Après deux jours de critiques venues de tous bords, Henri Proglio a annoncé jeudi qu'il ne toucherait pas sa rémunération de 450.000 euros en tant que président du conseil d'administration de Veolia Environnement.

Il s'agit, après l'affaire de la nomination avortée de Jean Sarkozy, le fils du président français, à la tête du quartier d'affaires de la Défense, d'un nouveau recul pour le chef de l'Etat qui avait imposé Henri Proglio à la tête d'EDF au risque d'être accusé de favoriser ses proches.

Henri Proglio a cependant affirmé que sa reculade ne lui avait pas été imposée par Nicolas Sarkozy, comme l'écrit le quotidien Le Monde.

Prié de dire s'il avait demandé au P-DG de renoncer à sa rémunération chez Veolia, Nicolas Sarkozy a déclaré vendredi en marge de ses voeux au corps diplomatique que le président d'EDF se trouvait à La Réunion avec lui en début de semaine et s'est contenté de répondre : "Je l'approuve".

Confirmant qu'il conserverait les deux responsabilités, Henri Proglio a dit qu'il ne se sentait pas fragilisé. "Pour moi, la polémique n'a jamais existé", a-t-il dit jeudi sur France Info.

La polémique, pourtant, ne cessait d'enfler depuis cinq mois, l'opposition dénonçant un "conflit d'intérêt" lié au fait que le nouveau patron d'EDF gardait un poste clé dans son ancienne entreprise.

L'embarras est allé croissant au sein de la majorité, d'autant que la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, avait assuré devant les sénateurs qu'il ne toucherait pas un double salaire.

Contrainte de "changer d'avis", selon l'expression de son collègue de l'Industrie, Christian Estrosi, la ministre avait été chahutée mercredi à l'Assemblée nationale.

"NOMENKLATURA"

Après le geste d'Henri Proglio, la majorité tente de resserrer les rangs en saluant, comme le Premier ministre François Fillon, "une décision sage".

"Il n'est pas autiste, je pense qu'il a entendu tous ceux qui ont pu parler avec lui. Il a entendu la polémique et il a pris la bonne décision", a déclaré Christine Lagarde vendredi sur Europe 1.

Mais l'opposition considère qu'il ne peut s'agir que d'un premier pas, le conflit d'intérêt restant selon elle entier.

Au Parti socialiste, le député Manuel Valls, parlant d'un cumul "baroque", a estimé sur RMC qu'Henri Proglio devait "évidemment" démissionner de Veolia puisqu'il y a "conflit d'intérêts évident sur le même domaine entre Veolia et EDF".

Un autre élu PS, Arnaud Montebourg, avait estimé jeudi sur LCI qu'il y avait "un conflit d'intérêts qui est condamnable et qui pourrait être regardé par la justice".

Visant Nicolas Sarkozy, Harlem Désir, secrétaire national du PS, a jugé vendredi que "les petits arrangements entre amis n'ont pas leur place dans la République".

"Cette affaire illustre à la fois un grand mépris pour le service public et l'émergence d'une nomenklatura d'affaires composée de proches du président de la République", écrit-il dans un communiqué.

Si Henri Proglio estime que la polémique n'a jamais existé, la retraite complémentaire qui lui reste acquise chez Veolia fait maintenant débat.

L'entreprise a provisionné 13,1 millions d'euros en 2008, souligne vendredi Le Parisien, pour qui il s'agit d'une "retraite chapeau."

"Cela s'appelle une retraite complémentaire, j'y ai de toute façon droit parce que j'ai des annuités, donc aujourd'hui il n'y a pas de sujet" à ce débat, avait déjà réagi Henri Proglio jeudi sur France Info.

Gérard Bon, édité par Yves Clarisse