CAMP DE REFUGIES DE KUTUPALONG, Bangladesh, 25 août (Reuters) - R achida Begum a trouvé au refuge au Bangladesh il y a un an pour échapper à la répression de l'armée birmane, que les Nations Unies ont qualifiée de "cas d'école du nettoyage ethnique".

Elle vit maintenant avec sa famille à Kutupalong, le plus grand camp de réfugiés au monde, où s'entassent 700.000 Rohingyas.

L'exode de cette minorité musulmane du nord-ouest de la Birmanie a débuté après l'attaque, le 25 août, d'une trentaine de commissariats. L'opération revendiquée par les séparatistes de l'Armée du salut des Rohingyas de l'Arakan (ASRA) a donné lieu à des vastes représailles militaires et a une crise humanitaire sans précédent dans la région.

"Je suis maintenant inquiète pour l'avenir de mon fils", poursuit Rachida, dont le dernier né âgé de huit mois est venu au monde dans le camp. "Nous avons peur. Il n'y a pas d'éducation ici et pas d'espoir d'en avoir là-bas non plus (...) Je ne vois pas d'avenir ici et il n'y en a pas là-bas non plus", poursuit-elle, évoquant son pays d'origine, où les Rohingyas ne sont pas reconnus comme citoyens birmans.

La Birmanie a conclu en novembre 2017 un arrangement avec le Bangladesh censé ouvrir la voie au retour des réfugiés et a signé en juin dernier un accord avec le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) afin garantir leur sécurité, mais la poursuite de l'exode montre que ses causes sont toujours d'actualité, un an après le début de la crise.

"BENGALI"

De nombreux Birmans, très majoritairement bouddhistes, considèrent les Rohingya comme des "Bengali", terme suggérant qu'ils sont des intrus originaires Bangladesh. Leur exode a menacé la délicate transition démocratique entamée en 2011 et a considérablement terni l'image de la dirigeante Aung San Suu Kyi, lauréate du prix Nobel de la paix 1991, dont le silence sur le sort des Rohingyas a été très critiqué.

"Le risque d'activités terroristes, qui est la cause initiale des événements qui ont conduit à la crise de Rakhine (ou Arakan, NDLR), demeure réel et présent aujourd'hui", a-t-elle jugé récemment lors d'une allocution à Singapour, évoquant les violences commises par les séparatistes.

Son gouvernement a nié la plupart des exactions imputées à l'armée et l'état-major assure que les opérations militaires étaient légitimes.

"J'ai peur qu'ils nous tuent si nous sommes renvoyés en Birmanie", reprend Rachida Begum. "Nous y retournerons si le gouvernement nous accepte en tant que citoyens rohingya, sans quoi nous n'irons pas." (Neil Fullick, Jean-Philippe Lefief pour le service français)