(actualisé avec réactions)

par Michelle Nichols

NATIONS UNIES, 21 mars (Reuters) - Les Nations unies vont enquêter à la demande des autorités syriennes sur des soupçons d'utilisation d'armes chimiques dans la ville de Khan al Assal, près d'Alep, a annoncé jeudi Ban Ki-moon.

"J'ai décidé d'ouvrir une enquête des Nations unies sur la possible utilisation d'armes chimiques en Syrie", a déclaré le secrétaire général de l'Onu devant la presse.

Cette enquête portera sur "un incident précis porté à mon attention par le gouvernement syrien", a-t-il ajouté.

Le régime de Bachar al Assad et les insurgés qui tentent de le renverser se sont mutuellement accusés d'un bombardement à l'arme chimique mardi à Khan al Assal, au sud-ouest d'Alep.

Vingt-six personnes sont mortes dans l'incident et des rescapés ont dit souffrir de problèmes respiratoires et sentir une forte odeur de chlore après le tir.

Après avoir accusé mardi des "groupes terroristes" d'avoir utilisé des armes chimiques dans cette attaque, la Syrie a demandé mercredi à Ban Ki-moon d'enquêter, a déclaré le représentant permanent de la Syrie à l'Onu, Bachar Djafari.

L'opposition syrienne a affirmé mercredi qu'une seconde attaque à l'arme chimique avait été commise la veille à l'est de Damas, en plus de celle près d'Alep.

Ban Ki-moon a indiqué que l'enquête onusienne porterait uniquement sur l'attaque de Khan al Assal.

"Je suis bien sûr au courant des autres allégations concernant des attaques similaires impliquant l'usage d'armes chimiques", a-t-il déclaré jeudi, ajoutant que les Nations unies coopéreraient avec l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) et l'Organisation mondiale de la Santé (OMS).

CRIME CONTRE L'HUMANITE

"L'entière coopération de toutes les parties sera essentielle. J'insiste sur le fait que cela inclut un accès sans entraves. Je réitère ce point dans mes communications avec les autorités syriennes", a-t-il ajouté, précisant qu'il s'attendait à ce que l'enquête démarre aussi vite que possible.

Le diplomate sud-coréen a estimé en outre que son annonce "devrait rappeler sans équivoque que l'utilisation d'armes chimiques est un crime contre l'humanité".

La représentante permanente des Etats-Unis à l'Onu, Susan Rice, a déclaré que Washington souhaitait que toute accusation grave relevant de l'usage d'armes chimiques en Syrie fasse l'objet d'une enquête.

"Les Etats-Unis soutiennent une enquête qui se penche sur toutes les accusations crédibles de recours éventuel à des armes chimiques en Syrie, et soulignent l'importance d'ouvrir une enquête le plus vite possible", a dit Susan Rice.

La France et la Grande-Bretagne ont écrit jeudi à Ban Ki-moon pour attirer son attention sur la seconde attaque chimique qui aurait été lancée près de Damas, ainsi que sur une autre qui aurait eu lieu à Homs fin décembre. Les insurgés tiennent le régime responsable de ces trois attaques présumées.

"Etant donné la gravité de ces accusations, nous jugeons essentiel que tous les faits pertinents concernant ces accusations fassent rapidement l'objet d'une enquête", écrivent la France et la Grande-Bretagne. "Nous vous demandons par conséquent de diligenter une enquête sur l'ensemble des accusations, le plus vite possible".

La Russie, d'un côté, la France et le Royaume-Uni, de l'autre, se sont opposés mercredi au sein du Conseil de sécurité de l'Onu quant à la nature des enquêtes à mener sur les soupçons d'emploi d'armes chimiques en Syrie.

Moscou soutient la demande du régime de Damas d'une enquête sur la seule attaque de Khan al Assal.

Paris et Londres souhaitent de leur côté que les Nations unies enquêtent sur les accusations formulées par les insurgés.

L'OMS a annoncé l'envoi d'équipes médicales à Alep. Les experts affiliés à l'OMS se rendront dans les centres de santé de la grande métropole du nord de la Syrie pour identifier les besoins immédiats et fournir une aide pour le traitement contre les produits toxiques.

Plusieurs experts en armement estiment cependant que peu d'éléments viennent appuyer la thèse de l'utilisation d'agents chimiques dans l'incident de Khan al Assal. (Avec Louis Charbonneau, Julien Dury, Jean-Stéphane Brosse, Bertrand Boucey, Hélène Duvigneau et Eric Faye pour le service français)