Zurich (awp) - Le numéro deux bancaire helvétique Credit Suisse dévoile jeudi 10 février les chiffres de l'exercice 2021 et de son quatrième trimestre. Dix analystes ont contribué à l'élaboration du consensus AWP:

T4 2021E
(en mio CHF)              cons. AWP   fourchette   T3 21A   T4 20A     analystes
recettes                    5101     4744 -  5315    5437     5521        7
charges d'exploitation      6471     6352 -  6554    4573     5171        4
bénéfice net               -1777    -2172 - -1434     434     -353        5

résultat avant impôts      -1516    -1712 - -1214    1008      -88        4
- Swiss UB                   588      454 -   691     623      487        3 
- Int. WM                    135      114 -   154     193      293        3
- APAC                        41      -88 -   128     247      237        3
- Investment Bank          -1668    -1954 - -1337     832      290        3
- Asset Management           119       92 -   140       2     -305        3

2021E 
(en CHF)                                                 2020A

dividende par action     0,1025      0,10 - 0,11         0,10             8   

FOCUS: les résultats de Credit Suisse au quatrième trimestre devraient receler peu de mystères après l'avertissement sur résultats de janvier. Le chiffres vont plonger dans le rouge vif, en raison d'un correctif de valeur sur l'écart d'acquisition ("goodwill") de 1,6 milliard de dollar, annoncé en novembre et lié à la reprise dans les années 2000 de la banque d'investissement Donaldson, Lufkin & Jenrette.

En janvier, le géant bancaire zurichois a prévenu qu'une nouvelle provision pour litiges de 500 millions de francs suisses pèsera sur la performance au 4e trimestre, partiellement compensée par le produit de cessions immobilières à hauteur de 225 millions. Sans ces effets, le résultat avant impôts aurait pu être équilibré, a regretté la grande banque en janvier.

Au niveau opérationnel, le tableau apparaît tout sauf idyllique. Credit Suisse a reconnu en janvier avoir subi une baisse de l'activité clientèle, que ce soit dans la gestion de fortune ou la banque d'affaires. Les recettes devraient s'en ressentir. La banque a notamment dû composer avec des sorties d'argent dans la gestion de patrimoine, plombée également par des conditions de marché défavorables. L'activité de gestion d'actifs devrait permettre de contrebalancer cela. La division Investment Bank va être minée par les correctifs de valeur.

Ce dernier trimestre dans le rouge vif viendra boucler un exercice qui se sera apparenté à un "annus horribilis", marqué au fer rouge par les affaires Archegos - et ses milliards de pertes - et Greensill. Des scandales à répétition qui ont poussé la banque à revoir profondément sa gestion du risque.

Ce virage "culturel" de la grande banque sera au centre de l'attention, les observateurs attendant des nouvelles déclarations du nouveau président Axel Lehmann, qui a remplacé au pied levé M. Horta Osório après que celui-ci a violé les règles de quarantaine liées au Covid. M. Lehmann s'est engagé à poursuivre les travaux de son prédécesseur.

OBJECTIFS: lors de la présentation de la nouvelle stratégie du groupe en novembre dernier, Credit Suisse a fixé des objectifs à l'échelle du groupe:

- pour la division de banque d'affaires Investment Bank, une réduction du capital attribué de 3 milliards de dollars (-25%) entre 2021 et 2022 ainsi qu'une cession de l'unité dédiée aux fonds spéculatifs Prime Services, à l'origine de l'affaire Archegos. Cette division déploiera à l'avenir des activités moins gourmandes en fonds propres, orientées vers le conseil.

- la division de gestion de fortune va profiter de la réallocation des 3 milliards susmentionnés (+25%) jusqu'en 2024, afin de renforcer cette activité stratégique. Les volumes clientèle devrait atteindre 1600 milliards de francs suisses d'ici 2024, pour une masse sous gestion de 1100 milliards. Les recettes récurrentes sont attendues à plus d'un milliard. Credit Suisse prévoit également de recruter 500 conseillers supplémentaires et doper les investissements dans la technologie de 60%, toujours à horizon 2024.

- Les divisions Wealth Management, Swiss Bank et Asset Management devraient se partager deux fois plus de capital pour leurs activités en 2022 par rapport à Investment Bank (actuellement 1,5x).

- Le rendement des fonds propres du groupe devrait dépasser 10% d'ici 2024, alors que le ratio coûts-revenus ajusté est attendu autour de 70%. Des investissements doivent être consentis pour les quatre divisions à hauteur de 1-1,5 milliard par année, grâce à des économies.

- Le ratio de fonds propres durs (CET1) devrait dépasser 14% d'ici 2024, alors que le ratio de levier (CET1) est attendu à quelque 4,5%.

- en 2022, les actionnaires se verront proposer une rémunération à hauteur de quelque 25% des bénéfices, suivant les conditions de marché et économiques.

POUR MÉMOIRE:

NOUVELLE ORGANISATION: Credit Suisse va réunir ses activités de gestion de fortune sous un seul et même toit. Aux côtés de cette division Wealth Management dirigée par Francesco de Ferrari, la grande banque conservera la même organisation, soit les divisions Investment Bank, Swiss Bank et Asset Management.

PRÉSIDENCE: mi-janvier, le président António Horta-Osório a démissionné après cinq mois à son poste. Le Portugais, qui devait redresser la banque, était dans l'oeil du cyclone après avoir violé les règles de quarantaine. Ancien banquier d'UBS, Axel Lehmann doit lui succéder.

PROCÈS "BULGARE": Credit Suisse comparaît depuis lundi devant le Tribunal pénal fédéral sur ses relations avec un clan bulgare, impliqué dans le trafic de cocaïne et le blanchiment. L'avocate de la banque a estimé dès les questions préjudicielles que la cause était partiellement, voire totalement prescrite.

GREENSILL/ARCHEGOS: depuis le printemps dernier, le numéro deux bancaire helvétique est empêtré dans deux scandales, celui des fonds liés à la société d'affacturage en faillite Greensill et la débâcle du fonds spéculatif américain Archegos. Pour le premier cas, Credit Suisse a remboursé les deux tiers des 10 milliards de dollars se trouvant sur les quatre véhicules lors de l'annonce de la liquidation. L'affaire Archegos a coûté plus de cinq milliards de dollars au 1er semestre à la banque.

COURS DE L'ACTION: après une année 2021 calamiteuse en termes d'évolution de cours (-22%, la pire contreperformance du SMI), l'action Credit Suisse a pâti du départ de son président et affiche un recul de 5% depuis janvier. A titre de comparaison, l'action UBS a crû de 14%.

RECOMMANDATIONS D'ANALYSTES selon AWP Analyser:

jl/tp/uh/fr/rp