* Nouvelles propositions patronales attendues vendredi matin

* Les syndicats s'impatientent sur le traitement des contrats courts

* Le Medef et l'UPA se divisent

par Yann Le Guernigou

PARIS, 10 janvier (Reuters) - Patronat et syndicats reprendront vendredi leurs négociations sur une réforme du marché du travail alliant sécurité pour les salariés et flexibilité pour les entreprises, faute d'être parvenus jeudi à des avancées décisives vers un accord.

Ces négociations, dont l'issue est jugée cruciale pour surmonter des rigidités pointées du doigt par les agences de notation et les organisations internationales dans leurs rapports sur la France, ont été parasitées par un incident entre le Medef et l'UPA (Union professionnelle artisanale) au sein de la délégation patronale.

En déplacement en Gironde, François Hollande a déclaré qu'il faisait confiance aux partenaires sociaux pour "saisir l'occasion" et conclure sur un accord leur discussions entamées en octobre. (voir ).

"C'est une négociation essentielle puisqu'elle porte sur la sécurisation de l'emploi pour lever ce que j'appelle la double peur : la peur du salarié d'être licencié, la peur de l'employeur d'embaucher", a dit le chef de l'Etat.

La partie patronale a annoncé qu'elle remettrait vendredi matin aux syndicats un nouveau projet d'accord, le huitième depuis le début des négociations, en se félicitant des "avancées significatives" enregistrées selon elle dans la journée.

La septième mouture de son projet, diffusée jeudi après-midi, a permis de répondre en partie à certaines revendications des organisations de salariés mais en continuant d'ignorer la principale, celles d'un encadrement des contrats courts pour lutter contre leur utilisation abusive par les entreprises.

"La journée a été longue, compliquée, très technique. C'est pour cela qu'on prend beaucoup de temps mais il y a eu beaucoup avancées de part et d'autre", a déclaré Patrick Bernasconi, le négociateur du Medef.

Il n'a pas voulu s'engager sur la présence d'un article sur les contrats courts dans le texte de vendredi, indiquant seulement qu'il y avait "encore quelques arbitrages à faire".

"Il y aura quelque chose sur les contrats courts sinon on ne se reverra pas", a prévenu Joseph Thouvenel, chef de la délégation de la CFTC.

Son homologue de la CFDT, un syndicat dont la signature est cruciale pour un accord, a exprimé de son côté son "inquiétude" et sa "frustration".

LES CONTRATS DE PROJET A LA TRAPPE

"On avance lentement, on a vraiment l'impression de faire du pas et pas et d'arracher chaque ligne, chaque paragraphe", a dit Patrick Pierron. "Nous pensions que le patronat serait en capacité d'avancer un peu plus rapidement", a-t-il ajouté en promettant une "longue journée" vendredi, la date butoir pour le succès ou l'échec de ces négociations.

Pour le responsable CFDT, "on ne peut pas ne rien faire contre l'utilisation abusive des contrats courts" par les entreprises. Il a cité comme autres points de friction l'encadrement du temps partiel subi par les salariés ou un article stipulant que le fond doit prévaloir sur la forme dans l'encadrement juridique des procédures de licenciement.

En attendant, les entrepreneurs ont donné satisfaction aux syndicats sur un autre point en renonçant à instaurer un "contrat de projet", l'équivalent d'un CDI à durée déterminée, considéré comme un véritable "chiffon rouge" par certains.

Ils persistent en revanche à vouloir faciliter la mise en oeuvre de "contrats intermittents" utilisés notamment pour certains emplois saisonniers.

L'UPA a lancé un pavé dans la marre jeudi après-midi en menaçant dans un communiqué de ne pas signer le "projet d'accord en cours de finalisation (qui) organise la flexibilité de l'emploi au seul profit de quelques grandes entreprises."

L'organisation, une des trois composantes de la délégation patronale, représente les très petites entreprises directement concernées par un des éléments du projet, la généralisation à tous les salariés d'une assurance complémentaire santé. Son coût, estimé à 2,9 milliards d'euros, sera pris en charge pour moitié par les employeurs.

L'UPA a reproché au Medef, qui l'a contesté, de s'opposer à ce que les branches professionnelles puissent choisir l'opérateur qui gérera le dispositif, laissant ainsi les entreprises artisanales "seules et totalement désarmées face aux sociétés d'assurance".

La généralisation d'une couverture santé complémentaire était une des quatre grandes revendications de la CFDT, le chef de file des syndicats "réformistes" - les autres étant la CFTC et la CFE-CGC - dont la signature sera nécessaire pour qu'un accord soit réputé conclu.

La CGT, qui a adopté une ligne dure depuis le début, comme Force ouvrière (FO), ont indiqué de leur côté qu'elles ne signeraient pas un document organisant selon eux une "déréglementation" du marché du travail. (Avec Claude Cannellas, édité par Véronique Tison)