Washington (awp/afp) - Malgré les critiques de Donald Trump contre les hausses des taux de la Fed, un prochain relèvement du coût de l'argent semble inscrit dans les cartes, surtout après l'augmentation des prix signalée mercredi par la banque centrale dans un rapport.

Le Livre beige de la Fed, un rapport de conjoncture publié toutes les six semaines, montre que les prix ont augmenté dans toutes les régions des Etats-Unis, en partie à cause des tarifs douaniers, et les salaires commencent à progresser en raison du manque de main d'oeuvre.

Plus d'une quarantaine de fois dans ce rapport, les tarifs douaniers sont désignés comme étant une source d'inquiétude pour les industriels ou bien comme étant la cause d'une hausse des prix.

Les prix des voitures neuves devraient ainsi "grimper considérablement pour couvrir le fardeau des tarifs douaniers", disent par exemple les industriels de Boston.

Dans la région de Philadelphie, des entreprises affirment avoir du mal à remporter des offres face à la concurrence étrangère car celle-ci "n'est pas exposée aux taxes douanières sur les matières premières", se plaignent les industriels.

L'administration Trump a engagé un bras de fer commercial avec nombre de ses partenaires commerciaux, en particulier la Chine, où elle a imposé des droits de douanes supplémentaires sur 250 milliards de dollars d'importations de marchandises chinoises. Pékin a rétorqué en imposant des taxes sur 110 milliards de dollars de biens américains importés en Chine.

L'inflation pour l'instant ne dépasse pas 2,2% sur un an, selon l'indice PCE, mais le nouveau chiffre de septembre sera annoncé lundi.

Autre facteur susceptible de pousser les prix à la hausse, les augmentations de salaires commencent à se répandre en raison du manque de main d'oeuvre.

Le très bas taux de chômage (3,7%, au plus bas depuis 1969) rend les embauches difficiles et fait enfin monter les salaires, un mécanisme que la Fed guettait depuis longtemps.

Ces hausses de rémunération demeurent "modestes à modérées" dans l'ensemble du pays - trois régions n'observant pas d'évolution - mais certains districts, comme San Francisco, observent de fortes hausses.

Trump en colère contre la Fed

Publié à deux semaines de la prochaine réunion du Comité monétaire de la Réserve fédérale les 7 et 8 novembre, le Livre Beige va assurément dans le sens d'une poursuite d'un relèvement des taux d'intérêt vu l'évolution des prix.

La Fed ne prévoit toutefois pas a priori de rehausser ses taux dès novembre, mais plutôt en décembre.

"Comparé au rapport précédent, les hausses de salaires semblent avoir accéléré, ouvrant la voie à la quatrième hausse des taux (de l'année) en décembre et trois autres l'année prochaine", assure Jake McRobie, économiste pour Oxford Economics.

Une perspective qui va encore susciter la colère du président, Donald Trump, qui ne manque pas une occasion pour tempêter contre la Banque centrale qui augmente les taux.

Mardi, il a reproché au président de la Fed d'être "content quand il fait grimper les taux d'intérêt" et laissé entendre qu'il regrettait presque de l'avoir nommé il y a moins d'un an.

Pourrait-il renvoyer Jerome Powell ? "Je ne sais pas. Je dis seulement que je ne suis pas content de la Fed parce qu'Obama a eu des taux zéro", a affirmé M. Trump au Wall Street Journal.

A la veille des élections de mi-mandat le 6 novembre, le renchérissement du coût des crédits ne lui plaît pas. La Fed représente, selon lui, "le plus gros risque" économique car "la Fed relève les taux trop vite".

Jerome Powell reste silencieux face aux critiques.

A cela s'ajoutent les turbulences à Wall Street, qui a encore lourdement chuté mercredi, alors qu'il y a encore deux semaines, les records du Dow Jones et du Nasdaq étaient vus par la Maison Blanche comme l'emblème de la réussite de la politique économique de l'administration.

Depuis fin 2015, après presque dix ans de politique monétaire à taux quasi nuls pour soutenir une reprise poussive, la Fed a progressivement remonté les taux d'intérêts au jour le jour, qui se situent actuellement entre 2% et 2,25%.

Selon la banque centrale, cela reste encore en dessous du taux "neutre", un niveau idéal - probablement proche de 3%, selon les spécialistes - qui ne restreint ni ne surchauffe l'économie.

afp/rp