(Répétition avec orthographe Iatseniouk corrigée §2)

* L'opposition ukrainienne refuse tout dialogue

* UE et USA critiquent les actions policières de la nuit

* Plus de compromis possible, estime l'opposant Klitschko

par Alissa de Carbonnel et Pavel Polityuk

KIEV, 11 décembre (Reuters) - Les chefs de l'opposition ont rejeté mercredi tout dialogue avec le président ukrainien Viktor Ianoukovitch tant que leurs revendications n'auraient pas été acceptées, y compris la démission du chef de l'Etat.

Pour l'opposant Oleh Tianibok, l'offre de dialogue faite dans la journée par le président est "une farce grotesque". Il a fait savoir que lui et son camarade Arseni Iatseniouk ne parleraient avec lui qu'une fois leurs revendications acceptées.

L'opposition réclame la démission de Viktor Ianoukovitch et de son gouvernement, la libération des prisonniers politiques et la sanction des policiers coupables de violences contre les manifestants.

Auparavant, le président avait invité l'opposition à dialoguer pour sortir l'Ukraine de la crise politique, à l'issue d'une journée mouvementée qui a vu la police intervenir contre les manifestants antigouvernementaux à Kiev avant de se retirer des rues d'une capitale sous tension.

Le chef de l'Etat, confronté au plus vaste mouvement de contestation dans le pays depuis la "révolution orange" de décembre 2004, estime que l'opposition ne doit pas refuser son offre ni "prendre la voie de la confrontation et des ultimatums".

En visite à Kiev, la porte-parole de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, et la secrétaire d'Etat américaine adjointe Victoria Nuland ont pressé le président ukrainien d'ouvrir un dialogue national après plus de deux semaines de manifestations contre le gouvernement.

Elles ont également déploré l'intervention de la police anti-émeute contre les principaux lieux de rassemblement des opposants dans la capitale.

Les policiers ont pénétré dans la nuit sur "Maïdan", la place de l'Indépendance, où étaient réunis des vedettes de la chanson, des personnalités politiques et des prêtres et où des heurts les ont opposés aux manifestants.

Ils ont aussi encerclé l'Hôtel de ville où les opposants, qui y ont installé un hôpital de fortune, les ont arrosés d'eau, par des températures largement négatives, pour les repousser.

En fin de matinée, la police a dégagé les lieux sous les acclamations des manifestants, qui pouvaient à nouveau se déplacer librement dans le centre de la capitale enneigée.

"IL N'Y AURA PAS D'ASSAUT"

Les opposants, parmi lesquels des pro-occidentaux et des ultranationalistes, reprochent à Viktor Ianoukovitch d'avoir renoncé fin novembre à un accord d'association économique avec l'Union européenne (UE) et l'accusent de vouloir s'arrimer au grand voisin russe.

Le ministre de l'Intérieur, Vitali Zakhartchenko, a déclaré que la police ne mènerait pas d'assaut général contre les manifestants. "Je veux que tout le monde se calme", a-t-il dit. "Il n'y aura pas d'assaut contre la place."

L'opposant Vitali Klitschko, l'un des chefs de file de la contestation, a cependant estimé que cette intervention nocturne avait "fermé la voie à tout compromis".

"Nous avions prévu des discussions avec Ianoukovitch. Nous en déduisons que Ianoukovitch ne souhaite pas discuter avec le peuple et ne comprend que la force physique, qu'il utilise contre les manifestants", a-t-il dit devant la presse avant l'offre de dialogue du chef de l'Etat.

Vitali Klitschko a jugé que Viktor Ianoukovitch s'était discrédité. "Après cette nuit, je suis sûr que nous ne devrons plus seulement demander la démission du gouvernement, mais aussi celle du président", a-t-il déclaré.

Le Premier ministre, Mikola Azarov, a assuré que Kiev ne comptait pas évoquer prochainement sa participation à une union douanière élaborée par la Russie au sein de l'ancien bloc soviétique, hypothèse qui nourrit la colère des contestataires. (voir ) L'Ukraine et la Russie doivent entamer le 17 décembre des discussions à Moscou.

20 MILLIARDS D'EUROS

Selon l'agence de presse russe Interfax, le Premier ministre a demandé une aide de 20 milliards d'euros à l'UE et a dit à son gouvernement que l'Ukraine aurait besoin d'une telle somme si elle signait finalement un accord commercial avec Bruxelles.

Le commissaire européen à l'Elargissement, Stefan Füle, doit rencontrer le vice-Premier ministre Sergueï Arbouzov jeudi à Bruxelles pour discuter "des questions relatives à la signature et à la mise en oeuvre de l'accord d'association UE-Ukraine".

Victoria Nuland s'est rendue place de l'Indépendance avant de rencontrer pendant deux heures le président Ianoukovitch. Elle a dit s'être plainte auprès de lui de méthodes "totalement inadmissibles" dans une société démocratique.

"Mais nous lui avons aussi clairement signifié qu'il y avait une issue pour l'Ukraine, qu'il était toujours possible de sauver l'avenir européen de l'Ukraine", a-t-elle déclaré.

Catherine Ashton a également déploré l'intervention des forces de l'ordre. Elle s'est entretenue mardi avec le chef de l'Etat et devait le voir à nouveau mercredi. "J'observe avec tristesse l'usage de la force par la police pour disperser des manifestants pacifiques du centre de Kiev", a-t-elle dit.

Viktor Ianoukovitch, qui a rencontré trois de ses prédécesseurs mardi, n'a guère proposé d'ouverture. Lors d'une intervention télévisée, entouré des trois anciens présidents de l'Ukraine indépendante, il a assuré que l'avenir de Kiev passait par l'intégration européenne, mais que son pays n'avait d'autre choix que de rétablir ses relations commerciales avec Moscou,

"Il crache à la face des Etats-Unis, des 28 Etats-membres de l'Union européenne et de 46 millions d'Ukrainiens", a répondu l'ex-ministre de l'Economie Arseni Iatseniouk, autre dirigeant de l'opposition. "Nous ne lui pardonnerons pas ! Demain, il y aura un million de personnes ici et son régime tombera." (Danielle Rouquié, Jean-Stéphane Brosse et Jean-Loup Fiévet pour le service français)