par Ali Sawafta

RAMALLAH, Cisjordanie, 14 décembre (Reuters) - L'armée israélienne a tué 12 Palestiniens au cours d'opérations menées ces trois derniers jours à Jénine, en Cisjordanie occupée, dont un adolescent non armé abattu dans un hôpital, ont déclaré jeudi des responsables palestiniens et Médecins sans Frontières (MSF).

La situation est explosive en Cisjordanie depuis le début de la guerre dans la bande de Gaza, sur fond de violences des colons israéliens et de multiplication des raids de l'armée israélienne, qui dit lutter contre le terrorisme

L'opération militaire à Jénine a suscité la colère de l'Autorité palestinienne, qui l'a qualifiée d'"escalade dangereuse" et a particulièrement dénoncé la profanation d'une mosquée par des soldats israéliens, qui ont utilisé le micro servant habituellement à l'appel à la prière musulmane pour psalmodier une prière juive.

L'armée israélienne a reconnu les faits, dont une vidéo a été largement diffusée sur les réseaux sociaux, et promis des sanctions disciplinaires contre les soldats. "Le comportement des soldats dans les vidéos est grave et en totale opposition avec les valeurs de Tsahal. Les soldats seront sanctionnés en conséquence", a-t-elle assuré.

D'autres soldats israéliens ont abattu un adolescent non armé alors qu'ils menaient une opération dans l'hôpital Khalil Souleimane, à l'entrée du camp de réfugiés de Jénine, a dénoncé MSF. Le jeune Palestinien, âgé de 17 ans, a reçu une balle dans la poitrine, a précisé le ministère palestinien de la Santé.

L'armée israélienne, qui dit intensifier ses opérations contre les groupes armés palestiniens, n'a pas répondu aux sollicitations de Reuters à ce sujet.

Au moins 275 Palestiniens ont été tués en Cisjordanie occupée depuis le massacre perpétré par le Hamas le 7 octobre aux abords de la bande de Gaza, qui a fait 1.200 morts selon les autorités israéliennes.

AMBULANCES BLOQUÉES

Le directeur du Croissant-Rouge palestinien à Jénine, Mahmoud Al-Saadi, a déclaré à Reuters que l'armée israélienne de laissait pas les ambulances entrer dans le camp de réfugiés de la ville pour transporter des blessés ou des personnes gravement malades.

"L'armée ne nous a pas permis d'entrer", malgré les tentatives de coordination avec la Croix-Rouge internationale et l'agence de l'Onu chargée des réfugiés palestiniens (UNRWA), a-t-il dit, précisant que des soldats israéliens bloquent aussi l'accès à l'hôpital Khalil Souleimane.

Dans un communiqué diffusé sur la plateforme X, MSF a accusé les soldats israéliens d'avoir ordonné à des ambulanciers qui quittaient l'hôpital de sortir de leurs ambulances et les ont "forcés à se déshabiller et à s'agenouiller dans la rue".

L'armée israélienne n'a pas souhaité faire de commentaire tant que "l'opération antiterroriste" est en cours.

Dans un communiqué, elle a dit avoir démantelé des ateliers de fabrication d'engins explosifs et des puits de tunnels au cours de l'opération qu'elle mène depuis trois jours à Jénine.

Quatre soldats ont été légèrement blessés par des engins explosifs ou des tirs d'autres soldats israéliens, a-t-elle précisé dans un communiqué.

Selon des habitants, les bulldozers israéliens ont aussi endommagé des routes et des canalisations d'eau.

L'un d'eux, Alaa al Sadi, 44 ans, a dit avoir passé 14 heures dans un camp de rétention avec des centaines d'autres Palestiniens. Selon lui, les soldats israéliens l'accusaient d'être membre du Hamas - ce qu'il nie - et lui ont dit d'aller s'installer au Liban ou en Syrie. Bien qu'aucune arme n'ait été trouvée chez lui, l'armée israélienne a rasé sa maison familiale avant de le relâcher, a-t-il témoigné.

Selon une ONG de défense des droits des prisonniers palestiniens, la plupart des personnes arrêtées au début de l'opération israélienne ont depuis été libérées.

L'armée israélienne n'a pas répondu aux sollicitations de Reuters. (Reportage d'Ali Sawafta, rédigé par Frank Jack Daniel ; version française par Zhifan Liu et Tangi Salaün, édité par Nicolas Delame)