* Un programme placé sous le signe d'une croissance atone

* La Commission demande un déficit nettement inférieur à 3% en 2014

* Moscovici ne veut pas réduire le déficit à marche forcée

PARIS, 15 avril (Reuters) - Le gouvernement français présentera mercredi son "programme de stabilité", qui précisera comment il compte réduire ses déficits malgré une croissance nulle cette année et faible l'an prochain et un déficit finalement plus élevé que prévu l'an dernier.

Avec ce document, qui entérinera le report d'un an de la réduction du déficit public à 3% du PIB, la France tentera de convaincre de sa crédibilité ses partenaires européens et les marchés financiers, sur lesquels elle emprunte actuellement aux taux les plus bas de son histoire. (voir )

Malgré des prévisions de croissance encore plus faibles que celles du gouvernement, la vingtaine d'économistes interrogés par Reuters valident globalement en moyenne la trajectoire financière dévoilée ces dernières semaines par celui-ci.

Le gouvernement prévoit de réduire le déficit à 3,7% du PIB fin 2013 (après 4,8% fin 2012 au lieu de 4,5%) et légèrement sous les 3% fin 2014, vraisemblablement à 2,9%. Les économistes prévoient en moyenne un déficit à 3,8% en 2013 et 3,2% en 2014.

Côté croissance, le gouvernement attend +0,1% cette année et +1,2% l'an prochain, des prévisions calées sur celles de la Commission européenne, tandis que les économistes prévoient en moyenne -0,2% cette année et +0,8% en 2014. ( )

Avec une croissance globalement nulle en 2013 comme en 2012, l'écart entre la réduction du déficit l'an dernier (de 5,3% du PIB à 4,8%, soit 0,5 point) et celle prévue cette année (de 4,8% à 3,7%, soit 1,1 point) tiendrait à une plus forte réduction du déficit structurel, qui reflète l'effort de redressement réalisé, hors impact de cette conjoncture économique morose.

LA FRANCE "NE VEUT PAS" L'AUSTÉRITÉ

Le ministre du Budget, Bernard Cazeneuve, a déjà annoncé que ce déficit structurel serait réduit de 1,8 point en 2013 et d'un point en 2014 pour le ramener à 1% fin 2014 ( ). Il avait été réduit de 1,2 point en 2012, selon le gouvernement.

Le programme de stabilité sera présenté mercredi en conseil des ministres et aux commissions des Finances de l'Assemblée nationale et du Sénat. Il sera présenté au Parlement français la semaine prochaine puis transmis à la Commission européenne, qui rendra son verdict fin mai.

Si le commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires, Olli Rehn, a semblé valider par avance le report d'un an de l'objectif de 3%, il a demandé un déficit "nettement" sous ce seuil fin 2014, une hypothèse écartée par le ministre français de l'Economie et des Finances.

"Si on a l'idée, comme je l'ai lu ici ou là ou comme peut l'avoir tel ou tel service de la Commission européenne, d'être à 2,5% ou 2,7%, il ne me paraît pas raisonnable de faire ça", a déclaré Pierre Moscovici dimanche. ( )

"La France ne mène pas de politique d'austérité et la France ne veut pas mener de politique d'austérité", a-t-il ajouté, alors que la gauche du Parti socialiste demande d'alléger la pression sur les comptes publics pour soutenir l'économie.

Après un effort structurel supérieur à 30 milliards d'euros programmé cette année, portant à deux tiers sur des hausses de prélèvements et un tiers sur la maîtrise des dépenses, la proportion sera inversée en 2014, a ajouté Pierre Moscovici.

REFORME DES RETRAITES

Il a précisé lundi que les prélèvements obligatoires augmenteraient d'environ 6 milliards d'euros en 2014 et promis qu'"il n'y aura pas d'autres impôts en 2014 sur les ménages que l'augmentation annoncée de la TVA" qui doit financer en partie le crédit d'impôt compétitivité. Ceci laisse entendre que les quelque 6 milliards d'euros de prélèvements nouveaux qui doivent parallèlement remplacer d'autres arrivant à échéance en 2013 seront trouvés auprès des entreprises.

Selon le quotidien Les Echos, le taux de prélèvement obligatoires passera de 46,3% du PIB cette année à 46,5% en 2014 et le poids de la dépense publique (Etat, sécurité sociale, collectivités) s'alourdira à 56,9% cette année (après 56,6% en 2012), avant de décroître à 56,4% en 2014 avec une progression en volume des dépenses limitée entre 0,2% et 0,3%.

Le gouvernement devrait en même temps confirmer mercredi son engagement à réformer rapidement les retraites et la branche famille de la sécurité sociale, à continuer à maîtriser la croissance des dépenses de santé et à inciter les partenaires sociaux à redresser les comptes de l'assurance chômage.

L'objectif d'atteindre l'équilibre structurel des comptes publics fin 2017 devrait quant à lui être confirmé.

La prévision d'un retour de la croissance sur un rythme de 2% par an après 2014, qui figure dans la dernière loi de programmation des finances publiques, ne devrait pas non plus être remise en cause, tout en suscitant des critiques.

Le Haut conseil des finances publiques, nouvellement créé, s'exprimera dans les prochains jours pour la première fois sur les prévisions retenues par le gouvernement. (Jean-Baptiste Vey, édité par Yves Clarisse)