par Peter Graff et Steven Slater

Ce programme, échelonné sur quatre ans, prévoit des milliers de suppressions de postes dans la fonction publique, une hausse graduelle de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à partir de 2013 et des économies sur les aides sociales à partir de 2014, mais laisse intacte l'avantageuse fiscalité des entreprises, avec un taux de l'impôt sur les sociétés (IS) de 12,5%.

L'objectif est d'économiser 15 milliards d'euros de 2011 à 2014.

Dublin s'en tient par ailleurs aux prévisions de croissance déjà annoncées ce mois-ci, et que de nombreux économistes avaient jugées très optimistes, étant donné l'effet prévisible de la politique de rigueur sur les dépenses de consommation.

"Cela ne me semble pas tant réaliste que ça. Ils prévoient apparemment de mettre en place des mesures budgétaires draconiennes, et ils s'attendent toutefois à de la croissance dans un tel contexte. Cela paraît fortement improbable", a commenté Stephen Lewis, économiste en chef chez Monument Securities.

L'agence Standard & Poor's, qui a déclassé l'Irlande dans la nuit de mardi à mercredi trouve elle aussi les hypothèses de croissance de Dublin trop optimistes.

L'Allemagne a fait savoir qu'elle ne ferait aucune recommandation à l'Irlande concernant sa politique budgétaire, et qu'elle n'imposerait notamment aucune exigence sur un relèvement de l'impôt sur les sociétés, a indiqué un porte-parole du gouvernement allemand.

La réaction des marchés a été très limitée. L'écart de rendement entre la dette irlandaise à dix ans et celle de l'Allemagne s'est accru à un plus haut de séance de 660 points de base, avant de redescendre à 652.

L'euro, qui avait fortement baissé ces derniers jours en raison des inquiétudes pesant sur l'économie des pays dits "périphériques", a à peine bougé.

L'Irlande, un des membres les plus dynamiques de la zone euro il y a encore quelques années, a rejoint dimanche la Grèce en acceptant d'être remise à flot par l'UE et le FMI, tout comme Athènes avait dû s'y résoudre au printemps.

Une enquête menée par Reuters auprès de 50 analystes révèle que 34 d'entre eux s'attendent à ce que le Portugal soit le prochain pays sur la liste. Dans ce cas, les craintes qui pèsent actuellement sur Lisbonne se reporteraient sur l'Espagne puis le reste de la zone euro.

"PAGAILLE POLITIQUE"

Le plan de rigueur fait partie des conditions posées par l'UE et le FMI en échange de l'octroi d'une vaste aide financière, dont le montant final n'a pas encore été arrêté, a indiqué le Premier ministre irlandais Brian Cowen, devant le parlement. "Un montant de l'ordre de 85 milliards d'euros a été évoqué", a-t-il en revanche indiqué.

Selon le quotidien The Irish Independant, la situation des banques du pays est à ce point critique que le gouvernement pourrait leur apporter des capitaux supplémentaires dès ce week-end, soit bien avant le versement des premiers fonds de l'UE et du FMI.

L'Union européenne a annoncé que les pourparlers progressaient sans accroc, mais qu'il faudrait encore quelques jours pour les conclure. "Nous espérons pouvoir les mener à bien vers la fin novembre. Je ne peux pas être plus précis", a indiqué un porte-parole de l'UE à Bruxelles.

Une fois que l'accord sera signé, il devra être approuvé par les ministres européens des Finances et la direction du FMI avant que les premiers versements puissent être effectués.

Ces versements devraient de plus être soumis à des conditions telles que l'approbation par le parlement irlandais du plan de rigueur.

La popularité du gouvernement irlandais s'est effondrée ces derniers mois et il est peu probable que Brian Cowen parvienne à se maintenir longtemps à son poste en 2011 pour faire appliquer son programme.

Son successeur aura quant à lui les mains liées par l'accord qui s'apprête à être conclu et dont il devra respecter les conditions.

"Jamais dans l'histoire de l'Etat n'avons nous connu une telle pagaille politique", déplore l'éditorialiste Stephen Collins dans les colonnes de l'Irish Times.

"En tombant en ruines à quelques jours de la publication d'une stratégie budgétaire de quatre ans, la coalition de gouvernement a ajouté une nouvelle nappe d'incertitudes à une situation déjà explosive."

Avec Jodie Ginsberg, Lorraine Turner et Carmel Crimmins à Dublin et William James à Londres, Gregory Schwartz pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat