(Actualisé tout du long avec fin de la réunion, déclarations et éléments supplémentaires; TV à disposition)

BRUXELLES, 3 avril (Reuters) - Les membres de l'Otan sont convenus mercredi de préparer un dispositif d'aide militaire à l'Ukraine sur le long terme, sans toutefois s'engager à mettre en place un fonds de 100 milliards d'euros sur cinq ans, comme proposé par le secrétaire général de l'Alliance, certains ayant noté la difficulté d'un tel projet.

La proposition de Jens Stoltenberg, formulée en amont de la réunion à Bruxelles des ministres des Affaires étrangères des pays membres de l'Otan, prévoit aussi de conférer à l'Alliance un rôle plus direct dans la coordination des livraisons d'armes, de munitions et d'équipements à Kyiv, dont la guerre face à la Russie est entrée dans sa troisième année.

Dans le cadre de ce projet, l'Otan reprendrait à son compte une partie des prérogatives d'une coalition ad hoc dirigée par les Etats-Unis - le Groupe de contact sur la défense de l'Ukraine, dit "format Ramstein", en référence à la base militaire américaine en Allemagne où ont eu lieu des discussions. Cette démarche vise à se prémunir d'un éventuel changement de position de Washington en cas de retour de Donald Trump à la Maison blanche, ont indiqué des diplomates.

"Nous devons revoir la dynamique de notre soutien", a déclaré Jens Stoltenberg devant la presse. "Nous devons garantir une assistance sécuritaire fiable et prévisible à l'Ukraine sur le long terme (...). Des promesses sur plusieurs années, plutôt que des offres à court terme".

Il a indiqué avoir pour objectif qu'une décision soit entérinée lors du prochain sommet de l'Otan, prévu du 9 au 11 juillet, à Washington. Toute décision requiert un consensus au sein des 32 membres de l'Alliance, rejointe plus tôt cette année par la Suède.

Alors que l'Ukraine souhaite elle aussi intégrer l'Alliance, ses membres se disent favorables à cette idée mais seulement une fois terminée la guerre avec la Russie.

Moscou a reproché à l'Otan, qui fête cette semaine son 75e anniversaire, d'être revenue à un état d'esprit de Guerre froide.

"INTÉRESSANT"

Jusqu'à présent, depuis le début de l'offensive lancée par la Russie en Ukraine le 24 février 2022, les aides apportées par l'Otan à Kyiv sont non-létales, du fait de craintes qu'un rôle plus direct alimente une escalade des tensions avec Moscou. Au niveau bilatéral, des membres de l'Alliance ont fourni des milliards de dollars d'armes à l'Ukraine.

Les premières réactions aux mesures évoquées par Jens Stoltenberg suggèrent qu'une décision devrait nécessiter des travaux.

La Hongrie, dont le Premier ministre Viktor Orban est proche du Kremlin, "ne soutiendra aucune proposition de l'Otan qui pourrait rapprocher l'Alliance d'une guerre ou la faire basculer d'une coalition défensive à offensive", a affirmé lors de la réunion le ministre hongrois des Affaires étrangères, Peter Szijjarto, selon des propos rapportés sur le réseau social X par le porte-parole du gouvernement de Budapest.

Jens Stoltenberg a déclaré que disposer d'un cadre plus robuste à l'Otan ne modifierait pas la nature défensive de l'Alliance. Il s'est dit confiant sur le fait que les inquiétudes de la Hongrie pourront être apaisées au cours des prochaines semaines.

José Manuel Albares, chef de la diplomatie espagnole, a fait savoir devant des journalistes que des représentants et lui-même avaient prévenu contre une potentielle duplication des efforts bilatéraux, de l'Union européenne et de l'Otan.

"Nous devons voir comment cela fonctionnerait pays par pays, quel pourcentage", a déclaré pour sa part le ministre italien des Affaires étrangères, Antonio Tajani, soulignant l'importance des détails pour un tel projet.

"Nous avons besoin d'une base juridique. La proposition est intéressante mais, avant de proposer à l'Ukraine un montant précis, il vaut mieux évaluer, étudier, et comprendre ce qui peut être fait, quand, comment, par qui", a-t-il ajouté.

La cheffe de la diplomatie allemande, Annalena Baerbock, a décrit le projet comme "juste et important". Son homologue letton, Krisjanis Karins, lui aussi favorable à cette proposition, a évoqué l'idée que la contribution de chaque pays soit calculée en fonction de leur produit intérieur brut (PIB). (Reportage Andrew Gray et John Irish, avec la contribution de Benoit Van Overstraeten, Geert De Clercq et Inti Landauro; version française Camille Raynaud, Mathias de Rozario et Jean Terzian, édité par Blandine Hénault et Nicolas Delame)

par Andrew Gray et John Irish