Représentants du patronat et d'une partie des syndicats sont parvenus vendredi à un accord alliant une plus grande sécurisation de l'emploi pour les salariés en contrepartie d'une souplesse accrue du marché du travail.

"C'est une négociation historique. Certainement par son impact immédiat mais aussi par l'écho qu'elle aura sur le plan international", a estimé Louis Gallois lors d'une rencontre avec la rédaction de Reuters avant la phase finale des négociations.

L'ex-dirigeant d'EADS et de la SNCF avait plaidé dans son rapport sur la compétitivité de l'économie française pour l'introduction de souplesses dans le CDI en contrepartie d'une limitation du recours aux contrats précaires (CDD, intérim...).

Si près de 85% des 17,7 millions de salariés du secteur privé sont en CDI et environ 14% sous contrat précaire (3,6% en mission d'intérim et 10,1% en CDD), les proportions sont très différentes sur les flux d'embauche, selon les données de l'Urssaf.

Sur 20,7 millions d'embauches hors intérim enregistrées en 2011, à peine 16% se sont faites en CDI, la proportion étant encore plus faible si les 18,6 millions d'embauches en mission d'intérim sont prises en compte.

"L'idée que ça bouge en France par le dialogue social est un signal extrêmement fort sur le plan international", a insisté Louis Gallois qui n'a pas hésité, comme d'autres, à intervenir en pleine phase finale des négociations pour presser les partenaires sociaux de conclure.

MARGES DE MANOEUVRE

Ces derniers ont pu sembler assez insensibles à cette dimension de la négociation campant jusqu'au dernier moment sur des positions très traditionnelles.

Le chef de l'Etat les avait exhortés à plusieurs reprises à parvenir un accord dont il avait lui même souligné d'emblée la portée historique, prévenant qu'à défaut le gouvernement serait amené à légiférer.

Le succès de la négociation redonne des marges de manoeuvres à un exécutif dont la popularité ne cesse de chuter et qui doit conduire deux autres grandes réformes sociales dans les mois à venir : celle du financement de la sécurité sociale et celle des retraites.

Il est aussi susceptible de corriger auprès des investisseurs internationaux l'image d'une France paralysée par une opposition stérile entre partenaires sociaux prisonniers de postures convenues voire ouvertement hostile aux capitaux étrangers.

Les grandes agences de notation, qui ont toutes une perspective négative sur la note qu'elles accordent à la France, justifient quant à elles leurs doutes persistants sur la France notamment par la rigidité du marché du travail et la nécessité d'une accentuation des réformes structurelles.

Sans aller jusqu'à évoquer un relèvement de leur note, Standard & Poor's comme Moody's n'ont pas exclu que des réformes structurelles d'envergure permettent de ramener la perspective à stable, ce qui reviendrait à interrompre le processus de dégradation.

"A court terme, la réforme prévue du marché du travail sera un indicateur décisif de l'engagement politique et public en faveur des mesures importantes qui permettront de renforcer la compétitivité et le potentiel de croissance de l'économie française", a prévenu quant à elle Fitch, dernière agence à accorder un triple A à la dette française, lors de la confirmation de sa note à la mi-décembre.

Les mises en garde des agences de notation n'ont pas empêché les coûts de financement de la France de baisser significativement, passant de 3,70% fin décembre 2011 à moins de 2% un an plus tard sur les échéances à dix ans.

L'abondance des liquidités disponibles liée aux politiques monétaires très accommodantes des banques centrales a en effet entraîné une course au rendement dont la dette de la France a largement bénéficié, au moins jusqu'à présent.

Edité par Yves Clarisse

par Marc Joanny