Il s'agit d'une première médicale mondiale : fin 2011, à l'hôpital Georges-Pompidou, le premier cœur artificiel imitant l'anatomie et le fonctionnement physiologique de l'organe humain sera implanté dans la poitrine d'un patient volontaire soufrant d'insuffisance cardiaque au stade terminal. Un espoir pour quelque 100 000 patients dans le monde.

Et le moins que l'on puisse dire c'est que les investisseurs croient dur comme fer à cette innovation médicale. Introduite à 22 EUR le 13 juillet 2010, l’action Carmat s’est en effet échangée au plus haut hier matin à 97.70 EUR ! Certains investisseurs ont donc vu leur mise plus que quadrupler en un peu plus de 6 mois. Et pourtant, le titre a mis longtemps avant de décoller puisqu’en octobre 2010 il s’échangeait encore à moins de 23 EUR et « seulement » à 30 EUR au début du mois de février 2011. Une envolée qui a sans doute réveillé les ardeurs des investisseurs puisque depuis plusieurs séances s’échangent pas moins de 70 000 titres par jour contre moins de 2 000 encore le 9 février dernier. L’engouement renait autour du dossier Carmat dont tout le monde a entendu parlé et que personne ne souhaite voir s’envoler sans en avoir en fond de portefeuille dans une optique de long terme.

Cette innovation, on l'a doit au cardiologue Alain Carpentier, à la réputation internationale, mais aussi à ceux qui ont crû en lui. Alors président de Matra au début des années 90, Jean-Luc Lagardère est de ceux-là, et sans doute celui sans qui rien ne serait arrivé. Son décès, le 14 mars 2003, a été un choc pour le professeur Carpentier. « Ce sera mon regret éternel, car le hasard a voulu que nous ne soyons jamais apparus ensemble dans un lieu public », confie-t-il au journal Les Echos.

Le projet en question a été développé dans le plus grand secret dans les bureaux d'EADS, groupe aéronautique dont Lagardère était un important actionnaire. Il a mis à disposition de l'éminent cardiologue une équipe entièrement dédiée à la conception de ce cœur artificiel. « Comme je ne voulais pas créer un laboratoire spécifique, je cherchais une grande structure spécialisée en haute technologie qui réunisse toutes les compétences nécessaires », explique le professeur Carpentier. Il a obtenu ce qu'il voulait.

La seule condition était que le projet conserve une confidentialité absolue, à l'abri de l'espionnage de ses concurrents américains, ce qui a été le cas jusqu'à maintenant. Aujourd'hui, EADS détient 34,9% du capital de Carmat, tandis que Truffle Capital, l'autre intrépide investisseur à avoir parié sur le succès du projet, possède 41,3% des parts.

Des ponts entre aéronautique et médecine
Défendu par une savante collection de brevets, le cœur artificiel de Carmat est aujourd'hui la première alternative technologique en traitement définitif au greffon cardiaque. « Ce n'est pas une simple pompe, comme ce qui existe, mais véritablement la copie fonctionnelle du cœur humain », explique Alain Carpentier, fier de cette aventure médicale 100% française.

Arnaud Lagardère peut de son côté être fier de son père et de ses talents de visionnaire. Car lui seul a été capable d'imaginer les synergies technologiques possibles entre aéronautique, défense et médecine, en utilisant électronique, biomatériaux, mécanique, systèmes embarqués ou simulation numérique.

Ainsi, le système électronique embarqué miniaturisé présent dans le cœur de Carmat a par exemple les mêmes aptitudes que le cœur humain pour s'adapter aux changements physiologiques du corps, soit une avancée il n'y a pas si longtemps complètement inconcevable. Au final, cette approche gagnante a permis de concevoir la bioprothèse cardiaque la plus perfectionnée du monde, avec une endurance pour l'instant éprouvée de 5 ans, soit 230 millions de battements, et une perspective fiable de 9 ans.