* "La Russie répondra à tous les défis", dit le chef du Kremlin

* Moscou est le "garant des valeurs traditionnelles"

par Alexei Anishchuk et Steve Gutterman

MOSCOU, 12 décembre (Reuters) - Vladimir Poutine a mis en garde les Occidentaux contre la tentation de sous-estimer la puissance militaire russe et dépeint son pays comme un garant des valeurs traditionnelles, jeudi dans son discours annuel sur l'état de la nation.

Pour le président russe, la Russie est une nation dont la "responsabilité historique" ne cesse de croître et un contre-poids moral aux Etats-Unis, en dépit de la perte de son statut de superpuissance - liée à l'effondrement de l'Union soviétique en 1991 - qu'elle n'ambitionne de toute façon pas de retrouver.

Vladimir Poutine a saisi l'occasion de ce discours à la tonalité résolument conservatrice pour rassurer ses partisans, souvent issus des classes rurales populaires, contrairement aux jeunes urbains qui contestent son pouvoir.

"Personne ne doit se faire d'illusions sur la possibilité de gagner en supériorité militaire sur la Russie", a lancé le président devant des centaines d'invités - députés, ministres du gouvernement, responsables du clergé, hommes d'affaires - réunis dans la grande salle Saint-Georges du Kremlin.

"Jamais nous ne permettrons cela. La Russie répondra à tous ces défis, politiques et militaires."

Mais, a-t-il assuré, "nous n'aspirons pas à ce qu'on parle de nous comme d'une superpuissance, ce qui est perçu comme l'ambition d'une hégémonie régionale et mondiale".

"Nous n'empiétons pas sur les intérêts d'autrui, nous n'imposons notre parrainage à personne, pas plus que nous ne tentons de dire aux gens comment ils doivent vivre", a-t-il ajouté dans une attaque à peine voilée contre Washington.

VALEURS FAMILIALES

La Russie a cependant selon Vladimir Poutine une "responsabilité historique croissante, non seulement comme l'un des garants de la stabilité mondiale et régionale, mais aussi en tant qu'Etat qui défend avec constance son approche morale, y compris dans les relations internationales".

"Dans de nombreux pays, les normes morales et éthiques sont en cours de révision et les traditions nationales (...) sont en voie d'effacement", a déploré le président russe, estimant que la destruction des valeurs traditionnelles allait à l'encontre de la "volonté de la majorité populaire".

Depuis son retour à la présidence en mai 2012, Vladimir Poutine, qui est âgé de 61 ans, en appelle fréquemment à ce qu'il nomme les valeurs traditionnelles russes et considère l'Eglise orthodoxe comme le guide moral d'une nation désarçonnée par la disparition de l'URSS.

Le chef du Kremlin essuie les critiques des Occidentaux sur les restrictions à la liberté d'expression en Russie ou encore la discrimination contre les homosexuels, à deux mois des Jeux olympiques d'hiver de Sotchi dans lesquels il a investi une grande partie de son prestige.

Mais devant le chef de l'Eglise orthodoxe, Vladimir Poutine a balayé ces jugements négatifs. "Nous savons que de plus en plus de gens dans le monde soutiennent notre position consistant à défendre les valeurs traditionnelles qui forment depuis des siècles le fondement moral de la civilisation", a-t-il déclaré en plaçant les "valeurs familiales" en haut de la liste.

Le président russe a souhaité l'unité entre les groupes ethniques, un nouvel élan patriotique et un accroissement de la natalité. Les familles de trois enfants, une exception en Russie, doivent désormais constituer la norme, a-t-il dit. (Jean-Stéphane Brosse pour le service français, édité par Gilles Trequesser)