Hong Kong (awp/afp) - L'action Evergrande a terminé mardi en forte hausse à la Bourse de Hong Kong, où le titre du promoteur chinois à l'endettement astronomique a fait son retour après plusieurs jours de suspension malgré les déboires de son fondateur.

L'action du groupe avait dévissé mercredi dernier après la publication d'une information de presse selon laquelle le dirigeant de l'entreprise, Xu Jiayin, se trouverait en résidence surveillée.

Le lendemain, Evergrande suspendait sa cotation à la Bourse de Hong Kong, mais restait muet sur la situation de son fondateur devenu milliardaire.

Le groupe a depuis concédé que Xu Jiayin (aussi connu sous son nom cantonais Hui Ka Yan) faisait "l'objet de mesures coercitives en raison de soupçons de crime ou délit en infraction à la loi", sans donner davantage de détails sur la nature des faits reprochés.

La formule "mesures coercitives" désigne généralement en Chine une forme de privation de liberté afin de garantir le bon déroulement d'une procédure pénale.

Lundi de manière inattendue, le groupe a sollicité une reprise de cotation en Bourse.

"Le conseil d'administration estime que les activités de l'entreprise sont normales et qu'il n'y a pas d'autres informations concernant l'entreprise qui doivent être rendues publiques", a indiqué lundi soir Evergrande afin de, semble-t-il, justifier la reprise des échanges.

Le titre a clôturé en hausse de 28% au terme d'échanges très volatils durant son premier jour de reprise de cotation.

Le groupe avait gagné près de 10% dans les premières minutes de son retour à la Bourse de Hong Kong, avant de bondir de près de 35% en matinée.

Cette reprise de la cotation intervient en pleine semaine fériée en Chine pour la fête nationale (1er octobre), une période généralement propice aux achats dans l'immobilier.

En dépit d'une série de mesures de soutien au secteur ces dernières semaines, les acheteurs semblent toutefois réticents à investir dans la pierre.

Evergrande avait annoncé à la mi-septembre l'arrestation d'employés dans l'une de ses filiales. Le communiqué ne précisait alors ni leur nombre ni ce qui leur est reproché.

Selon Caixin, un média économique réputé, deux anciens cadres d'Evergrande ont également été placés en détention.

Le placement présumé en résidence surveillée du patron d'Evergrande vient un peu plus obscurcir l'horizon du groupe, après déjà plusieurs déconvenues ces derniers jours.

Une filiale d'Evergrande a ainsi annoncé lundi dernier être incapable de rembourser des intérêts sur un emprunt, accentuant la pression sur le groupe avant un rendez-vous devant la justice de ses créanciers prévue fin octobre à Hong Kong.

Le jour même, Evergrande annulait sans préavis une réunion sur la restructuration de sa dette, au grand dam de ses bailleurs et accentuant le flou autour de son avenir.

Crise de confiance

Si cette restructuration échoue, l'effondrement d'Evergrande pourrait avoir de lourdes conséquences, car le groupe compte des dizaines de milliers d'employés et des centaines de projets immobiliers inachevés.

Le secteur immobilier en Chine a connu une croissance fulgurante ces dernières décennies, dans un pays où l'achat d'un bien avant même sa construction permettait de financer d'autres projets.

Mais l'endettement des groupes a atteint des niveaux tels que les autorités ont décidé d'y mettre le holà à partir de 2020.

Depuis, l'accès au crédit s'est considérablement réduit pour ces groupes, dont une partie peine désormais à terminer les chantiers, alimentant une crise de confiance avec des acheteurs potentiels qui plombe les prix.

Evergrande, dont la descente aux enfers fait régulièrement les gros titres, avait à la fin juin une ardoise colossale estimée à 328 milliards de dollars (307 milliards d'euros).

Les déboires du groupe, ex-numéro un de l'immobilier en Chine, alimentent depuis deux ans la défiance dans un secteur longtemps très lucratif mais désormais boudé, sur fond de ralentissement économique et de logements inachevés.

Cette crise de confiance a rattrapé ces derniers mois des groupes jusque-là réputés solides financièrement à l'image de Country Garden, un des concurrents d'Evergrande.

L'immobilier est en Chine un secteur-clé de l'économie, qui a longtemps représenté au sens large un quart de son produit intérieur brut.

Sa fragilité menace désormais "pour des années" la croissance en Chine, estime l'analyste Victor Shih de l'Université de Californie.

afp/ol