BUENOS AIRES, 28 janvier (Reuters) - Israël et les organisations juives mondiales ont dénoncé le projet de création par l'Argentine et l'Iran d'une commission indépendante pour enquêter sur l'attentat antijuif de 1994 à Buenos Aires, commandité par Téhéran selon la justice argentine.

L'annonce de cette commission "vérité", faite ce week-end, constitue une victoire pour la diplomatie de la République islamique, soupçonnée par les chancelleries occidentales de chercher à se doter de l'arme atomique sous couvert d'un programme énergétique civil.

L'attentat de 1994 contre la Mutuelle juive argentine (Amia) a fait 85 morts. Aux termes de l'accord conclu entre Buenos Aires et Téhéran et qui doit être entériné par le Congrès argentin, des responsables argentins pourront interroger des suspects en Iran, et non plus dans un pays tiers comme initialement proposé par l'Argentine.

En 2007, les autorités argentines avaient obtenu d'Interpol des mandats d'arrêt visant cinq Iraniens - dont l'actuel ministre de la Défense, le général Ahmad Vahidi - ainsi qu'un Libanais.

"L'accord entre l'Argentine et l'Iran est accueilli en Israël avec stupéfaction et une profonde déception", a fait savoir le ministère israélien des Affaires étrangères dans un communiqué. "L'ambassadeur d'Argentine en Israël va être convoqué au ministère des Affaires étrangères à Jérusalem pour fournir des explications".

Pour sa part, le directeur des relations internationales du Centre Simon Wiesenthal, Shimon Samuels, a déclaré à Reuters: "Former avec l'Iran une commission mixte chargée de dire la vérité est une farce. Cela ne servira qu'à valider le terrorisme et à encourager le régime des mollahs à parrainer d'autres attaques".

Sur sa page Facebook, la présidente argentine Cristina Fernandez a fait savoir que les cinq "commissaires chargés de dire la vérité" seraient désignés de façon commune et n'habiteraient ni l'Argentine, ni l'Iran.

"Le dialogue est la seule façon de résoudre les conflits entre les pays, quel que soit leur degré de gravité", ajoute-t-elle.

L'attaque contre l'Amia a eu lieu deux ans après un autre attentat à la bombe contre l'ambassade d'Israël à Buenos Aires, qui avait fait 29 morts. Un groupe lié à l'Iran et au Hezbollah libanais avait revendiqué cet attentat.

Le gouvernement iranien a nié toute redsponsabilité dans les deux attentats.

L'Argentine abrite la plus importante communauté juive d'Amérique latine. (Hugh Bronstein, avec Allyn Fisher-Ilan à Jérusalem; Jean-Loup Fiévet pour le service français)