Deux fers au feu pour Fiat
Les marchés bruissent de rumeurs sur l'intérêt que le groupe turinois porterait à la filiale historique de General Motors. Rappelons que le groupe américain avait repris Opel en 1929, en pleine Grande Crise économique, signe peut-être d'un nouveau bégaiement de l'Histoire.

Quoi qu'il en soit, chez Fiat, on assure que le dossier Chrysler reste la priorité absolue, et les discussions pour acquérir dans un premier temps 20% du capital continuent, avec pour « dead line » le 31 avril, date imposée par l'administration Obama. D'ailleurs, des avancées semblent se concrétiser outre-Atlantique, où certains créanciers de Chrysler ont accepté de renoncer à 3,75 milliards de dollars sur les 7 milliards de dette du constructeur.

Sergio Marchionne, le patron de Fiat, a émis des signaux pour le moins contradictoire la semaine passée. Avouant tout d'abord son intérêt pour le groupe allemand, il est ensuite revenu sur ses propos, assurant les syndicats qu'il n'avait émis aucune proposition sur Opel.

Entre temps, une polémique est apparue. Le commissaire européen à l'Industrie, Günther Verheugen, s'est montré pour le moins circonspect sur les capacités de Fiat : « Je me demande où cette entreprise fortement endettée va trouver les moyens pour mener deux opérations de la sorte en même temps ? ».

Du coup, tout en démentant son intérieure pour Opel, Sergio Marchionne s'est offusqué de cette remarque vexante, relayé par le ministre des Affaires étrangères italien Franco Frattini, qui déplorait d'« ingérence » du commissaire.

Sombres perspectives pour Opel
Outre-Rhin, l'intérêt manifesté par Fiat est diversement apprécié. Les syndicats d'Opel, ainsi que certains analystes financiers, s'inquiètent d'une opération qui pourrait s'avérer couteuse socialement, les deux groupes étant sur les mêmes créneaux (les voitures de taille moyenne). En outre Fiat, qui se trouve lourdement endetté, est soupçonné de ne chercher à travers cette union qu'à obtenir la garantie financière promise à Opel par le gouvernement allemand.

Seulement voilà, Opel est au bord du gouffre et, à l'approche des élections législatives allemandes, la grande coalition nationale craint un effondrement catastrophique pour l'emploi, avec les 25 000 salariés d'Opel outre-Rhin auxquels s'ajoutent encore deux fois plus d'employés chez ses sous-traitants. Conservateurs et socialistes sont prêts à tout pour sauver le groupe, dont General Motors serait tout disposé à se séparer. Et même un Opel tronqué est préférable à un Opel disparu...

Automobile : il ne pourra en rester que... six
Fiat n'est pourtant pas dans une forme olympique. Le groupe de la famille Agnelli a dû concéder une perte de 411 millions d'euros à fin mars et a révisé à la baisse ses prévisions de bénéfices annuels, à peine au-dessus des 100 millions d'euros.

Mais la stratégie dessinée par Sergio Marchionne est claire : dans l'industrie automobile mondiale, seule les très gros poissons survivront à la crise. La taille minimale est selon lui de 5 millions de véhicules construits chaque année, contre seulement 2,2 millions pour le groupe Fiat aujourd'hui. À terme, Sergio Marchionne estime que seules 6 constructeurs de dimension mondiale subsisteront, lorsque la crise sera terminée.