Service Public Fédéral
FINANCES
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Administration Générale de la DOCUMENTATION PATRIMONIALE
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Secteur Enregistrement
Service VI - Direction VI/8
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Dossier nr. EE/L.214
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Disposition anti-abus
Application de cas d'abus fiscaux en droit d'enregistrement
et en droit de succession
Bruxelles, 19 juillet 2012
CIRCULAIRE N° 8 / 2012
Cette circulaire contient un commentaire complémentaire des
articles 168 et 169 de la Loi-Programme (I) du 29 mars 2012
(Moniteur Belge du 6 avril 2012, Ed.
3)., comprenant les dispositions anti-abus qui sont
applicables en ce qui concerne le Code des droits
d'enregistrement, d'hypothèque et de greffe et en ce
qui concerne le Code des droits de succession.
Il est fait renvoi à la Circulaire n°4 du 4 mai 2012.
La présente circulaire ne modifie en rien la première
circulaire.
Elle apporte seulement un commentaire complémentaire, plus
spécifiquement relatif à la présence ou non d'abus fiscal
dans le cadre des droits d'enregistrement et des droits de
succession (complément au point C.3.1).
* * *
A. Textes de loi applicables.
Art. 18. du Code des droits d'enregistrement, d'hypothèque et
de greffe :
§ 1. …
"§ 2. N'est pas opposable à l'administration, l'acte
juridique ni l'ensemble d'actes juridiques réalisant une même
opération lorsque l'administration démontre par présomptions
ou par d'autres moyens de preuve visés à l'article 185 et à
la lumière des circonstances objectives, qu'il y a abus
fiscal.
Il y a abus fiscal lorsque le redevable réalise, par l'acte
juridique ou l'ensemble d'actes juridiques qu'il a posé,
l'une des opérations suivantes:
1 ° une opération par laquelle il se place, en violation des
objectifs d'une disposition du présent Code ou des arrêtés
pris en exécution de celui-ci, en-
dehors du champ d'application de cette disposition ; ou
2 ° une opération par laquelle il prétend à un avantage
fiscal prévu par une disposition du présent Code ou des
arrêtés pris en exécution de celui-ci, dont l'octroi serait
contraire aux objectifs de cette disposition et dont le but
essentiel est l'obtention de cet avantage.
2 Circulaire nr. 8 / 2012
Il appartient au redevable de prouver que le choix de cet
acte juridique ou de cet ensemble d'actes juridique se
justifie par d'autres motifs que la volonté d'éviter les
droits d'enregistrement.
Lorsque le redevable ne fournit pas la preuve contraire,
l'opération est soumise à un prélèvement conforme à
l'objectif de la loi, comme si l'abus n'avait pas eu
lieu."
Art. 106. Code des Droits de Succession :
Les contre-lettres ne sont pas opposables à l'Etat, en tant
qu'elles auraient pour effet de diminuer l'actif ou
d'augmenter le passif de la succession.
Le paragraphe 2 de l'article 18 du Code des droits
d'enregistrement, d'hypothèque et de greffe est applicable
mutatis mutandis.
B. Commentaire.
Existence ou non d'abus fiscal - cas d'application
Afin de déterminer si une opération juridique ou un ensemble
d'opérations juridiques constituent un abus fiscal en matière
d'enregistrement et de successions, et donc afin de savoir si
elles entrent en ligne de compte pour l'application de la
disposition anti-abus, il conviendra en principe de juger au
cas par cas, en tenant compte du contexte concret et des
modalités. En d'autres termes, il n'est pas possible
d'établir une liste exhaustive d'opérations juridiques
« sûres » ou « suspectes ».
Afin d'apporter une certaine clarté et en vue d'adopter une
façon de faire uniforme en ce qui concerne l'application de
la disposition anti-abus, un certain nombre d'opérations
juridiques intervenant en droit d'enregistrement et en droit
de succession sont reprises ci-après ; ces opérations
peuvent, soit être considérées avec certitude comme étant des
abus, soit être considérées comme ne pouvant pas l'être.
