Parlons d'abord du contre-pied : les turbulences de la zone Euro, si elles font couler beaucoup d'encre et semblent mettre à mal le savant équilibre européen, ont des effets contre-intuitifs intéressants. D'abord ces turbulences ont le mérite, en donnant un peu de d'air aux entreprises européennes tournées vers l'exportation, de maintenir sous pression la monnaie européenne dans un marché monétaire international instable.

Au-delà de 1,4 $ pour 1 euro, la zone Euro ne peut que se désindustrialiser. En dessous, on peut trouver un réel intérêt à une ré industrialisation sur le long terme de certaines régions de la zone Euro, au Sud en particulier mais aussi en France qui semble être à mi-chemin entre l'Allemagne et les pays méditerranéens en termes de spécialisation manufacturière. Innovation, projets européens industriels, services d'envergure. C'est exactement ce dont l'Europe a besoin pour imaginer résoudre le chômage et stabiliser sur le long terme un équilibre social précaire au sein duquel inégalités et jalousies progressent.

Ensuite, les tensions sur la dette souveraine de certains Etats-Membres offrent à l'Europe une opportunité d'intégration avancée de ses « économies régionales », en combinant discipline budgétaire à inventer, transferts et fédéralisme financier. En ce sens, les dernières décisions, même si elles apparaissent à reculons, pavent la voie à une intégration budgétaire inévitable de la zone Euro. Idée que les pères fondateurs, eux-mêmes souhaitaient voir se concrétiser. Le Rapport Mac Dougall de 1977, par exemple, préconisait un budget pré-fédéral de l'UE de 7%. La Proposition Schäuble – Lammers de 1994, quant à elle, suggérait un gouvernement économique et politique de la zone Euro. Le concept fut repoussé à l'époque par la France.

Une prochaine étape pourrait être une consolidation budgétaire européenne ambitieuse, cogérant la dette avec les Etats-nations, avec de grands projets industriels, de service et de recherche, des transferts et une véritable contrainte budgétaire forte sur les budgets nationaux. On retrouve ici la pensée de J.M. Buchanan, prix Nobel d'Economie en 1986. Il avait développé la théorie du Choix Public et avait exposé la théorie du « voile de l'ignorance » qui précise qu'en situation d'incertitudes sur l'avenir, les agents ont tendance à s'assurer. Nous y sommes ! Ira-t-on jusqu'aux Etats-Unis d'Europe ?

Les dernières avancées des accords climatiques de Cancun, là encore, ouvrent de nouvelles pistes pour un saut qualitatif dans le « monde d'après », combinant protection de l'environnement, nouvelles formes de production, de consommation et de mobilité. Cette thématique est une question clé de la décennie à venir, au même titre que celle de l'innovation, des emplois créés et du pouvoir d'achat. Avec un enjeu majeur : comment atténuer les impacts de cette cinquième révolution industrielle ? Comment faire en sorte que cette croissance verte conduise à une équation gagnant/gagnant et profite au plus grand nombre ?

Enfin, la quatrième révolution industrielle de l'Internet offre la dernière piste pour 2011. L'économie numérique est le berceau d'entreprises innovantes, prêtes à relever le défi d'une expansion toujours plus complexe dans un monde interconnecté, globalisé et parfois brutal ! L'histoire de Zonebourse, des bancs de l'Université au statut de PME dynamique, offre un exemple à suivre !

Laurent Guihéry