"De quelle manière appréhendez-vous la volonté affichée par le gouvernement de puiser dans l'assurance vie pour rembourser la dette de la sécurité sociale ? A-t-on raison d'assimiler l'assurance vie à une niche parmi d'autres ?
La décision de raboter les niches fiscales s'explique par la nécessité pour le gouvernement de maitriser les déficits publics. L'assurance vie n'est pas à proprement parler une niche fiscale, mais le gouvernement a voulu revenir sur certains avantages. Cette démarche est compréhensible dans le contexte de nos financements publics.

Parmi les mesures envisagées, celle qui touchera le plus grand nombre de Français concerne les contrats d'assurance-vie multisupport. A partir de 2011, les intérêts générés par la partie en euros seront taxés "au fil de l'eau", chaque année à hauteur de 12,1 %. Une autre mesure qui risque d'impacter indirectement sur le rendement de leurs contrats concerne une taxe exceptionnelle de 10 % que les assureurs devront payer sur les plus-values qu'ils mettent en réserve afin d'amortir les fluctuations des taux d'intérêt. Quel regard portez-vous sur ces mesures ?

Le versement annuel des prélèvements obligatoires sur les intérêts, garantis et fixes, relève du droit commun. Cela n'est pas forcément agréable pour le titulaire du contrat mais cela n'est pas choquant en soi.

Par ailleurs, la taxation ne plait pas aux assureurs, mais je crois qu'il faut que tout le monde participe à l'effort de la remise en ordre des finances publiques, y compris les banques et les assureurs qui ont des moyens considérables. Il n'y a pas de raison à ce que seuls les contribuables fassent des efforts.

Pensez-vous que le gouvernement s'arrêtera là ? Pout certains experts, il ne fait guère de doute que ce premier coup de canif ne restera pas isolé. Doit-on s'attendre à des coupes plus franches à l'avenir ?
Je ne lis pas dans le marc de café. Il faudra être vigilant et veiller à ce que l'assurance vie conserve une réelle attractivité pour les épargnants.

Voyez-vous d'autres mesures qui seraient nécessaires à adopter ?
Je crois que ce qui est avancé est suffisant et raisonnable, il ne me semble pas utile d'aller au-delà en la matière.

Toute modification du régime fiscal, même à la marge, peut provoquer des réajustements d'ampleur parfois surprenante. Ne peut-on pas craindre des transferts massifs à l'instar de ceux provoqués en 2006 par la fiscalisation
soudaine des intérêts des vieux PEL ?

Je ne pense pas que nous connaitrons le même phénomène de transfert que sur les PEL. L'assurance vie restera un produit plus attractif que les autres produits existants. L'absence d'alternative réelle fera qu'il n'y aura pas de « désamour » des français pour ce produit.

En l'état actuel des informations dont on dispose, ce que propose le gouvernement n'est pas de nature à remettre en cause l'engouement des français pour l'assurance-vie. En revanche, il est primordial de s'assurer que ceux qui détiennent un contrat d'assurance vie soient certains que les sommes aillent bien à leurs destinataires le jour où ils disparaitront. C'est le sens du combat que je mène et de la proposition de loi que j'ai fait adopter par le Sénat.

Si vous ne voyez rien à redire à la réforme envisagée sur l'assurance vie, avez-vous pour autant des critiques à formuler sur la politique actuellement menée par le gouvernement sur le plan de la fiscalité ?
Nous serions mal inspirés de critiquer ce que nous avons réclamé. J'appartiens à une formation politique qui se bat pour la maîtrise des déficits publics et qui demande à ce que l'on réduise les niches fiscales depuis plusieurs années. Cela fait longtemps que l'on constate que l'ampleur du déficit du pays est abyssale (1500 milliards d'euros) et non tenable. Enfin le gouvernement actuel a décidé d'agir. Nous ne pouvons que nous en satisfaire.

Les français sont en général d'accord avec cette nécessité tant qu'ils ne sont pas directement affectés. Mais cela n'est pas possible.

Vous êtes d'accord avec la démarche que suit le gouvernement ?
Lorsque l'on veut s'attaquer aux niches fiscales il y a deux approches possibles. Soit on fait les choses de manière automatique et systématique : -10% sur toutes les niches fiscales, remplacement d'un fonctionnaire sur deux qui part à la retraite quelque soit le secteur d'activité, la performance de la mission. Cela est un peu «bête et méchant» mais fonctionne.

Il est également possible de procéder plus finement. Mais le danger réside alors dans la difficulté de choisir et d'arbitrer parmi les actions et les priorités.

Il y a des points sur lesquels vous avez des propositions différentes…
Nous sommes attachés à la suppression du bouclier fiscal qui est une mauvaise réponse à l'ISF qu'il faut également abroger à l'instar de la plupart des autres pays d'Europe. Parallèlement, il faut augmenter la tranche la plus élevée du barème d'impôt sur le revenu.

Propos recueillis par Imen Hazgui"