PARIS (Reuters) - La fusée européenne Ariane 6 s'apprête à décoller pour la première fois mardi après un problème de données de dernière minute, un vol inaugural qui intervient après quatre ans de retard et un hiatus d'un an depuis la mise à l'arrêt d'Ariane 5.

La mission inaugurale de la fusée, qui devrait durer un peu moins de trois heures, ne sera pas un vol commercial mais transportera des satellites et des expérimentations d'agences, d'entreprises et d'universités européennes, selon l'Agence spatiale européenne (ESA).

Des photos publiées par l'ESA montrent la fusée de 56 mètres de haut sur sa base de lancée en Guyane française, où l'agence a décrit les conditions météorologiques les plus récentes comme un "feu vert".

"Les conditions sont très bonnes. Nous avons un risque modéré d'orages, mais la situation s'améliore à l'approche de la fenêtre (de lancement). La météo ne devrait donc pas poser de problème aujourd'hui", a déclaré à Reuters Toni Tolker-Nielsen, directeur du transport spatial à l'ESA depuis la salle de contrôle du port spatial de Kourou.

Officiellement, la fusée était censée décoller lors d'une fenêtre de lancement de quatre heures démarrant à 18h00 GMT. L'agence spatiale a déclaré qu'un "petit problème" avait été décelé lors d'un contrôle de routine dans le système d'acquisition de données, repoussant le début de la fenêtre de lancement à 19h00 GMT.

"C'est seulement la première étape, nous avons encore beaucoup de travail devant nous, mais nous sommes focalisés sur l'avenir de l'écosystème de transport spatial européen", a déclaré le directeur général de l'ESA Josef Aschbacher sur le réseau social X.

Le développement d'Ariane 6, porté par ArianeGroup, un groupe co-détenu par Airbus et Safran, a entraîné des coûts estimés à quatre milliards d'euros. Son arrivée, prévue en 2020, a été retardée à maintes reprises.

Depuis la mise hors service d'Ariane 5 il y a plus d'un an, l'Europe n'avait plus de lanceur indépendant pour la mise en orbite de ses satellites. La guerre en Ukraine a rendu impossible l'utilisation des fusées russes Soyouz et le lanceur Vega C de fabrication italienne ne peut toujours pas décoller.

Une nouvelle génération de petits lanceurs commerciaux européens est en cours de développement.

Selon Josef Aschbacher, le manque d'accès indépendant de l'Europe à l'espace a été un revers majeur, forçant les agences européennes à se joindre aux vols des fusées Falcon 9 de leur rival SpaceX.

Face à la concurrence accrue de la société d'Elon Musk, les 22 nations parties à l'ESA s'étaient mises d'accord en 2014 sur le développement de deux versions d'Ariane 6.

Les États-Unis et des dizaines d'autres pays sont devenus de plus en plus dépendants de Falcon 9 pour leurs mises en orbites.

Si tout se passe bien lors du vol inaugural, le lanceur aura 30 missions à remplir sur les prochaines années, y compris 18 lancements pour les satellites Kuiper d'Amazon, l'un des rares satellites qui pourraient faire concurrence au Starlink de SpaceX.

Si le lancement de mardi est repoussé, l'ESA a déclaré qu'elle ferait de nouveaux essais d'ici le 31 juillet.

(version française Pauline Foret; édité par Blandine Hénault)

par Tim Hepher et Joey Roulette