(Actualisé après entrevue avec Bolsonaro, retrait d'or)

par Anthony Boadle et Lisandra Paraguassu

BRASILIA, 28 février (Reuters) - Le chef de file de l'opposition vénézuélienne, Juan Guaido, a été reçu jeudi par le président brésilien Jair Bolsonaro et s'est dit déterminé à rentrer à Caracas au terme de sa tournée régionale, destinée à accentuer la pression sur le président vénézuélien en exercice, Nicolas Maduro.

Juan Guaido, qui s'est proclamé président par intérim du Venezuela le mois dernier, et qui a été reconnu comme tel par de nombreux pays latino-américains et occidentaux, s'est dit prêt à assumer le risque d'un retour au Venezuela, dont celui d'aller en prison.

S'exprimant au côté de Jair Bolsonaro, il a exclu d'entamer un dialogue avec Nicolas Maduro, à la tête d'un "régime faible, privé de soutien au Venezuela et à l'étranger", tant que celui-ci refuse de remettre son mandat en jeu lors d'élections libres.

"Nous voulons restaurer un Venezuela libre, démocratique et prospère", a-t-il répété.

Bien que le Brésil ait été l'un des premiers pays à le reconnaître comme président, les honneurs militaires ne lui ont pas été rendus comme cela est d'usage lors de visites de dirigeants étrangers et comme cela a été le cas lors de son déplacement en Colombie la semaine dernière.

Le cabinet de Guaido avait précisé avant l'entrevue avec Bolsonaro que celle-ci aurait lieu "à titre privé".

Guaido a aussi rencontré le ministre brésilien des Affaires étrangères, Ernesto Araujo, qui a supervisé la contribution brésilienne au plan d'aide humanitaire coordonné par les Etats-Unis qui n'est pas parvenu à faire acheminer l'aide alimentaire et médicale au Venezuela.

Il s'était entretenu plus tôt dans la journée avec les ambassadeurs de l'Union européenne au Brésil.

Le Brésil est l'un des pays où est entreposée l'aide humanitaire destinée au Venezuela, avec lequel il partage sa frontière nord.

DE L'OR RETIRÉ DE LA BANQUE CENTRALE

Nicolas Maduro nie l'existence d'une crise humanitaire et refuse de laisser entrer de l'aide, disant redouter que les convois facilitent l'incursion d'éléments armés étrangers.

L'armée brésilienne, dont d'anciens haut gradés occupent un tiers des postes au sein du gouvernement Bolsonaro, a évité de couper les ponts avec Maduro, notamment en raison de la dépendance de l'Etat du Roraima, limitrophe du Venezuela, à l'électricité produite en provenance du barrage vénézuélien de Guri.

Le secrétaire d'Etat américain a dit jeudi que Washington continuerait à travailler à un plan permettant l'acheminement de l'aide au Venezuela.

"Nous espérons qu'au cours des prochaines semaines, nous allons vraiment commencer à régler ce problème. C'est un gros problème", a déclaré Mike Pompeo à des journalistes dans l'avion le conduisant du Vietnam aux Philippines.

Alors qu'il est la cible d'un durcissement des sanctions américaines et que ses exportations de pétrole sont en chute libre faute d'investissements, le gouvernement de Nicolas Maduro cherche désespérément à se procurer des devises.

D'après un parlementaire de l'opposition vénézuélienne et trois sources gouvernementales à Caracas, huit tonnes d'or ont ainsi été retirées la semaine dernière des coffres de la banque centrale du Venezuela.

"Ils prévoient de les vendre illégalement à l'étranger", a affirmé l'élu, Angel Alvadaro, dans une interview.

A Brasilia, Guaido a appelé la communauté internationale à appliquer des sanctions économiques contre le gouvernement de Maduro pour empêcher que "tout soit volé au Venezuela".

Selon les sources gouvernementales, l'or a été prélevé en l'absence du président de la banque centrale, Calixto Ortega, qui était en voyage à l'étranger.

En 2018, le Venezuela a expédié 23 tonnes d'or en Turquie, selon les données du gouvernement turc.

Des données publiées par ailleurs jeudi montrent que les exportations de pétrole vénézuélien ont chuté de 40% depuis l'instauration de sanctions américaines le 28 janvier. (Marc Joanny et Tangi Salaün pour le service français, édité par Véronique Tison)