valeurs. Après analyse sociale et environnementale, nous n'en retenons que 250. Cela correspond pour nous au champ des valeurs « investissables ». Ensuite nous regardons lesquelles sont sous-valorisées et intéressantes d'un point de vue financier pour établir un portefeuille d'environ 70 entreprises.

Nous sélectionnons les entreprises sur deux grands critères. D'une part, la façon dont elles gèrent leurs « parties prenantes », autrement dit leurs employés, leur environnement, les clients, les fournisseurs, les investisseurs, et la société civile. D'autre part, nous évaluons la durabilité de leur business model. Comment celui-ci est-il affecté par  le changement climatique, la rareté des ressources naturelles, le vieillissement de la population, le développement des marchés émergents, ou encore la globalisation? Les produits et services de l'entreprise sont-ils bons pour la santé ?

Comment obtenez-vous des informations fiables sur les entreprises ?
Pour pouvoir analyser les entreprises, nous utilisons beaucoup de sources d'information. Nous avons une équipe de dix analystes qui ne font que de l'analyse sociale et environnementale des entreprises. C'est important, car de nombreux gestionnaires mélangent l'analyse financière avec l'analyse développement durable.

Dans un premier temps, nous achetons les données d'agences de notation extra-financière, comme Vigeo en France, ou Riskmetrics (anciennement Innovest). Nous achetons également les données de GMI, organisme spécialisé dans la gouvernance d'entreprise.
Ensuite, pour satisfaire à nos propres critères, à savoir la gestion des parties prenantes et la durabilité du business model, nous contactons directement les entreprises, ainsi que des ONG et des syndicats.

A combien se monte le marché de l'ISR en Europe ?
L'étude la plus récente sur le marché européen de l'ISR date de 2007. Elle a été réalisée par la société Eurosif. A l'époque, le marché européen était chiffré à environ 2600 milliards d'euros. Sur ces encours, Eurosif différencie l'investissement «core», le plus exigeant en matière de développement durable, qu'elle estime à  510 milliards. Le reste, un peu plus de 2000 milliards, correspond à une approche plus légère. Ce sont par exemple les fonds « Engagement » dont nous avons parlé plus tôt.

La crise a-t-elle favorisé le développement de l'investissement socialement responsable ?
L'ISR n'a pas été épargné par l'effet de marché lié à la chute des bourses.  Cependant, en 2008, les fonds ISR ont connu des entrées de cash positives (+6%) alors que les fonds traditionnels ont enregistré des sorties de 6%.

La tendance s'est poursuivie au premier semestre 2009 : il y a plus d'entrée nette d'argent frais dans les fonds ISR que dans les fonds traditionnels. Cela nous amène à penser que les investisseurs font plus confiance aux fonds ISR. La crise a mis en évidence un besoin de transparence et d'une meilleure gouvernance.  Or, les fonds ISR analysent systématiquement la gouvernance des entreprises dans lesquelles ils investissent.

En outre, les investisseurs s'attachent à la durabilité du business model. Ils ne veulent plus investir dans quelque chose qui va durer deux ans et tomber en désuétude. Prenons l'exemple des 4x4. Avant la crise, ils connaissaient un succès important aux Etats-Unis. Depuis la crise et avec le changement climatique, ce mode de transport a été remis en cause. Les fonds responsables et durables avaient pris en compte cette évolution dans leur modèle d'investissement.

Quelles sont les grandes catégories de fonds ISR ?
La première catégorie de fonds est celle des «best in class».  Ils consistent à retenir dans chaque secteur les entreprises qui répondent le mieux au défi du développement durable.

D'autres fonds se concentrent sur une dimension du développement durable  comme le changement climatique, ou la gestion du capital humain : on les appelle les fonds thématiques. La troisième approche est normative, elle consiste à n'investir que dans les entreprises respectant les principales conventions ou traités internationaux. Une autre approche, de moins en moins présente, est l'approche éthique, qui consiste à exclure les entreprises impliquées dans des activités controversées comme l'alcool, le tabac, les jeux.

Enfin il y a une cinquième approche, appelée « Engagement » ou engagement actionnarial, où le fonds entre en contact avec l'entreprise pour y promouvoir des bonnes pratiques tenant davantage compte du développement durable.

Les quatre premières approches consistent à opérer une sélection, tandis que la dernière permet d'investir dans pratiquement toutes les entreprises à condition de dialoguer avec elles pour les faire évoluer.

Propos recueillis par Imen Hazgui et François Schott

- 06 Octobre 2009 - Copyright © 2006 www.easybourse.com

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