Washington (awp/afp) - La banque centrale américaine (Fed) devrait laisser les taux d'intérêts inchangés à l'issue d'une réunion monétaire mercredi attendant d'en savoir plus sur les projets économiques du président Donald Trump, estiment la plupart des économistes.

En décembre, peu après l'élection présidentielle, la Réserve fédérale avait relevé légèrement les taux pour les porter à entre 0,50% et 0,75%, signalant les progrès de la première économie mondiale vers les objectifs de plein emploi et d'inflation à 2%.

Pour cette réunion de février, dépourvue de conférence de presse de la présidente Janet Yellen, les économistes misent sur "une attitude attentiste" du Comité monétaire (FOMC) avant de voir "avec plus de clarté la magnitude, la composition et le calendrier des dispositions de relance budgétaire" (réduction d'impôts et dépenses d'infrastructures) promises par le président républicain, affirme Paul Ashworth de Capital Economics.

Ces mesures expansionnistes, de même que les forts droits de douane que veut imposer Donald Trump aux produits du Mexique, troisième partenaire commercial des Etats-Unis, dans son bras de fer sur le mur anti-immigration, pourraient s'avérer inflationnistes et forcer la Fed à accélérer ses hausses de taux.

C'est l'avis de Tim Duy, professeur d'économie à l'Université d'Oregon: "dans la mesure où l'administration entend poursuivre une stratégie de négociation agressive avec nos partenaires commerciaux, ils peuvent dire que cela va augmenter les prix des produits aux Etats-Unis et réagir à cela en relevant les taux".

-Comité monétaire renouvelé-

Pour l'instant, le FOMC prévoit trois modestes relèvements pour 2017 mais Janet Yellen a récemment averti que, vu l'incertitude des mesures à venir, "les attentes sur les taux d'intérêt changeront dans la mesure où nos perspectives sur l'économie changeront".

"Il est très peu probable" que la Fed augmente ses taux mercredi "mais elle pourrait le faire en mars", a affirmé à l'AFP David Wessel du Brookings Institute. D'autant plus que la croissance au 4e trimestre (1,9% en rythme annualisé) et sur l'année (1,6%) ont été décevantes.

"Les choses n'ont pas vraiment changé depuis décembre. Les perspectives économiques sont un peu meilleures, à la fois aux Etats-Unis et dans le monde mais sur la forme de la politique budgétaire, qui est un déterminant majeur, on n'en sait pas plus qu'en décembre", a commenté Edwin Truman, ancien économiste du FOMC désormais au Peterson Institute for International Economics.

Le communiqué devrait insister sur le fait que l'économie est en bonne voie pour atteindre les objectifs de la Fed alors que le taux de chômage est à 4,7% et l'inflation à 1,4%, selon l'indice PCE. Pour Michael Gapen, économiste pour Barclays Research, il s'agirait d'un argument "politique" pour la Fed qui préfèrerait souligner qu'elle relèvera les taux parce que ses cibles sont proches plutôt que pour compenser les projets d'expansion budgétaire du nouvel hôte de la Maison Blanche.

Pour cette première réunion de l'année, c'est un Comité monétaire renouvelé et sans doute aux tendances plus "colombe" ou porté vers une politique monétaire accommodante, qui se retrouvera à Washington.

Les deux "faucons" réputés qui se sont plusieurs fois opposés à Janet Yellen --Esther George de la banque Kansas City et Loretta Mester de celle de Cleveland-- ont cédé la place à des représentants moins impatients d'accélérer le rythme du resserrement monétaire comme Charles Evans de Chicago ou Patrick Harker de Philadelphie.

Les participants au Comité devraient aussi débattre du sort des actifs financiers que la Fed a acquis massivement pendant sa politique de soutien monétaire exceptionnelle après la crise financière.

La banque centrale dispose de 4.200 milliards de bons du Trésor et de titres appuyés sur des créances immobilières dont elle a promis de réinvestir le produit quand ces titres arrivent à maturité pour continuer à soutenir l'économie. Cesser progressivement d'acquérir ces titres, en en réduisant la demande, devrait en faire baisser les prix et donc relever le rendement. Ce nouvel "outil passif" de politique monétaire, comme l'a décrit Mme Yellen, visera à aider à peser à la hausse sur les taux. Mais jusqu'ici la Fed a promis de n'agir sur son gigantesque portefeuille que lorsque les taux d'intérêt au jour le jour auront commencer à décoller, sans doute autour de 1%.

afp/rp