par Kyle Peterson et Karen Jacobs

Il est de plus en plus probable que des compagnies révisent leurs commandes des compagnies dans un avenir proche, estiment les analystes du secteur.

"A partir du moment où les compagnies aériennes étudient leurs besoins futurs en essayant d'économiser le plus possible, je pense qu'il est très probable que nous assistions prochainement à de vastes reports de commandes, voire à des annulations pures et simples", estime Jim Corridore, spécialiste des compagnies aériennes chez Standard & Poor's.

Cette situation augure de difficultés accrues à la fois pour les constructeurs et pour les transporteurs ayant le plus besoin de nouveaux appareils plus économiques.

Les premiers, comme Airbus et Boeing, ne sont payés intégralement qu'à la livraison des appareils commandés et voient donc leurs perspectives de croissance en 2009 nettement réduites.

Les seconds, quant à eux, risquent de perdre toute compétitivité à défaut de disposer de nouveaux appareils moins gourmands en carburant.

A défaut de signes encourageants pour la reprise du trafic aérien, plusieurs transporteurs négocient déjà avec Boeing et Airbus des modifications de commandes qui pourraient déboucher sur des accords dans les prochaines semaines", écrivait Joseph Nadol, analyste chez JP Morgan, dans une note datée du 25 mars.

Chez le constructeur européen, on indiquait mercredi par courriel que l'entreprise "n'avait reçu aucune annulation de la part d'une compagnie aérienne américaine ces derniers mois", tout en reconnaissant "un ou deux" reports occasionnels.

"Nous ne voyons pas la situation évoluer vers des reports ou des annulations massifs sur le marché américain", ajoutait un porte-parole d'Airbus, Clay McConnell.

LES STOCKS POURRAIENT S'ACCUMULER CHEZ BOEING ET AIRBUS

A l'exception d'United Airlines, les six principales compagnies aériennes des Etats-Unis prévoient de prendre livraison de nouveaux avions en 2009.

American Airlines renouvelle actuellement sa flotte et a confirmé cette semaine son intention de recevoir 29 Boeing 737.

Delta Airlines doit recevoir cette année 32 appareils. Le transporteur a en outre 18 commandes fermes sur le Boeing 787 mais le retard pris par le "Dreamliner" rend le calendrier de livraison incertain.

Delta n'a pas souhaité faire de commentaires sur d'éventuels changements de projets.

Les commandes visant à étendre les flottes sont plus susceptibles d'être annulées que celles qui portent sur le remplacement d'appareils anciens, a souligné mercredi Robert Mann, consultant en transport aérien.

"Tout le monde surveille de bien plus près les avions qui étaient envisagés comme des appareils 'de croissance'", a-t-il déclaré.

A l'inverse, les remplacements d'appareils anciens sont selon lui dans l'intérêt des compagnies. "Si on peut se le permettre, le moment est idéal pour renouveler sa flotte. Si elles ont une vision à long terme, les compagnies doivent se faire livrer ces avions."

Quant à l'impact sur les constructeurs eux-mêmes, il reste incertain. Airbus et Boeing disposent d'un très grand nombre de commandes non encore livrées, dont la majorité sont destinées à des clients asiatiques et moyen-orientaux.

Boeing, qui a reçu en ce début d'année plus d'annulations que de commandes, conserve néanmoins près de 3.600 livraisons à effectuer, soit l'équivalent de sept années de production.

Selon le constructeur américain, la diversité de sa clientèle le met à l'abri des défections de certains d'entre eux. Mais de l'avis de Robert Mann, la nature de la crise économique pourrait voir s'aligner chez les constructeurs des rangées d'avions assemblés mais dépourvus d'acheteurs.

"Il devient très possible qu'Airbus, Boeing, Embraer et Bombardier se retrouvent avec des avions prêts à voler mais sans nulle part où aller. Je pense que ce moment n'est plus très loin."

Airbus a annoncé le 3 avril avoir enregistré 22 commandes et 14 annulations au cours des trois premiers mois de l'année. Son carnet de commandes total s'élève à plus de 3.700 appareils.

Version française Gregory Schwartz, avec la contribution de Matthias Blamont, édité par Marc Angrand