Lorsqu'une société publie ses résultats trimestriels ou annuels et surprend les attentes à la hausse, le cours de l'action réagit généralement positivement le jour de l'annonce. Mais avez-vous remarqué que la plupart du temps, le titre continue de dériver à la hausse pendant des jours, des semaines, voire des mois, le temps que les investisseurs digèrent la nouvelle. Il se passe la même chose en sens inverse, lorsqu'une société déçoit lors de sa publication et que le titre continue de dériver à la baisse durant les séances qui suivent. Cette dérive est d'ailleurs plus forte pour les actions de petite capitalisation boursière, généralement moins liquides et moins couvertes par les analystes, et donc dans ce cas, l'information circule plus lentement. 

Maintenant que vous savez de quoi on parle, découvrons les causes de ce phénomène. 

Quelles sont les causes de la dérive post-annonce des résultats ? 

Une étude très intéressante de Tobias Kalsbach et Steffen Windmüller, de l'université technique de Munich, fournit une explication palpitante de la dérive post-annonce des résultats. Cette étude, "Anchoring and Global Underreaction to Firm-Specific News", sortie en mars 2023, a été mise en évidence dans un excellent papier de Joachim Klement de chez Liberum : "Why the post-earnings announcement drift happens". Cette dérive serait dû à l'ancrage psychologique fourni par le sommet de 52 semaines du cours de l'action. 

L'argument des chercheurs Kalsbach et Windmüller est que si une action se négocie près de son plus haut niveau sur 52 semaines et qu'une société annonce des nouvelles positives, les investisseurs sont réticents à mettre à jour leurs convictions sur la société et ne commenceront pas à acheter des actions autant que pour une action qui est bien en dessous de son plus haut niveau sur 52 semaines. En fait, les investisseurs pensent que l'action est déjà "chère" parce qu'elle est déjà proche de ses plus hauts de l'année écoulée et qu'elle a peu de marge de manœuvre malgré les récentes bonnes nouvelles. Par conséquent, les nouvelles positives concernant une société qui se négocie déjà dans la partie supérieure de sa fourchette de cotation sur 52 semaines sont intégrées plus lentement et la dérive après l'annonce des résultats est plus forte. 

À l'inverse, si une entreprise annonce des nouvelles négatives ou ne répond pas aux attentes en matière de bénéfices (publication en deçà des estimations des analyses sur le dossier), mais que ses actions se négocient déjà proches de leur plus bas niveau sur 52 semaines, les investisseurs sont aussi plus réticents à ajuster leurs attentes, et la dérive négative post-annonce des résultats sera également plus importante. 

Comment en profiter pour améliorer vos performances ? 

Ce drift effect peut être exploité pour améliorer vos performances boursières en appliquant une simple stratégie de dérive post-annonce des résultats. Au lieu d'acheter des actions dont les bénéfices sont positifs et de vendre des actions dont les bénéfices sont négatifs, il faudrait, d'après les conclusions de cette étude, se concentrer sur l'achat d'actions dont les bénéfices sont positifs ET qui se négocient près de leur plus haut niveau sur 52 semaines. Puis en parallèle sur la vente d'actions dont les bénéfices sont négatifs ET qui se négocient près de leur plus bas niveau sur 52 semaines. Selon les recherches de Kalsbach et Windmüller, il est ainsi possible d'obtenir un alpha supplémentaire de 6,8% par an ! Un surplus de performance non négligeable pour un investisseur. 

Si vous souhaitez en savoir plus sur l'ancrage psychologique des prix et la fabrication du consensus des analystes, je vous invite à lire ce papier que j'ai écrit en 2021 : Les mécaniques du consensus