La communication d'abord, avec le refus des dirigeants français depuis des semaines de confirmer cet objectif et leurs déclarations sur la nécessité de discuter du bon "rythme" de réduction des déficits avec les Européens.

Le ministre de Finances, Michel Sapin, a finalement annoncé jeudi que "l'objectif de 3% est un objectif que nous devrions maintenir" et a expliqué que les propos qui pouvaient laisser penser autrement avaient été mal compris.

Question politique aussi, avec le choix du gouvernement de ne pas entrer en conflit avec la Commission et les partenaires européens sur le thème de la lutte contre l'austérité, au risque de braquer encore davantage la gauche du Parti socialiste.

"L'intention est de respecter nos engagements", a dit vendredi un conseiller du président François Hollande. "Mais respect des engagements ne signifie pas qu'il n'y a pas un dialogue sur les conditions de la croissance en Europe."

Les responsables français qui se sont rendus à Bruxelles jeudi pour rencontrer leurs homologues de la Commission n'ont pas communiqué sur une éventuelle négociation de l'objectif de 3%.

"L'idée n'était pas de négocier, ce n'était pas le sujet", a ajouté le conseiller, "l'idée était d'expliquer le 'pacte de responsabilité'".

Question économique ensuite, avec le défi de concilier un redressement des comptes sans précédent, une reprise suffisante pour faire reculer le chômage et une baisse des prélèvements des entreprises et des ménages.

Quant aux conditions de réalisation de cet objectif, enfin, il faudra d'abord annuler des crédits mis en réserve, qui représentent 7 milliards d'euros, et espérer qu'il n'y ait pas cette année de dépenses imprévues, ce qui est rarement le cas, comme l'a souligné la Cour des comptes.

INFAISABLE ?

Il faudra aussi que la croissance économique accélère et que les recettes fiscales des administrations publiques évoluent favorablement, contrairement à ce qui s'est passé l'an dernier.

Le gouvernement, qui doit dévoiler ses nouvelles prévisions d'ici fin avril, prévoyait jusqu'à présent une croissance du PIB de 0,9% cette année et de 1,7% en 2015.

Il faudra aussi peut-être décider d'économies en plus des 50 milliards d'euros déjà annoncés pour 2015-2017, ce qu'ont cru comprendre des élus reçus par Manuel Valls, sans que le Premier ministre le confirme dans son discours de politique générale.

Plus largement, la question du financement du "pacte de responsabilité et de solidarité" et des baisses de la fiscalité des entreprises et des ménages reste posée.

A en croire Michel Sapin, la trajectoire des finances publiques ne serait donc que peu modifiée - il était jusqu'à présent prévu de ramener le déficit à 3,6% fin 2014 et 2,8% fin 2015. Mais des doutes subsistent, notamment en raison d'un déficit plus important que prévu l'an dernier, à 4,3%.

"S'ils le mettent à 3%, je serai surpris. Ils peuvent le faire, mais c'est tout simplement infaisable", a déclaré vendredi Raphaël Brun-Aguerre, économiste chez JP Morgan

Les syndicats reçus vendredi par Manuel Valls n'ont guère montré d'enthousiasme.

"Nous savons que ce cap est inatteignable à l'heure qu'il est, sauf à procéder à des coupes sombres dans l'économie de notre pays et notamment dans ses dépenses sociales", a déclaré le numéro un de la CGT, Thierry Lepaon.

Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force ouvrière, a quant a lui estimé que "l'austérité, c'est suicidaire socialement, économiquement et démocratiquement".

(Jean-Baptiste Vey, avec Mark John et Emmanuel Jarry, édité par Yves Clarisse)