Cette séance du 6 mai va faire débat et ne restera pas sans conséquences: de nombreuses enquêtes vont être déclenchées alors que le premier réflexe des autorités boursières a été d'indiquer que tout fonctionnait normalement: les faits hurlent que c'est loin d'être le cas.

Sans parler de retour au calme, un relatif 'retour à la normale' s'est dessiné en fin de séance... mais les dégâts demeurent impressionnant avec -3,25% sur le Dow Jones et le 'S&P-500', -3,45% sur le Nasdaq Composite.

Les autorités boursières américaines ont beau s'en défendre -arguant qu'il n'y a pas eu de problèmes techniques- le plongeon de -35% de Procter & Gamble de 62 vers 39,4$ (avant un rebond vers 61$ en clôture) constitue une 'anomalie' que les satisfecits des superviseurs du NYSE ne saurait occulter: la direction de 'P&G' va demander une enquête à la SEC.

Mais il existe aussi une rumeur d'erreur de passation d'ordre chez Citigroup où une ligne de vente de 16Mds$ -au lieu de 16 millions de $- aurait été éxécutée sans que les systèmes de contôle n'empêchent cette monstruosité.
Citigroup dément... mais annonce mener une enquête en interne et de nombreuses sources extérieures concordantes évoquent une 'anomalie' dans des ordres sur des contrats sur le 'S&P-500'.

Sur le fond, les causes du vent de panique sont connues, il s'agit de la peur d'une contamination de la crise d'endettement de la Grèce à d'autres pays puis aux Etats Unis (qui sont dans une situation de déficit budgétaire sans précédent et dont les besoins de financement vont éponger une large part des liquidités disponibles dans le monde).

La chute de l'Euro sous les 1,26$ peut avoir servir d'étincelle pour une accélération des dégagements, le débouclement des carry-trade Yen/Dollar ne faisant qu'amplifier la panique... mais le film des évènements démontre que les mécanismes 'anti-panique', les 'coupe circuit' n'ont pas fonctionné.

Ce à quoi nous venons d'assister, et la cause est selon toute vraisemblance 'technique', c'est à un scénario de krach sans précédent: les indices US ont plongé de -6 à -7% en 5 minutes (de 20H40 à 20H45), passant de -3% à -9 ou -10%.

Le Dow Jones s'est effondré de -1.000Pts à 9.875Pts (la plus forte baisse 'intraday' de son histoire), le Nasdaq perdait -220Pts à 2.188 et le 'S&P-500' -100Pts à 1.066Pts avec Cisco à -12%, General Electric à -14,5%, Bank of America à -11%, Boeing à -12%, Intel et Broadcom à -11%... et Apple à -20% (avant de rebondir à -3,8%).

Et le plus extraordinaire est que 8 valeurs de 1er plan côtées sur le NYSE -dont le géant Accenture- auraient vu leur cours s'inscrire à... 0,01$, c'est à dire 1 Cent durant quelques secondes (et aucun système informatique ne s'est opposé à cette situation ubusesque !).

Non décidément, il ne s'est rien passé d'anormal, les systèmes d'exécution des ordres ont parfaitement fonctionné, c'est tout ce qui compte !

Le record de baisse sur le Nasdaq revenait à Automatic Data Processing avec -30%... avant de revenir à -2,5% (et le Nasdaq-100 affichait très exactement -10% à 20H45 avec 100% de ses composantes en baisse de plus de 4%).
La moitié des pertes ont été heureusement effacées en quelques minutes mais il subsistait encore des écarts supérieurs à -4,5% en moyenne à une demi-heure de la clôture... ce qui signifie que tous les supports graphiques courts ou moyen terme sont cassés, libérant des forces baissières qu'il sera difficile de maîtriser si le calme ne revient pas immédiatement sur le marché des changes (c'est à dire dès avant l'ouverture des marchés asiatiques la nuit prochaine).

Dans le même temps, le pétrole s'effondrait de -6% à 75$ le baril tandis que l'Euro effectuait une incursion vers 1,255$. Le 'WTI' clôturait sous les 77$, soit un écart visin de -4%.

Les autorités boursières US -quoiqu'elles en disent- ont complètement perdu le contrôle de la situation entre 20H40 et 20H45. Les carnets d'ordres -totalement dégarnis dès que les écarts indiciels dépassent 3%- ont été intégralement purgés en quelques secondes et les programmes informatiques se sont emballés (déferlement de 'stops-vente'), rééditant, mais en quelques secondes seulement le scénario du 19 octobre 1987.

C'est terrifiant pour les épargnants de voir disparaître 10% de leur épargne en quelques minutes et jusqu'à -25% sur des 'blue chips' (et y compris des valeurs 'père de famille') que les gérants de portefeuille s'arrachaient encore 48H auparavant. Sans parler des 8 qui ont perdu 99,9% de leur valeur (imaginez le 'gros lot' pour les investisseurs qui avaient rentré des ordres d'achat à 0,01$ ou même 1$... et les pertes pour ceux qui n'ont pu annuler leurs ventes stop).

Wall Street ne pourra plus faire l'économie d'une restructuration complète de l'architecture informatique, de l'encadrement technique des 'trading programs' et du 'flash trading': mais en ce jeudi, quelque chose a gravement disfonctionné et cela fera les gros titres de la presse vendredi, même si les transactions ont l'air de revenir à 'la normale'... et il continue de régner une ambiance de plomb dans les salles de marché.

De nouvelles rafales d'ordres de vente -comme des répliques d'un fort séisme- continuaient de provoquer des écarts de -1% en quelques minutes en fin de journée: les 'fondamentaux' de l'économie US, les chiffres du jour, la baisse du chômage, les 'trimestriels'... plus rien de cela ne compte alors que Wall Street prend soudain conscience de ce que 10 semaines de hausses (artificielle et savamment orchestrées ?) avaient tenté de faire oublier.
Les chiffres de l'emploi publiés ce vendredi pourraient ne pas suffire à compenser une nouvelle déception concernant le soutien européen à la Grèce: gare à une nouvelle flambée du Dollar et du Yen.

Il faudra un message autrement plus fort de la part de la BCE (avant le week-end de préférence) que de simples 'voeux pieux' de JC-Trichet (ce jeudi en conférence de presse) concernant la capacité de la Grèce à respecter les conditions lui permettant d'obtenir le déblocage des 110MdsE d'aide promise.

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