Il convient d'insister sur le fait que les listes qui suivent
ne sont nullement limitatives (ni dans un sens ni dans
l'autre).
Les opérations juridiques ou les ensembles d'opérations
juridiques qui ne sont pas reprises dans ces deux listes ne
sont pas ipso facto « sûres » ni ipso facto
« suspectes »
1. Pour autant qu'elles ne fassent pas partie d'un montage
constitué de plusieurs opérations, les opérations juridiques
suivantes, ne peuvent pas, en soi, être cataloguées comme
abus fiscal:
• Donation effectuée par don manuel ou virement bancaire;
• Donation par acte passé devant un notaire étranger;
• Donation échelonnée de biens immeubles avec période
intermédiaire supérieure à trois ans ;
• Donation avec charge;
Circulaire nr. 8 / 2012 3
• Donation sous condition résolutoire;
• Donation par les grands-parents aux enfants et/ou aux
petits-enfants;
• Donation avec réserve d'usufruit ou d'un autre droit
viager;
• Donation soumise à un droit d'enregistrement réduit ;
• Donation jouissant d'une exonération prévue dans le code
des droits d'enregistrement ;
• Clauses de tontine et d'accroissement ;
• Testament avec profit maximal de régimes préférentiels (ex:
legs au conjoint survivant de la totalité en pleine propriété
de l'habitation familiale en Flandre).
• testament avec "generation skipping"
Dans ce cas, la totalité du patrimoine de la personne concernée est léguée aux petits- enfants. Dans la plupart des cas, il y aura plus de petits-enfants que d'enfants et donc
une plus grande dispersion de la succession légale. Le patrimoine ne fait qu'une fois
l'objet d'une succession et les droits de succession ne sont donc payés qu'une fois.
• Testament-célibataire sans enfant
Lorsqu'un époux ou une épouse malade en phase terminale ne laisse pas d'enfant, un
« testament célibataire sans enfant »est rédigé s'il existe un parent et des frères et sœurs Lorsqu'aucun testament n'est rédigé dans une telle situation, seul un quart sera
échu au parent selon la dévolution légale et le reste sera échu aux frères et sœurs (au t
tarif maximal en ligne collatérale). On indiquera dans le « testament- célibataire sans enfant » que l'entièreté du patrimoine est échue au parent. L'objectif est dans la plupart
des cas de transmettre la succession en deux fois (d'abord enfant-parent, et ensuite parent-enfant, donc deux fois au tarif en ligne directe).
• Legs de duo, pour autant que, suite au calcul de la charge, il en résulte un avantage net substantiel pour l'association :
Dans un legs de duo, le légataire lègue une partie déterminée de sa succession à une association (souvent une asbl) ou une fondation qui est chargée de payer au tarif préférentiel de l'article 59 C. Succ. les droits de succession dus par les autres héritiers (qui sont soumis à un tarif plus élevé et progressif).
L'administration juge que cette forme de planification
successorale, dans les cas où il en résulte un avantage net
insignifiant ou même inexistant pour l'association, doit être
considérée comme étant d'inspiration purement fiscale et elle
doit être qualifiée d'abus fiscal, sur base d'atteinte à la
progressivité du tarif de l'article 48 C. Succ.
Les exemples repris ci-après illustrent ceci et laissent
penser que de purs motifs fiscaux sont à la base de telles
formes extrêmes de legs de duo.
4 Circulaire nr. 8 / 2012
Exemple 1:
Succession ouverte en Région Flamande
Actif net : € 200.000 meubles
Sans legs de duo | Avec legs de duo (legs "libre de droits de succession") | |||||
légataire | legs | Droits de succession | net | legs | Droits de succession | net |
neveu | 200.000 | 110.000 | 90.000 | 129.000 | 0 | 129.000 |
ASBL | --- | --- | --- | 71.000 | 70.098 | 902 |
Tol | 200.000 | 110.000 | 90.000 | 200.000 | 70.098 | 129.902 |
- 39.902
Le legs net reçu par l'asbl (€ 902 au lieu de € 71.000 brut) est tellement faible que l'on peut sérieusement douter du motif de l'octroi du legs.
