Berne (awp/ats) - L'été est la période des glaces. Si les Suisses en sont moins friands que les Allemands ou les Italiens, les choses pourraient changer grâce à l'essor des petits glaciers artisanaux.

Les Suisses ne sont pas réputés pour être de grands mangeurs de glaces. Depuis les années 1990, la consommation n'a pratiquement pas bougé malgré la croissance de la population.gelat

Avec une consommation par habitant de 5,4 litres par année, la Suisse fait pâle figure en comparaison européenne. La consommation est nettement plus élevée en Allemagne et en Italie avec 8 litres.

Contrairement à une idée reçue, on consomme plus de glaces dans les pays froids du nord de l'Europe qu'autour de la Méditerranée, à l'exception de l'Italie. En tête du classement, se retrouvent la Suède et la Finlande avec quelque 12 litres de glace, soit plus du double des Suisses, selon les chiffres de la faîtière Glacesuisse.

L'association compte comme membres de gros producteurs tels que Unilever, Froneri, Emmi et Midor ainsi que des fabricants de glaces de taille moyenne tels que Gasparini et Giolito. La statistique ne comprend toutefois pas le nombre croissant de gelateria locales. Selon les estimations, leur part aux ventes totales représente seulement un pourcentage à un chiffre, soit moins de 10%.

POTENTIEL POUR LES GLACES ARTISANALES

Leo Egloff, ancien membre de la direction de Mövenpick, se montre toutefois convaincu du potentiel des gelateria. Ce fin connaisseur de la branche ne mâche pas ses mots. Selon lui, la stagnation des ventes est due à la "médiocrité" de l'industrie de la glace en Suisse.

"Dans les années 1980, nous utilisions encore chez Mövenpick de la crème et du beurre pour fabriquer de la crème glacée. Entre-temps, on a recouru à la graisse végétale et à l'huile de palme", critique-t-il.

De plus, de l'air est injecté dans la glace afin d'en augmenter le volume. Plus il y a d'air, plus la marge est élevée pour le fabricant, résume Leo Egloff. A ses yeux, il ne fait aucun doute que la consommation augmenterait s'il y avait plus de crème glacée de haute qualité.

La société Froneri, coentreprise de Nestlé, qui produit les glaces Mövenpick, affirme que ses propres glaces sont 100% naturelles. Un coup d'oeil sur la liste des ingrédients de l'arôme classique "vanille bourbon" montre toutefois que la matière grasse du lait est partiellement remplacée par des émulsifiants, appelés mono- et diglycérides d'acides gras, ainsi que par de la graisse de coco.

Une indication sur la quantité d'air injectée dans la glace se trouve dans le poids figurant sur l'emballage. Un litre de glace vanille Mövenpick pèse 516 grammes. Chez la marque premium Häagen-Dasz, qui appartient aussi à Froneri, le même volume atteint 860 grammes.

ACCENT SUR LA QUALITÉ

Les glaces artisanales de la Gelateria di Berna comprennent également peu d'air. Son directeur David Amrein estime que le volume de sa glace vanille équivaut à son poids. Il ne peut toutefois pas fournir d'informations plus détaillées, la glace n'ayant pas été pesée.

Dans ses ingrédients, la gelateria a renoncé aux matières grasses végétales, mais opte pour du lait bio et de la crème, en sus de la poudre de lait écrémé ou des protéines de lait. Dans la mesure du possible, les ingrédients proviennent de producteurs locaux, relève-t-il.

Ce glacier artisanal a démarré ses activités il y a sept ans et dispose désormais de quatre points de vente en ville de Berne ainsi que d'une succursale à Zurich. Selon David Amrein, l'entreprise profite de la tendance générale à la nourriture locale, produite de façon durable. "Nos efforts se concentrent sur la qualité, la qualité, la qualité", martèle-t-il.

EXEMPLE DE LA BIÈRE

Ce succès réjouit Leo Egloff. "Les gelateria sont une excellente réponse aux glaces de laboratoire". La prise de conscience de la population augmente concernant les ingrédients dans l'alimentation, estime l'ancien cadre de Mövenpick.

Pour l'expert, l'industrie locale de la glace fait face à une évolution semblable à celle que connaît le secteur de la bière depuis des années. Des petites brasseries indépendantes mettent les grands groupes sous pression et les forcent à innover davantage.

La tendance ne fait certes que commencer. Certains grands fabricants ont toutefois déjà modifié leur pratique. Le groupe Emmi a par exemple adapté ses recettes et développé un nouvel glaçage sans huile de palme.

Le producteur de glaces Mister Cool a également renoncé totalement à l'huile de palme et aux graisses hydrogénées. "Fondamentalement, les gens préfèrent en ce moment l'artisanat à l'industrie", estime son directeur Daniel Jüni.

ats/buc