* Un dispositif qui se heurte à une résistance patronale

* Il ne sera maintenu tel quel que pour six critères

* Le Medef prend acte, se dit vigilant sur le financement

PARIS, 8 juillet (Reuters) - Le Premier ministre, Edouard Philippe, propose de simplifier les modalités de prise en compte de la pénibilité au travail, sujet à controverses, dans une lettre adressée samedi aux partenaires sociaux et dont Reuters a obtenu copie.

Depuis son entrée en vigueur le 1er janvier 2015, le compte personnel de prévention de la pénibilité n'a pas cessé d'être sous le feu des critiques des organisations patronales, qui le jugent trop contraignant, voire inapplicable.

Dans son courrier, Edouard Philippe dit vouloir pérenniser le principe d'un dispositif qui permet à des salariés exposés à des conditions de travail pénibles de bénéficier de formations ou d'un départ plus précoce à la retraite.

Mais le gouvernement s'est engagé en juin à le simplifier pour les entreprises en garantissant les droits des salariés.

Les modalités actuelles de prise en compte de l'exposition à la pénibilité ne seront ainsi maintenues que pour six facteurs sur dix : le travail en milieu hyperbare, de nuit, répétitif, en "équipes successives alternantes" (posté), en milieu bruyant ou exposé à des températures extrêmes.

Pour les quatre autres facteurs, pour lesquels la mesure de l'exposition est trop complexe, les modalités de compensation sont en revanche simplifiées.

Ce sont la manutention manuelle de charges, les postures pénibles, les vibrations mécaniques et les risques chimiques, pour lesquels le droit à départ anticipé à la retraite sera lié à la reconnaissance d'une maladie professionnelle.

NOUVEAU FINANCEMENT

Dans ce cas, le dispositif sera déclenché dès lors que le taux d'incapacité permanente excède 10%, sans condition de durée d'exposition, précise Edouard Philippe.

"La liste des maladies professionnelles concernées sera établie au regard des facteurs de pénibilité en question et une visite médicale de fin de carrière permettra à ces personnes de faire valoir leurs droits", écrit-il.

Le Premier ministre propose également de modifier le mode de financement de ce dispositif, rebaptisé "compte professionnel de prévention", censé entrer en vigueur en 2018, les droits acquis dans le système actuel étant garantis.

Ainsi, les cotisations spécifiques créées lors de la création du compte pénibilité seront supprimées et remplacées par un financement mis en place dans le cadre de la branche accidents du travail et maladies professionnelles de la Sécurité sociale, précise Edouard Philippe.

Il souhaite enfin que branches et entreprises engagent des négociations relatives à la prévention de la pénibilité.

Le Medef, à la pointe de la résistance patronale au compte pénibilité, a pris acte de la réforme proposée, qui s'inscrira dans le cadre du projet de loi d'habilitation visant à réformer le code du travail par ordonnances.

Mais l'organisation patronale avertit dans un communiqué qu'elle sera très "vigilante" concernant le mode de financement et souligne que le maintien du dispositif pour six critères reste une contrainte supplémentaire pour les entreprises. (Emmanuel Jarry)