Paul J.Davies,

The Wall Street Journal

Quand les actions et les obligations font l'objet d'un mouvement de défiance simultané, cela signale en général un sérieux problème. Voilà pourquoi les actions du secteur bancaire européen souffrent actuellement. Les craintes collectives au sujet des mauvaises créances, liées à l'effondrement des prix de l'énergie ou des marchés émergents, n'expliquent pas à elles seules la chute de 25% accusée par le secteur depuis le début 2016. Car ces craintes sont à l'esprit des opérateurs de marché depuis déjà un certain temps.

En réalité, les banques ne font pas face à une crise aigüe comme en 2008 mais à un problème qui pourrait se révéler beaucoup plus profond : une crise chronique de rentabilité qui les empêcherait de renforcer leur base de fonds propres de manière adéquate. Et la Banque centrale européenne n'a guère la capacité d'y remédier, d'autant que la politique monétaire accommodante actuelle, qui n'est pas prête à s'interrompre, pénalise fortement les marges d'intérêt des établissements prêteurs.

Une possible rechute de l'économie qui inquiète

Plus grave, si la reprise économique s'enraye, le portefeuille de créances douteuses d'un montant évalué à 1.000 milliards d'euros pourrait devenir plus difficile à gérer et engendrer de nouvelles pertes pour le secteur. Ceci alors que les grands établissements bancaires, en particulier en Allemagne et en Italie mais en France également, ont encore des coûts à assumer pour la restructuration et le redimensionnement de certaines de leurs activités, comme la banque de détail ou d'investissement.

La plupart des banques de la zone euro disposent - tout juste - de fonds propres suffisants. Mais nombre d'entre elles doivent encore accumuler des capitaux à l'aide de leurs bénéfices afin de renforcer leur solvabilité à l'horizon 2019 et la qualité de leur capital.

Augmenter les risques ou solliciter les actionnaires

Faute des soutiens associés à une reprise économique, les banques n'atteindront pas leurs objectifs. Et si elles ne parviennent pas à afficher une solvabilité suffisante, les régulateurs les empêcheront de payer, non seulement des dividendes en actions, mais également des coupons sur les obligations junior assimilées à du capital. Une crainte qui explique d'ailleurs le désamour actuel vis-à-vis de ces emprunts.

Le coût pour assurer de la dette junior contre un défaut a doublé cette année, alors que ce même coût a augmenté seulement de moitié pour les autres obligations à haut rendement.

Les banques disposent de deux options pour s'extraire de cette périlleuse situation. La première consisterait à accorder des prêts plus risqués, et donc plus rémunérateurs, mais avec une chance de défaut plus importante. L'autre serait de recourir à des augmentations de capital. Aucune de ces options ne trouve grâce aux yeux des investisseurs.

-Paul J.Davies, The Wall Street Journal

(Version française, Jérôme Batteau) ed: ECH - VLV