* Un projet institutionnel contesté

* Le dossier de la violence

* Soutien du monde économique

MARSEILLE, 8 septembre (Reuters) - En déplacement lundi et mardi dans la région marseillaise, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault va tenter de susciter l'adhésion sur le plan visant à éradiquer la violence, avec notamment les opposants au projet de création d'une métropole marseillaise unique.

Il va évoquer avec les acteurs locaux les décisions prises jeudi dernier lors du comité interministériel sur la situation de la cité phocéenne et rencontrer les nombreux opposants au projet d'une métropole marseillaise qui regrouperait 1,8 millions d'habitants.

Sur fond de chômage massif et de quartiers pauvres à la dérive, les récents règlements de comptes liés au trafic de drogue - 20 morts depuis le début de l'année dans le département, 14 durant l'été - ont décidé le gouvernement à accélérer le tempo. Le plan prévoit le renfort de 205 policiers et gendarmes. L'idée de la métropole est de favoriser le fonctionnement de la cité pour la relancer économiquement et socialement.

Mais outre la lutte contre la criminalité endémique à Marseille, l'une des propositions les plus sensibles est l'annonce de la création d'une métropole marseillaise, soutenue par le monde économique mais que refusent l'ensemble des présidents de communautés d'agglomérations voisines de Marseille, quelle que soit leur couleur politique.

Jean-Marc Ayrault a fait de Marseille "une question d'intérêt national" et pense que les besoins quotidiens de la population de l'agglomération ne sont pas satisfaits correctement, notamment en matière de transport et de logement.

"On a trop subi les inerties, les blocages, les intérêts particuliers", a dit vendredi le Premier ministre sur France Bleu Provence.

Ce constat est partagé par le maire UMP de Marseille Jean-Claude Gaudin, qui déplore que sa commune, pauvre, assure les charges de centralité comme les hôpitaux, le bataillon des marins-pompiers ou l'Opéra, alors que souvent les Marseillais travaillent ou font leurs courses dans les collectivités voisines, sans retombées pour la commune où ils résident.

"La mise en place d'une nouvelle agglomération va dans le sens de la transformation de Marseille Provence Métropole en Métropole, que j'avais déjà appelée de mes v÷ux", a estimé Jean-Claude Gaudin dans un communiqué.

OPPOSITIONS

La création d'une métropole contraindra les autres collectivités à partager leurs ressources fiscales avec Marseille ainsi que des compétences comme le logement ou le transport.

Le Premier ministre doit rencontrer mardi matin les six présidents de communautés d'agglomérations et de communautés urbaines concernées, la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, la communauté d'agglomération du Pays d'Aubagne et de l'Etoile, celle du Pays d'Aix, celle du Pays de Martigues, celle de Salon-Etang de Berre et enfin le Syndicat d'Agglomérations Nouvelles (SAN) Ouest-Provence-Istres.

Eugène Caselli, le président PS de Marseille-Provence-Métropole, est le seul à soutenir le projet gouvernemental.

"Avec le gouvernement avec qui j'ai été en lien, je partage les deux préalables au retour de la dynamique marseillaise : la lutte contre la délinquance et la criminalité ainsi que la nécessaire création d'une grande métropole d'1,8 million d'habitants", a-t-il dit.

"Cette métropole européenne tiendra compte de la diversité et de la complexité du territoire et préservera les liens de proximité et les identités locales", a-t-il ajouté.

A l'inverse, les cinq autres présidents sont vent debout contre cette proposition pour des raisons financières et d'autonomie de gestion.

"Nous refusons cette métropole depuis longtemps et nous continuerons à la refuser. Nous intégrer de force ne résoudra en rien les problèmes de Marseille", a déclaré samedi à Reuters Magali Giovannangeli, présidente PCF de la communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Etoile.

"On peut craindre une mise sous tutelle et un acte autoritaire mais j'espère qu'il sortira quelque chose de positif de la réunion de mardi", a-t-elle ajouté.

En juin 2010, sa communauté d'agglomération avait organisé un référendum local, sans valeur légale, sur l'intégration à la métropole marseillaise. Avec 44% de participation, les votants avaient refusé à 96%.

Le son de cloche est le même chez Maryse Joissains, présidente UMP de la Communauté d'agglomération du Pays d'Aix. "Comme je l'ai déjà dit à Sarkozy, je le dis à Hollande : la métropole, c'est non", a-t-elle déclaré au quotidien La Provence.

Réunis à Arles vendredi, les cinq présidents des collectivités concernées ont défendu au contraire la création d'un pôle métropolitain, moins contraignant. Malgré l'opposition des élus locaux, le monde économique salue la volonté du gouvernement. (Jean-François Revilla, édité par Thierry Lévêque)