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DUBAI, 14 octobre (Reuters) - L'Arabie saoudite a prévenu dimanche qu'elle riposterait à toute sanction économique qui pourrait lui être infligée dans le cadre de l'affaire de la disparition du journaliste dissident Jamal Khashoggi, rapporte l'agence officielle SPA en citant un responsable saoudien anonyme.

Le royaume wahhabite répondra à toute mesure le visant par des mesures encore plus forte, a dit ce responsable, ajoutant: "L'économie saoudienne a un rôle vital et influent pour l'économie mondiale."

Le responsable faisait sans doute allusion la production de pétrole que Ryad a déjà dû augmenter pour compenser la baisse des exportations de brut iranien sous l'effet du rétablissement des sanctions américaines.

Donald Trump a assuré samedi que Washington infligerait à l'Arabie saoudite une "punition sévère" si son implication - qu'elle dément - dans la disparition de Jamal Khashoggi, qui vivait en exil aux Etats-Unis, est établie.

Il a exclu de mettre fin aux ventes d'armes au royaume mais a dit disposer "d'autres moyens" de le punir, sans plus de précision.

RYAD DÉMENT FORMELLEMENT LES ACCUSATIONS

Jamal Khashoggi a disparu à Istanbul le 2 octobre après une visite au consulat de son pays. Selon le quotidien turc Sabah, des enregistrements effectués grâce la montre connectée du journaliste laissent supposer qu'il a été torturé et tué.

Sa fiancée assure qu'il n'est pas ressorti du consulat saoudien. Selon des sources proches des services de sécurité turcs, il y a été tué par une équipe d'une quinzaine de Saoudiens repartis le jour même dans leur pays.

Ryad dément formellement et a accepté de participer à l'enquête. Une délégation saoudienne est arrivée vendredi en Turquie.

Signe de sa volonté de trouver une solution diplomatique à cet incident, le roi Salman d'Arabie saoudite a téléphoné au président turc Recep Tayyip Erdogan, a rapporté dimanche soir l'agence de presse saoudienne, afin de le remercier d'avoir salué la proposition saoudienne visant à former un groupe de travail sur la disparition de Khashoggi.

Jamal Khashoggi s'était exilé aux Etats-Unis il y a un an, craignant que ses opinions ne lui valent des représailles.

Au cours de l'année écoulée, il a dénoncé dans des articles publiés par le Washington Post l'attitude de Ryad à l'égard du Qatar, la guerre au Yémen et la répression politique ou la censure dans son pays.

L'EUROPE VEUT UNE ENQUÊTE "CRÉDIBLE"

Les ministres des Affaires étrangères français, britannique et allemand ont demandé dimanche à l'Arabie saoudite et la Turquie une "enquête crédible" sur la disparition Jamal Khashoggi.

Dans une déclaration commune, les ministres disent partager les "graves préoccupations" de la Haute représentante de l'Union européenne, Federica Mogherini, et du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, sur le sort de cet opposant saoudien.

Paris, Londres et Berlin "prennent cette affaire très au sérieux", lit-on dans leur communiqué.

Dimanche soir, Ford Motor Co a annoncé que son président, Bill Ford, avait annulé une visite en plusieurs étapes au Moyen-Orient, dont une apparition à la Conférence sur l'investissement saoudien. L'entreprise n'a pas précisé si cette décision était liée à l'affaire Khashoggi.

Les retombées de cette affaire ont fait souffler un vent de panique sur la Bourse de Ryad, qui a ouvert dimanche en forte baisse. (Aziz El Yaakoubi et Asma Alsharif, avec Marc Joanny et Emmanuel Jarry à Paris, Elizabeth Piper à Londres; Tangi Salaün et Arthur Connan pour le service français)