TEL AVIV, 10 novembre (Reuters) - Les Israéliens craignent que l'Union européenne décide dès mercredi d'imposer une mention d'origine sur les produits importés en provenance des colonies juives installées dans les territoires occupés.

La Commission européenne garde le silence sur l'annonce de cette mesure et des sénateurs américains ont écrit à Federica Mogherini, la porte-parole de la diplomatie européenne, pour exhorter les Vingt-Huit à renoncer à ce projet.

"C'est une politique discriminatoire", a dénoncé mardi le ministre israélien de l'Energie, Yuval Steinitz. "On se rappelle tous l'époque où les produits juifs étaient signalés comme tels en Europe", a-t-il dit, faisant référence à l'Allemagne nazie.

L'Union européenne souligne qu'il s'agit seulement de distinguer les produits provenant d'Israël, dans ses frontières internationalement reconnues, et ceux venant d'ailleurs.

"C'est une indication d'origine, pas une mise en garde", a assuré à Reuters l'ambassadeur de l'UE en Israël, Lars Faaborg-Andersen.

Plusieurs pays mentionnent déjà la provenance sur les produits israéliens et sur ceux venant des territoires occupés, notamment les fruits et les légumes de la vallée du Jourdain.

Si la Commission européenne prend une telle décision mercredi, les 28 Etats membres de l'UE devront se conformer à cet étiquetage.

Interrogé, l'émissaire de l'Union au Proche-Orient, Fernando Gentilini, a confirmé qu'une décision allait être prise mais a refusé de dire quand.

"PAS UN BOYCOTT"

"Ce n'est pas un boycott (...), c'est tout simplement l'application de la législation européenne. Il n'y a rien de nouveau, ce sont des choses qui existent déjà", a-t-il expliqué lors d'une audition par la commission des Affaires étrangères du Parlement européen.

Du point de vue économique, les conséquences de cet étiquetage devraient être minimes. Les consommateurs qui veulent boycotter les produits des colonies juives le font probablement déjà, tandis que ceux qui veulent soutenir Israël pourraient être poussés à rechercher plus particulièrement ces produits.

Le ministère israélien de l'Economie, lui, parle d'une perte estimée à environ 47 millions d'euros par an, concernant surtout les produits frais comme le raisin, les dattes, le vin, les volailles, le miel, l'huile d'olive et les cosmétiques.

La production des colonies juives dans les territoires occupés représente annuellement entre 190 et 280 millions d'euros. Israël exporte chaque année 28 milliards d'euros de biens et services vers l'Union européenne, un tiers de ses exportations totales.

Yaron Solomon, un dirigeant syndical agricole, n'exclut cependant pas que certains agriculteurs des colonies soient contraints de cesser leur activité.

Les 20.000 travailleurs palestiniens employés dans les colonies, où ils ont des salaires bien supérieurs à ceux versés par les propriétaires palestiniens, pourraient également être affectés par la décision européenne. (Steven Scheer, Tova Cohen et Robin Emmott, avec Lianne Gross et Ali Sawafta; Guy Kerivel pour le service français)