Exemple 2
Succession ouverte en Région de Bruxelles-Capitale
Actif net € 200.000 mobilier
Sans legs de duo | Avec legs de duo (legs "libre de droits de succession") | |||||
legataire | Legs | Droits de succession | net | legt | Droits de succession | net |
neveu | 200.000 | 105.000 | 95.000 | 135.000 | 0 | 135.000 |
ASBL | --- | --- | --- | 65.000 | 71.625 | -6.625 |
Total | 200.000 | 105.000 | 95.000 | 200.000 | 71.625 | 128.375 |
- 33.375
Le solde pour l'ASBL est négatif! Si l'ASBL accepte le legs, il est clair qu'il y a des intérêts autres que des intérêts légitimes qui en sont à l'origine.
2. D'autre part, les opérations juridiques suivantes seront
considérées comme abus fiscal, à moins que le contribuable
prouve que le choix de l'opération juridique ou de l'ensemble
des opérations juridiques répond à des motifs autres que
fiscaux :
• Clauses de survie unilatérale ou clauses de partage inégal
de la communauté conjugale, sans condition de survie (mieux
connue sous les termes de clause mortuaire) (atteinte à
l'article 5 C. Succ.)
• Acquisition scindée (nue-propriété et usufruit) de biens
précédée par une donation non-enregistrée des fonds
nécessaires faite par l'acquéreur de l'usufruit à l'acquéreur
de la nue-propriété, à condition qu'il y ait unité
d'intention (atteinte à l'article 5 C. Succ.)
• Construction emphytéose : une acquisition scindée d'un bien
immeuble par des sociétés liées (atteinte à l' article 44 C.
Enr.)
• Apport de biens par un époux dans la communauté, suivi par
une donation faite par les deux époux, à condition qu'il y
ait une unité d'intention (atteinte à la base de taxation et
à la progressivité article 131 C. Enr.)
• Sortie de la communauté de biens meubles, suivie par une
donation mutuelle des époux, souvent sous condition
résolutoire pour la donation faite au premier défunt
(atteinte à l' article 5 C. Succ.)
Circulaire nr. 8 / 2012 5
• Testament "Ik opa"
Dans un testament ik-opa, le grand-parent désigne ses enfants comme légataires universels. Ce legs est combiné avec une charge de reconnaître une dette envers leurs
propres enfants. Dans le testament ik-opa, la charge des enfants envers les petits-
enfants consiste à payer une somme qui est exprimée en valeur au comptant à la date du décès du grand-parent, contrairement au legs avec charge à terme, où la charge
consiste à payer un montant nominal. La valeur au comptant, au jour du décès du grand-parent, est la valeur escomptée du montant qui devra être payé au petit-enfant au décès de l'enfant. De ce qui précède, on peut décider que les petits-enfants pourront réclamer la valeur nominale de la charge (pleine propriété) lors du décès de leur parent, mais qu'ils seront seulement taxés sur la valeur au comptant de la charge (nue-
propriété). Le montant qu'ils reçoivent est donc plus élevé que le montant sur lequel ils paient des droits.
(atteinte à la progressivité et le tarif de l'article 48
C.Succ.)
Il convient de remarquer que l'administration juge taxables
un certain nombre de ces opérations ou constructions
juridiques, ou d'autres, sur base de dispositions légales
existantes contenues dans le Code des droits
d'enregistrement, d'hypothèque et de greffe ou dans le Code
des droits de succession sans devoir faire appel à la
disposition anti-abus (par exemple la clause mortuaire). Dans
de tels cas, il convient de défendre principalement
l'application de dispositions légales déjà existantes. Dans
de tels cas, la disposition anti-abus ne sera invoquée qu'à
titre subsidiaire, au cas où la thèse défendue par
l'administration à titre principal ne serait pas
acceptée.
L' Administrateur général
de la Documentation patrimoniale,
D. DE BRONE.
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