(Actualisé avec destination de Jammeh, maintien des troupes)

BANJUL/DAKAR, 22 janvier (Reuters) - L'ex-président gambien Yahya Jammeh est parti en exil samedi vers la Guinée équatoriale, avec une escale en Guinée, après avoir quitté ses fonctions à la tête de l'Etat, a annoncé Marcel de Souza, de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao).

Au pouvoir depuis un coup d'Etat en 1994, Jammeh a refusé pendant des semaines de reconnaître sa défaite à l'élection présidentielle du 1er décembre.

Il a finalement cédé vendredi à la pression des pays d'Afrique de l'Ouest qui menaçaient d'intervenir militairement pour que le président élu, Adama Barrow, puisse prendre ses fonctions.

Les 7.000 soldats sénégalais et nigérians entrés jeudi en Gambie avec l'aval de la Cédéao ont suspendus leurs opérations mais une partie des troupes restera dans le pays pour assurer la sécurité, a annoncé samedi le responsable de l'organisation lors d'une conférence de presse.

Un avion transportant Yahya Jammeh a quitté l'aéroport de Banjul en milieu de soirée. L'ancien dirigeant n'a fait aucun commentaire à l'aéroport.

Jammeh était accompagné du président guinéen Alpha Condé, qui a fait office de médiateur dans la crise et a négocié les termes de son départ avec son homologue mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz et d'autres dirigeants africains.

Ce départ en exil met fin à des semaines de blocage. Adama Barrow a prêté serment jeudi, jour de l'expiration du mandat de Jammeh, à l'ambassade de Gambie à Dakar. Il devrait désormais regagner son pays.

Le règlement du conflit gambien est une victoire pour la diplomatie africaine, notamment parce qu'aucun combat n'a opposé les soldats sénégalais et nigérians entrés en Gambie et les forces restées fidèles à l'autocrate.

"Le règne de la peur a été banni pour de bon de Gambie", a réagi Adama Barrow devant une foule rassemblée vendredi dans un hôtel de Dakar, une fois qu'il était clair que Jammeh accepterait de céder le pouvoir.

"A tous ceux que les circonstances politiques ont obligé à quitter le pouvoir, vous avez maintenant la liberté de rentrer chez vous", a-t-il dit.

Comme prix de son départ, Yahya Jammeh a réclamé une amnistie, le droit de retourner en Gambie et la reconnaissance de son parti politique, a indiqué Marcel de Souza, de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao).

"L'accord d'amnistie n'est pas finalisé", a-t-il précisé.

A Banjul, certains habitants ne voulaient pas entendre parler d'un tel accord. "Ce qu'il faudrait, c'est sa reddition, les menottes et la mort", a déclaré une assistance dentaire de 50 ans, Patience Williams.

Yahya Jammeh, qui promettait avant l'élection de diriger son pays pendant "un milliard d'années", a déclaré un état d'urgence cette semaine et dissous son gouvernement pour tenter de s'accrocher au pouvoir. L'Assemblée nationale a dans le même temps prolongé son mandat de trois mois. Mais plus de la moitié de ses ministres ont quitté le gouvernement et 45.000 habitants ont fui vers le Sénégal voisin. (Emma Farge; Jean-Stéphane Brosse et Julie Carriat pour le service français)