New York (awp/afp) - Peabody Energy, le plus gros producteur de charbon américain, a déposé mercredi son bilan, nouvelle preuve de la crise que traverse ce secteur aux Etats-Unis où le gaz naturel et les hydrocarbures de schiste lui font forte concurrence.

Techniquement, Peabody, qui est aussi la première entreprise privée mondiale dans ce secteur, s'est placée sous la protection de la loi américaine sur les faillites (chapter 11) en tenant toutefois à l'écart ses activités en Australie. Cela va lui permettre de se restructurer à l'abri de ses créanciers alors que sa dette atteint 6,5 milliards de dollars. Mais son avenir apparaît très sombre et son action ne valait qu'un peu plus de deux dollars avant d'être suspendue mercredi matin à Wall Street, en chute de plus de 97% sur an.

Pour poursuivre ses activités et payer ses 7.100 employés dans l'immédiat, Peabody, qui a réalisé un chiffre d'affaires de 5,6 milliards de dollars en 2015 pour une perte nette de 518 millions de dollars, a obtenu une ligne de crédit de 800 millions de dollars.

"C'était une décision difficile à prendre mais c'est la bonne pour permettre à Peabody d'avancer", a commenté le PDG du groupe Glenn Kellow, cité dans le communiqué.

Le groupe, fondé en 1883, est victime, comme l'ensemble du secteur des matières premières, du ralentissement économique mondial et de la surabondance d'offre qui a entraîné une chute des prix. Le coût de la tonne de charbon a ainsi perdu de 10 à 15 dollars en 2015.

-Chute de la production-

Selon des chiffres publiés mardi par l'Agence américaine de l'énergie (EIA), la production de charbon a diminué de 36% en mars sur un an aux Etats-Unis et devrait reculer au total de 16% en 2016 ce qui serait son plus fort déclin annuel depuis 1958.

Le secteur pâtit également des faibles prix du gaz naturel (dont la production a augmenté de 23% entre 2010 et 2015 mais dont les prix ont baissé de plus de 50% sur la même période) et de l'augmentation de la production des hydrocarbures de schiste aux Etats-Unis. Tous ces éléments avaient déjà forcé Arch Coal, grand rival de Peabody et deuxième producteur américain de charbon, a déposer son bilan en janvier.

Parmi les autres facteurs qui ont plombé Peabody figure l'échec d'une transaction pour céder des actifs dans le Colorado (ouest) et dans le Nouveau-Mexique (sud-ouest). Cette vente lui aurait permis de réduire sa dette.

Mais le groupe a souligné mercredi qu'il croyait toujours à l'avenir du charbon qui "fournit encore 40% de l'énergie nécessaire à la production d'électricité mondiale et devrait en rester un composant essentiel, ainsi que pour la sidérurgie, dans les décennies à venir", selon le communiqué. Peabody souligne avoir fourni près de 230 millions de tonnes de charbon aux producteurs d'électricité et groupes industriels dans le monde en 2015.

Mais les défenseurs de l'environnement ne sont pas de cet avis: "Peabody est un bon exemple de ce qui arrive quand les dirigeants ne prennent pas en compte la dynamique d'un secteur", souligne Alice Garton, avocate pour l'organisation ClientEarth.

"Le groupe a été incapable de s'adapter au changement vers les énergies renouvelables", a estimé Lindsay Meinan, porte-parole du 350.org, un groupe de protection de l'environnement.

Le dépôt de bilan fait surtout craindre que Peabody soit incapable de faire face aux coûts de réhabilitation de ses sites.

Le procureur général de l'Illinois (nord) avait ainsi sommé Peabody fin mars de lui assurer qu'il était en mesure de payer les 92 millions de dollars nécessaires à la réhabilitation de plusieurs mines dans cet Etat.

Le groupe se vante d'avoir réhabilité quelque 1.900 hectares de sites miniers l'an dernier et planté 442.000 arbres. "Peabody fait face à plus de deux milliards de dollars de coûts de réhabilitation à venir et, sur ce total, 1,5 milliard ne sont pas financés", souligne l'organisation de défense américaine Sierra Club qui craint que le dépôt de bilan ne soit un moyen d'échapper à ces obligations.

afp/rp