BRATISLAVA, 30 mars (Reuters) - Une avocate et activiste novice en politique, Zuzana Caputova, portée par un mouvement national de protestation contre la corruption, est grande favorite du second tour de l'élection présidentielle en Slovaquie samedi, une victoire qui marquerait une rupture avec l'émergence des forces populistes en Europe.

Corruption et changement ont été les thèmes majeurs de la campagne de l'entre-deux-tours, un peu plus d'un an après le début d'un mouvement de contestation déclenché par l'assassinat du journaliste Jan Kuciak, qui enquêtait notamment sur des affaires de fraude impliquant des hommes d'affaires liés au monde politique slovaque, et de sa compagne.

Le double assassinat en février 2018 a provoqué une onde de choc dans le pays et alimenté la colère de l'opinion contre la corruption. La Slovaquie a été le théâtre de manifestations sans précédent depuis la chute du régime communiste fin 1989, et la pression de la rue a conduit à la démission du Premier ministre Robert Fico et de deux de ses ministres.

Zuzana Caputova, avocate de 45 ans n'ayant jamais exercé de fonction dans l'administration, a remporté ce mois-ci le premier tour du scrutin avec 40,6% des suffrages, devant Maros Sefcovic, le "candidat de la continuité" soutenu par le parti du Smer (centre gauche) au pouvoir, qui a obtenu 18,7% des voix.

La candidate du parti Progressiste, qui ne dispose d'aucun siège au Parlement, a dit vouloir mettre fin au "détournement de l'Etat par des individus tirant les ficelles dans l'ombre à la place des représentants élus", un discours qui a séduit les jeunes et les électeurs les plus instruits.

Aux termes de la Constitution, le président ne peut prendre de décisions au quotidien, mais dispose d'un droit de veto pour la désignation des procureurs et des juges, ce qui est fondamental dans la lutte anti-corruption.

"La Slovaquie se réveille, elle montre une grande volonté de changement et de l'espoir en lien avec (la présidentielle) et les élections suivantes", a déclaré Caputova lors de l'ultime débat télévisé, faisant référence aux élections européennes de la fin mai et aux élections législatives en Slovaquie en 2020.

Selon l'unique sondage publié pendant l'entre-deux-tours, Caputova est créditée de 60,5% des voix et deviendrait donc la première femme à présider le pays. Sefcovic, commissaire européen qui a mis en avant son expérience politique et ses relations personnelles avec des dirigeants étrangers, obtiendrait 39,5% des suffrages.

Tentant de convaincre les électeurs anti-système, Sefcovic a dit rejeter la politique de quotas d'immigration voulue par l'Union européenne, un système dans lequel "la répartition des migrants serait décidée par quelqu'un d'autre que la Slovaquie".

Il a qualifié d'"ultra-libéral" le soutien de Caputova aux droits à l'avortement et de la communauté LGBT, dans l'espoir de séduire les électeurs les plus conservateurs. (Tatiana Jancarikova; Jean Terzian pour le service français)