par Katharine Houreld

ISLAMABAD, 1er janvier (Reuters) - Le procès de l'ancien général putschiste et ex-chef de l'Etat pakistanais, Pervez Musharraf, s'est ouvert mercredi à Islamabad, apparaissant comme un test pour les relations entre le gouvernement civil et l'armée qui a toujours joué un rôle central au Pakistan.

Musharraf, âgé de 70 ans, refuse d'assister aux audiences et affirme que la procédure judiciaire engagée contre lui obéit à des motifs politiques.

L'ancien dirigeant, qui assuma les fonctions de président de 2001 à 2008, est poursuivi pour avoir suspendu la Constitution et avoir imposé l'état d'urgence en 2007, deux chefs d'inculpation passibles de la peine capitale.

Musharraf, qui a renversé le Premier ministre actuel Nawaz Sharif à la faveur d'un coup d'Etat en 1999, est accusé d'avoir cherché à se maintenir au pouvoir alors qu'il faisait face à une opposition croissante dans l'opinion publique.

Selon ses avocats, le procès qui débute vraiment mercredi ne pourra pas être équitable en raison des vieux contentieux l'opposant à l'appareil judiciaire et en raison de l'implication de Sharif qui entend prendre sa revanche.

"Je parle de la vengeance d'une personne", a déclaré l'avocat Anouar Mansoor. "Une personne (Sharif) a des préjugés contre le prévenu", a-t-il ajouté.

Emprisonné après le coup d'Etat, Nawaz Sharif avait été contraint à un exil de huit ans avant de pouvoir revenir au Pakistan et de remporter facilement les élections générales en mai dernier.

Musharraf a accepté de démissionner en 2008 afin d'éviter une procédure de mise en accusation devant le Parlement. Des magistrats et des avocats avaient pris la tête de la contestation populaire contre la tentative d'éviction du ministre de la Justice de l'époque.

ABSENT DE L'AUDIENCE

Le procès s'était brièvement ouvert le 24 décembre mais avait été immédiatement ajourné après la découverte d'un sac rempli d'explosifs sur le chemin que devait emprunter l'ex-président pour se rendre au palais de justice.

Musharraf était absent de l'audience mercredi, des explosifs ayant été trouvés près de son domicile, ont expliqué ses avocats.

L'ancien chef de l'Etat était rentré dans son pays l'an passé avec l'ambition de se présenter aux élections, le premier scrutin démocratique assurant le transfert du pouvoir d'un gouvernement civil à un autre.

Il avait alors été pris dans une nasse d'affaires judiciaires et n'avait pas été autorisé à se présenter.

Interrogé récemment par la presse locale, il a expliqué disposer du soutien de la totalité de l'armée tout en reconnaissant que la hiérarchie militaire avait dépêché, avant son retour, un émissaire de haut rang pour le dissuader de revenir au Pakistan.

Pour l'instant, l'armée acteur central du jeu politique depuis l'indépendance de 1947 n'a pas signifié son intention d'intervenir dans cette procédure.

Pour le général à la retraite Talat Massoud, Pervez Musharraf exagère le soutien dont il bénéficie de la part de l'armée et ce afin de "se protéger contre la procédure légale".

Si cette procédure est menée de manière équitable, elle pourrait même devenir une occasion de renforcer les relations entre l'armée et le pouvoir civil, affirme Masood.

"Il s'agit d'un test pour les relations entre civils et militaires", estime Talat Massoud. "Il s'agit seulement d'une instance du pouvoir civil qui tente de s'affirmer".

(Pierre Sérisier pour le service français) ;))