* Réunion extraordinaire dans la soirée, décision à 22h00 GMT

* La banque centrale affiche sa détermination

* Erdogan dit son opposition à un relèvement des taux

* Les marchés s'attendent à un net relèvement des taux à 10%

* La livre se stabilise après un plus bas historique lundi (Actualisé avec Erdogan, commentaire d'analyste, cours)

par Nevzat Devranoglu

ANKARA, 28 janvier (Reuters) - Le gouverneur de la banque centrale turque a conforté mardi le scénario d'un relèvement en urgence des taux d'intérêt, assurant qu'il ne céderait pas aux pressions politiques et promettant de prendre des mesures fermes pour endiguer l'inflation et la chute de la livre.

La banque centrale a revu en forte hausse sa prévision de hausse des prix pour la fin de l'année, la portant de 5,3% à 6,6%, une perspective qui renforce aux yeux des investisseurs la probabilité d'une hausse des taux d'intérêt lors de la réunion extraordinaire de politique monétaire prévue dans la soirée.

Cette réunion sera la première de ce type depuis août 2011, lorsque la crise de la zone euro se faisait ressentir jusqu'en Turquie.

Les économistes et analystes interrogés lundi par Reuters s'attendent en moyenne à un relèvement de 225 points de base, à 10%, du taux directeur turc. La banque centrale doit annoncer sa décision à minuit (22h00 GMT).

Certains observateurs craignent toutefois que les pressions politiques ne dissuadent la banque centrale de recourir à une hausse de taux, qui risque de pénaliser la croissance. Un scénario que le gouverneur Erdem Basci a écarté dès mardi matin.

"En Turquie, les hommes politiques critiquent ou applaudissent publiquement les décisions de la banque centrale (...) Je ne crois pas que cela menace l'indépendance de la banque", a-t-il dit, lors de la conférence de presse de présentation du rapport trimestriel sur l'inflation.

"Personne ne doit avoir le moindre doute sur le fait que la banque centrale utilisera tous les outils à sa disposition. La banque n'hésitera pas à prendre des mesures conduisant à un resserrement durable de la politique monétaire si cela se révèle nécessaire."

LE SPECTRE DU "LOBBY DES TAUX"

Le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, attaché à préserver la croissance à deux mois des élections municipales et à sept mois du scrutin présidentiel, a de nouveau exprimé son opposition à une hausse des taux mardi.

"Si je fais un communiqué, ils vont dire que j'interfère avec la banque centrale", a-t-il dit lors d'une conférence de presse avant de partir en voyage officiel en Iran.

"Mais je veux que vous sachiez que, comme je l'ai toujours été, je suis contre une hausse des taux d'intérêt. Mais bien sûr, je n'ai pas l'autorité me permettant d'interférer avec la banque centrale."

Le chef du gouvernement a régulièrement évoqué ces derniers mois l'existence d'un supposé "lobby des taux d'intérêt" composé selon lui de spéculateurs.

Lors de sa réunion ordinaire de politique monétaire, mardi dernier, la banque centrale avait laissé ses principaux taux d'intérêt inchangés. Mais la chute de la livre depuis lors l'a contrainte à convoquer une réunion extraordinaire.

Si un relèvement des taux mardi ne fait guère de doutes aux yeux des observateurs, son efficacité à long terme est plus discutable.

"Une hausse de taux ponctuelle, même agressive, est une chose; un changement radical et irrévocable de la conduite de la politique monétaire en année électorale et au moment où la croissance ralentit en est une autre", résume Nicholas Spiro, directeur du cabinet Spiro Sovereign Strategy à Londres.

La devise turque a regagné un peu de terrain mardi et s'échangeait en fin de journée à 2,2565 pour un dollar , donc au-dessus plus bas historique inscrit lundi à 2,3900. Elle a perdu plus de 10% de sa valeur depuis la mi-décembre.

La Bourse d'Istanbul, qui a baissé de près de 20% ces quatre derniers mois, a quant à elle fini en repli de 1,59%. (avec Seda Sezer, Daren Butler et Alexandra Hudson, Marc Angrand pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat)