* L'extension de la procréation médicalement assistée en question

* La GPA rejetée au nom d'un "refus de la marchandisation"

* Accord sur la nécessité d'améliorer la fin de vie

par Julie Carriat

PARIS, 6 juin (Reuters) - L'extension de la procréation médicalement assistée, l'un des sujets-phares des Etats généraux de la bioéthique, continue de diviser mais les Français sont en revanche unanimes sur la nécessité d'améliorer la fin de vie, souligne le Comité consultatif national d'éthique.

Le CCNE présente jeudi au Parlement une synthèse des Etats généraux de la bioéthique qui étaient destinés à "prendre le pouls de la société civile" sur ces questions et font le constat d'un "refus de la marchandisation du corps humain".

La consultation a réuni près de 65.000 contributions sur internet du 12 février au 30 avril et permis 150 auditions d'associations, société savantes, institutions ou groupes de courants de pensée philosophiques ou religieux.

Publiés mercredi, ces résultats seront soumis jeudi à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST). Le CCNE remettra par la suite un avis rappelant "les grandes valeurs éthiques" à prendre en compte dans la future loi de bioéthique dont la présentation par le gouvernement est attendue à l'automne, pour un examen au Parlement début 2019.

L'ouverture de la PMA aux couples de femmes et aux femmes divise : des associations la réclament au nom de l'égalité entre les femmes, des professionnels sont favorables à l'ouverture aux couples de femmes mais réservés pour les femmes seules en raison de "possibles vulnérabilités".

Sur ce même sujet, les citoyens sont partagés sur le principe d'égal accès aux techniques de procréation, d'autonomie des femmes, des notions opposées notamment à la question des droits de l'enfant ou encore au rôle du père.

"UN CHEMIN RATIONNEL"

L'élargissement de la PMA, à l'heure actuelle réservée aux couples hétérosexuels infertiles, a reçu un avis favorable du CCNE en juin 2017 et Emmanuel Macron s'y est montré favorable dans le cadre d'une "concertation apaisée" après les soubresauts de la mobilisation contre "le mariage pour tous" en 2012-13.

"Un consensus sur les questions de société, ça n'existe pas", a réagi mercredi sur LCP le député La République en marche Olivier Véran, médecin de formation et rapporteur général de la commission des Affaires sociales. "Sur la PMA, il est évident qu'il n'y aurait pas de consensus : des associations militantes se sont mobilisées contre la PMA dans le cadre des débats sur la loi de la bioéthique", dit-il.

Au sein du gouvernement, une ministre assure que les Etats généraux auront permis de "faire de la pédagogie", d'"expliquer un chemin rationnel".

Pour l'association SOS Homophobie, "la consultation citoyenne et les débats en région concernant l'extension de la procréation médicalement assistée ont été monopolisés par les militant·e·s anti-PMA".

Les militants anti-avortement de l'Alliance Vita estiment pour leur part que "de nombreux citoyens ont argumenté dans le sens d'une préservation de la procréation fondée sur la parité homme-femmes dans l'engendrement ; une minorité a demandé le changement de la loi sur ce point". Ils invitent dans un communiqué le gouvernement à en tenir compte.

AUTOCONSERVATION DES OVOCYTES

Le rapport du CCNE note en outre qu'"une grande partie des contributions (citoyennes) dénoncent la procédure de gestation pour autrui (GPA), quel qu'en soit le motif".

Les associations demandent pour beaucoup "l'ouverture d'un débat serein" sur le recours à une mère porteuse tandis que certains professionnels regrettent la prohibition totale instaurée par la France.

Les sociétés savantes font le constat parallèle d'une faible information des femmes en ce qui concerne l'évolution de leur fertilité.

Les professionnels souhaitent que la pratique de l'autoconservation des ovocytes proposée aux femmes jeunes n'ayant pas eu d'enfant soit autorisée (mais non encouragée), notamment pour offrir "une réponse préventive au fait que les femmes sont pénalisées par leur horloge biologique, et éviter le recours à une PMA avec don d'ovocytes ultérieurement".

Outre les questions de procréation, l'autre sujet largement abordé au cours des Etats généraux est celui de la fin de vie.

"Il se dégage un très large consensus pour juger que l'on meurt mal en France et que de nombreux progrès devraient être réalisés rapidement", peut-on lire dans le rapport.

"Les plus jeunes, notamment les lycéens, seraient plus favorables à la légalisation d'une aide active à mourir, alors que les personnes plus âgées resteraient, quant à elles, plutôt favorables au statu quo", note le CCNE.

En février, plus de 150 députés issus en grande partie de la majorité ont demandé à légiférer cette année pour donner aux malades en fin de vie "la libre disposition de leur corps". (Avec Elizabeth Pineau, édité par Sophie Louet)