* Une agence européenne en compensation pour Strasbourg

* Les locaux de Bruxelles ne sont toutefois plus aux normes

* Le sujet nécessite une réforme des traités (Actualisé avec réaction du gouvernement français)

STRASBOURG, 5 juillet (Reuters) - Les eurodéputés partisans d’un siège unique pour le Parlement européen à Bruxelles voient dans la sortie de l’UE du Royaume-Uni et l’arrivée d’Emmanuel Macron à l'Elysée une opportunité pour parvenir à leurs fins.

Le président français, qui affiche pragmatisme et volonté de relancer l’Europe, pourrait, selon eux, se montrer sensible à leurs arguments et à l’idée d’obtenir, en compensation pour Strasbourg, une des deux agences européennes basées à Londres.

"Nous voulons ouvrir un dialogue constructif avec le nouvel exécutif français que nous apprécions et que nous admirons", a déclaré mercredi, lors d’une conférence de presse à Strasbourg, Anna Maria Corazza-Bildt (Suède), au nom de "One Seat" (un siège), association transnationale et transpartisane qui milite pour un siège unique.

"Nous avons une chance fantastique et unique qui s’offre à nous avec la relocalisation de deux agences européennes, l’Agence européenne des médicaments (EMA) et l’Autorité bancaire européenne (EBA)", a ajouté cette eurodéputée du Parti populaire européen (PPE – Centre droit).

Le fait que le bâtiment Paul-Henri Spaak, construit il y a 25 ans à Bruxelles, pour abriter le Parlement européen, ne réponde plus aux normes de sécurité et doive être entièrement rénové sinon reconstruit, est "une chance plutôt qu’un obstacle", assure-t-elle. "Nous disposons de suffisamment de locaux à proximité".

Le temps presse, pour One Seat, dans la mesure où le Conseil européen doit décider en novembre du lieu où s’installeront les deux agences.

Un débat sur le siège du Parlement devait se tenir pour la première fois mercredi soir en séance plénière.

One Seat souligne que les bâtiments strasbourgeois ne sont occupés que 48 jours par an alors que l’Agence européenne du médicament – option privilégiée – emploie 900 agents permanents et reçoit 35.000 experts chaque année.

REFORME DES TRAITÉS

L’association souhaite que la présidence estonienne, qui débute son mandat, mettre à l’ordre du jour du Conseil européen une réforme des traités qui donnerait au Parlement européen le droit de fixer son siège. Une telle révision exigerait toutefois l’unanimité des Etats.

Près des trois quarts des eurodéputés se montrent favorables au regroupement de leurs activités sur un seul site qui, sans que cela soit toujours dit, ne pourrait être que Bruxelles.

Les parlementaires y travaillent actuellement deux à trois semaines par mois contre une semaine de quatre jours à Strasbourg douze fois par an.

Les détracteurs de ce système le jugent ubuesque, coûteux et polluant. La dispersion sur trois sites (le secrétariat étant à Luxembourg) crée un surcoût annuel de 114 millions d’euros selon la Cour des comptes tandis que les déplacements occasionnés libéreraient 19.000 tonnes de CO2.

Le gouvernement a opposé une fin de non-recevoir à l’hypothèse de One Seat, par la voix de la ministre des Affaires européennes, Nathalie Loiseau, présente à Strasbourg pour l’inauguration d’un nouveau bâtiment de bureaux destinés au Parlement.

"Les adversaires du siège strasbourgeois du Parlement européen ont décidément beaucoup d’imagination. Nous, nous sommes dans le principe de réalité qui est que le siège du Parlement européen est à Strasbourg du fait des traités et pour de vraies raisons", a-t-elle dit à des journalistes.

"Il n’y a aucune ambiguïté sur la position du président de la République en faveur de Strasbourg, siège du Parlement européen", a-t-elle ajouté.

Les défenseurs de Strasbourg, dont la majorité des français, mettent en avant le symbole de la réconciliation franco-allemande et de la construction européenne.

La proposition formulée par One Seat élude cependant un handicap de Strasbourg qui vaut pour le Parlement comme pour une future agence européenne : le manque de liaisons aériennes qui a pesé dans le choix de Lille par le gouvernement français, plutôt que de Strasbourg, comme candidate française à une relocalisation de l’EMA. (Gilbert Reilhac, édité par Yves Clarisse)