Zurich (awp) - Les analystes financiers ont multiplié les avis quant à la voie à suivre par Credit Suisse vendredi, alors que l'action a poursuivi son chemin de croix à la Bourse suisse. Les incertitudes restent nombreuses, malgré l'emprunt de 50 milliards de francs suisses obtenu par la banque.

"La banque suisse a reçu hier matin une bouée de sauvetage de la part des régulateurs suisses, une tentative de calmer les investisseurs après des jours de turbulences dans le secteur bancaire qui ont alimenté les craintes d'une crise financière et économique plus large", a rappelé John Plassard de Mirabaud Banque.

La banque genevoise note aussi que Credit Suisse est désormais poursuivie par des actionnaires américains, qu'ils accusent de les avoir trompés.

KBW estime que si les liquidités devraient réduire la pression à court terme, la plupart des inquiétudes concernant le titre avant les récents événements restent valables, en particulier la faible rentabilité. Les analystes n'excluent pas de nouvelles déclarations de restructuration de la part de la direction, visant à simplifier davantage le numéro deux bancaire helvétique.

Parmi les forces de la banque aux deux voiles, LBBW Research souligne de son côté la banque universelle suisse à la fois stable et rentable mais aussi la forte position de marché dans la gestion de fortune mondiale. En revanche, les incertitudes restent élevées, notamment liées à la réduction de la banque d'affaires d'ici 2024, sans oublier les possibles répercussions des nombreux démêlés judiciaires.

Les circonstances pèseront sur le résultat opérationnel 2023 et 2024, incitant les analystes de la Landesbank Baden-Würtemberg à réduire leurs pronostics. Malgré sa faible valorisation, ils recommandent de conserver le titre, même s'ils ne peuvent exclure une perte totale du capital-actions selon le pire des scénarios. Indépendamment, le cours de l'action devrait rester très volatil.

Incertitudes élevées

La Banque royale du Canada (RBC) a, elle, salué le soutien de la BNS et de la Finma. Mais regagner la confiance reste la clé pour le titre Credit Suisse. Les mesures prises devraient permettre de contenir la contagion au secteur bancaire, "mais la situation reste incertaine".

Dans ce contexte, JP Morgan a élaboré plusieurs scénarios quant à l'avenir de l'établissement de la Paradeplatz, qui pourraient impliquer la 8e restructuration de Credit Suisse depuis 2011, alors que les analystes jugent "le soutien de la BNS en matière de liquidités (comme annoncé mercredi soir) insuffisant". "Le statu quo n'est pas une option", cinglent les experts.

Les analystes de la banque américaine jugent ainsi une reprise par la concurrente UBS comme le scénario le plus probable, relevant tout de même les difficultés en termes de concurrence, selon eux, "car la part de marché combinée est d'environ 30%", avec un risque de concentration et de contrôle de parts de marché en Suisse trop élevé.

Ni Credit Suisse si UBS n'ont voulu s'exprimer à ce sujet.

La banque d'investissement new-yorkaise KBW pense que la cession d'actifs est la solution la plus probable: la banque de détail suisse vaudrait 12,4 milliards de francs suisses selon elle, la gestion de fortune est évaluée à 9,5 milliards mais avec des sorties de liquidités qui se sont poursuivies, tandis que la banque d'affaires se voit attribuer une "valeur négative" de 11 milliards de francs suisses.

Commentant la situation depuis Paris, le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau a expliqué, sur BFM Business vendredi matin que Credit Suisse est "un cas particulier connu depuis plusieurs années". "C'est une banque qui a à la fois des difficultés de modèle d'affaires (...) et des défaillances de son système de contrôle interne", a-t-il ajouté, encourageant l'établissement à aller "au bout du travail" de redressement.

Il a assuré que les banques "européennes sont extrêmement solides", mettant en avant la réglementation Bâle III mise en place après la crise financière de 2008, "parfois critiquée" mais qui a prouvé l'"efficacité" des règles "sur leurs liquidités et sur leurs fonds propres".

Après avoir progressé en début de séance, l'action Credit Suisse est rapidement tombée dans le rouge en cours de séance, et à clôturé en baisse de 8,0% à 1,86 franc, lanterne rouge de l'indice vedette SMI qui a terminé en repli de 0,98%.

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