Alphavalue - La particularité de Michelin vient de sa division « Specialty » (15% du chiffre d’affaires et 30% de l’EBIT lors d’une année normale). Le nombre de concurrents sur les segments des pneus pour voitures et camions est déjà faible, mais il est encore moins important sur le segment des pneus « Specialty » (pneus pour avions, véhicules industriels et agricoles). Il en résulte des marges supérieures à 20%, même lors d’une année difficile, comme ce fut le cas en 2013 en raison de la faible demande en provenance du secteur minier. Bien que l’autorité de la concurrence européenne ait déjà clairement établi que les fournisseurs automobiles s’entendent sur les prix, cette activité ne semble pas être à risque pour le moment. Jusqu'à maintenant les fabricants de pneus ne semblent pas être inquiétés par l’enquête, mais il semblerait évident que l’entente sur les prix soit plus courante dans les segments où la consolidation est plus faible.

Michelin et Pirelli génèrent près de 40% de leur chiffre d’affaires respectif en Europe, alors que cette proportion dépasse les 50% chez Continental. Si on exclut la part du segment Specialty ce chiffre tombe à 30% de sorte que Michelin reste le groupe le moins exposé (si ce risque existe réellement) à une sanction de l’autorité de la concurrence.

Sur les 5 dernières années il est très difficile de différencier la performance entre les fabricants de pneus. Les comparaisons de performance laissent penser qu’aux yeux des investisseurs un pneu reste un pneu et qu’une meilleure diversification ne soit pas un élément différenciateur.

Pourtant au cours des 12 derniers mois, c'est-à-dire depuis que l’entreprise a commencé à communiquer sur sa performance en 2013, Michelin semble avoir rattrapé son retard par rapport à ses pairs. Les résultats du secteur publiés jusqu’à maintenant semblent révéler une sévère détérioration de l’activité en Amérique latine (une région à laquelle Pirelli est particulièrement exposé) mais indiquent que les marges des constructeurs automobiles en Asie et en Amérique du nord continuent de progresser. Il en résulte une prudence des investisseurs vis-à-vis de la performance à attendre des fournisseurs de pneus les plus exposés aux constructeurs automobiles et de camions (y compris sur le marché du remplacement). Le segment « Specialty » a semble-t-il fait la différence.

Le point auquel il faut être attentif est dans quelle mesure la stratégie, établie entre 2010 et 2011, de transfert de la production en Chine et dans les pays émergents est à risque aux vues de la croissance continuelle des coûts salariaux en Chine et du mécontentement social dans les autres régions. Michelin à la réputation d’investir pour le long terme et d’avoir une politique managériale de qualité, cependant le départ vers une politique de volume et de produit plus simple pourrait avoir un cout à court terme. Les marges de Michelin sont au plus haut de sorte que les défendre pourrait s’avérer être un exercice difficile.

D’un point de vue de la valorisation, Michelin est un des rares cas où la valeur est tirée par ses pairs plutôt que par les méthodes de valorisation intrinsèques. Cela pousse à croire que le momentum du cours devrait continuer au moins à court terme. Nous percevons sur cette période un potentiel de hausse de 14%.