Zurich (awp) - Aryzta a choqué les investisseurs en annonçant mardi s'attendre à une importante chute de rentabilité sur l'exercice décalé 2016/2017. Les raisons de cette déconvenue se trouvent en Europe, mais également aux Etats-Unis où la marque Otis Spunkmeyer fait face à des difficultés. Ces informations faisaient plonger le titre du boulanger industriel à la Bourse suisse.

L'effondrement de l'action était provoqué par l'annonce que le bénéfice net par action sous-jacent a chuté de 20% sur les cinq premiers mois de l'exercice décalé, clos fin décembre. De l'aveu du groupe zurichois, la performance devrait être tout aussi faible sur le semestre et l'ensemble de l'année.

La direction a également revu ses prévisions en matière de marge opérationnelle (Ebita), désormais attendue dans une fourchette de 9%-10% pour l'ensemble de l'exercice, contre 11,5% à 12,5% anticipés en septembre dernier. Le chiffre d'affaires devrait évoluer entre -2% et +1%, contre +1% à +2% initialement prévus.

Le conseil d'administration a indiqué dans un communiqué revoir la stratégie d'investissement dans les coentreprises du groupe.

Aryzta a expliqué ces difficultés par la faiblesse de l'activité en Europe, principalement sur le marché allemand, mais également par les conséquences du Brexit.

La raison majeure de la déconvenue réside cependant en Amérique du Nord, notamment chez Cloverhill Bakery aux Etats-Unis. Aryzta y fabrique et emballe ses propres produits de boulangerie et ceux de concurrents. La marque Otis Spunkmeyer ayant décidé de lancer sa propre gamme de gâteaux, des concurrents ont réduit leurs commandes, ce qui a pesé sur les capacités du site et, par ricochet, sur son rendement. Le chiffre d'affaires en Amérique du Nord a ainsi reculé de 5,5% à 6% au deuxième trimestre.

"La performance sur la période est (...) extrêmement décevante", a concédé le directeur général (CEO) Owen Killian. Afin de faire face à la hausse des coûts salariaux en Amérique du Nord, le groupe a effectué des augmentations de prix et a investi dans la formation de ses employés.

Le groupe s'est dit "conscient qu'il faudra une période de rebond suivi d'une période de croissance soutenue pour regagner la confiance des investisseurs".

ARYZTA "JOUE AVEC LES NERFS"

"Nous n'avons pas de problème structurel, les problèmes sont temporaires et peuvent être résolus", a martelé le patron lors d'une conférence de presse téléphonique. Selon ce dernier, "les difficultés sont dues au décalage entre la commercialisation d'un produit et la génération de recettes" par ce produit, l'introduction sur le marché étant "plus lente que prévu".

La marque Otis Spunkmeyer dispose toujours d'un grand potentiel, a estimé M. Killian. La situation devrait ainsi s'améliorer en Amérique du Nord au second semestre de l'exercice décalé, avec un rétablissement attendu des marges et du chiffre d'affaires grâce à des hausses de prix. Un défi reste cependant les coûts salariaux et les taux de fluctuation élevés au niveau des employés.

Le patron a cependant exclu une augmentation de capital pour renflouer les caisses. "Cela n'est pas à l'ordre du jour, car nous allons aussi produire des liquidités à l'avenir et ne prévoyons pas d'importants investissements", a-t-il ajouté.

Malgré les propos de la direction, le titre Aryzta s'effondrait en Bourse. A 11h11, l'action plongeait de 30,7% à 31,42 CHF dans un SLI en hausse de 0,36%. Les volumes étaient extrêmement élevés, signe d'une forte agitation chez les investisseurs. En fin de matinée, plus de 3 mio de nominatives ont été échangées, alors qu'en moyenne journalière moins de 460'000 titres sont négociés. Malgré cette déconvenue, le titre était encore relativement éloigné de son plus bas à 23 CHF atteint en mars 2009.

Les analystes ne manquaient cependant pas de superlatifs pour qualifier la situation. Vontobel a évoqué un "terrible avertissement sur résultats" dans son commentaire, estimant que le groupe "joue avec les nerfs des investisseurs". Alors que la direction avance des objectifs ambitieux, il ne se passe pas un trimestre sans avertissement sur résultats, selon la banque.

La Banque cantonale de Zurich (ZKB) a évoqué un avertissement sur résultats "massif" et "violent". "La stratégie de renforcer le portefeuille avec Otis Spunkmeyer ne s'est pas avérée payante jusqu'à présent", ont estimé les spécialistes dans une note. L'annonce du boulanger industriel soulève un certain nombre de questions, notamment sur le financement du groupe. La ZKB a ainsi rappelé qu'en décembre Aryzta n'avait levé que 386 mio EUR au lieu des 1 mrd visés.

al/jh