Londres (awp/afp) - Les ventes de détail ont flanché en mars au Royaume-Uni à cause d'une vague de froid nuisible au commerce, ce qui place une entrave à une économie sortant peu à peu d'une inflation excessive.

En mars, ces ventes ont diminué de 1,2% sur un mois, a annoncé jeudi l'Office des statistiques nationales (ONS).

La "bête de l'Est", un épisode climatique de neige et de vent glacial surnommé ainsi par les médias, a poussé nombre d'automobilistes à renoncer à faire des emplettes, réduisant par conséquence leur consommation d'essence dont les ventes ont plongé de 7,4%.

Venue en deux vagues, l'une fin février-début mars puis mi-mars, ce froid polaire en provenance de Sibérie a aussi pesé in fine sur les ventes en magasin elles-mêmes, avec par exemple un repli de 0,7% des ventes dans les boutiques de vêtements et chaussures.

Les économistes s'attendaient en moyenne à une baisse de seulement 0,6% des ventes au total, d'après un consensus établi par Bloomberg, soit moitié moindre que les données de l'ONS.

L'Office a ajouté que pour l'ensemble du premier trimestre, les ventes ont diminué de 0,5% par rapport à celles du quatrième trimestre 2017.

Les statisticiens de l'ONS précisent toutefois que les chutes de neige ont fourni un coup de pouce au commerce en ligne et que les ventes ont progressé dans certaines boutiques en fin de période grâce à l'arrivée du week-end festif de Pâques, à cheval sur fin mars et début avril.

Mais ces données n'en constituent pas moins une déception pour l'économie britannique, qui tente de garder le cap malgré les incertitudes liées au Brexit.

- La BoE en équilibriste -

"Les ventes devraient rebondir en avril, lorsque les gens auront sauté dans leur voiture pour enfin acheter leurs tenues de printemps", prévoit Samuel Tombs, économiste chez Pantheon Macroeconomics.

Mais il prévient qu'avec un premier trimestre aussi poussif dans les magasins, les ventes au détail ont pesé négativement sur la croissance du produit intérieur brut (PIB) qui avait au contraire profité de leur vigueur en fin d'année dernière.

"Les consommateurs ne sont toujours pas en position de soutenir l'économie franchement", juge M. Tombs.

En ce début d'année, un rayon de soleil a pourtant illuminé l'horizon jusque-là nuageux des consommateurs, qui ont vu l'inflation s'apaiser et leurs salaires augmenter, permettant aux ménages de voir se finir une longue période d'effritement de leur pouvoir d'achat.

"Les consommateurs britanniques ont fait preuve d'une résistance surprenante ces dernières années, même face à l'incertitude économique, et la lumière est au bout du tunnel pour ceux qui souffraient d'une baisse de pouvoir d'achat", souligne Ben Brettell, économiste chez Hargreaves Lansdown.

La consommation a en effet peu ou prou résisté l'an passé, malgré une inflation bien supérieur aux hausses des salaires, les prix étant dopés par les conséquences de la dégringolade de la livre sterling consécutive à la décision des Britanniques de voter pour le Brexit le 23 juin 2016.

Avec des cambistes désormais plus confiants dans la possibilité pour Londres de négocier un accord favorable avec Bruxelles avant le Brexit prévu fin mars 2019, la livre remonte peu à peu depuis plusieurs mois, réduisant le coût des importations et in fine la hausse des prix en magasin: l'inflation s'est repliée à 2,5% en mars sur un an, a dit l'ONS mercredi.

La Banque d'Angleterre pourrait néanmoins porter un coup au pouvoir d'achat des ménages endettés si elle relève son taux directeur à l'issue de sa réunion de politique monétaire le 10 mai, une possibilité qui divise les analystes.

Le gouverneur Mark Carney et ses collègues prendront leur décision avec le souci de ne pas écraser la progression déjà atténuée du PIB: le FMI a prévu une croissance de 1,6% au Royaume-Uni en 2018, soit moins qu'en 2017 (1,8%) qui avait déjà enregistré un repli par rapport à 2016 (1,9%) et surtout 2015 (2,3%).

afp/rp