SYDNEY/HONG KONG (Reuters) - Morgan Stanley prévoit de réduire les primes annuelles de ses banquiers d'affaires jusqu'à près de 50% en Asie, ont déclaré deux sources, alors que la banque américaine réduit ses coûts pour faire face à des conditions de marché difficiles.

Cette mesure pourrait être mise en oeuvre également aux États-Unis et en Europe, réduisant les gains des banquiers les plus performants qui, en 2021, ont gagné jusqu'à 20% de plus en primes, selon ces sources.

Des discussions sur le versement des primes sont actuellement en cours chez Morgan Stanley au niveau mondial, ont-elles ajouté.

Selon une troisième source, les réductions de primes chez Morgan Stanley en Asie devraient représenter en moyenne 30% et entraîner une baisse de l'ordre de 30% de la rémunération globale des banquiers en Asie, ont indiqué les deux autres sources.

Les primes constituent une part importante de la rémunération des banquiers et sont généralement liées aux performances des unités commerciales et des individus.

Morgan Stanley, qui ne communique pas les détails des versements de primes, n'a pas souhaité faire de commentaire. Les sources interrogées ont demandé à garder l'anonymat, invoquant le caractère confidentiel de cette information. 

De nombreuses banques à travers le monde suspendent leurs activités d'investissement en raison de la hausse des taux d'intérêt et des faibles perspectives économiques, les États-Unis se dirigeant vers une récession courte et peu profonde au cours de l'année prochaine. 

Les revenus des banques d'investissement se trouvent désormais sous pression après les bénéfices records de l'année dernière provenant de leurs activités de conseil en matière de fusions, acquisitions et introductions en bourse, alors que les restrictions liées au COVID-19 étaient progressivement levées. 

Les sociétés de Wall Street s'appuient largement sur les primes pour recruter et retenir les talents dans un environnement commercial concurrentiel, mais les principaux rivaux de Morgan Stanley seraient également en train de réduire leurs primes.

De même, la réserve de primes de Goldman Sachs pour les cadres supérieurs devrait diminuer de moitié, a rapporté jeudi la plateforme d'information Semafor, citant des sources.

Citigroup et Bank of America  envisagent également de réduire leurs primes de 30%, ont déclaré des sources à Bloomberg Law au début du mois. 

Selon les projections publiées le mois dernier par un cabinet de conseil new-yorkais, Johnson Associates, les banquiers d'affaires de Wall Street peuvent s'attendre à des primes beaucoup plus modestes cette année en raison du ralentissement de l'économie.

EXPOSÉS À LA VOLATILITÉ DES MARCHÉS

Les discussions sur la rémunération et les performances dans les banques de Wall Street commencent généralement en décembre, les primes globales étant finalisées à la fin de l'année.

En Asie, les baisses les plus importantes de bonus chez Morgan Stanley se feront sentir dans des domaines tels que les activités de marchés de capitaux, plus exposés à la volatilité des marchés financiers mondiaux.

Les discussions sur les primes cette année ont lieu après l'annonce au début du mois par James Gorman, directeur général de Morgan Stanley, de "modestes réductions d'emplois" dans le monde entier.

La banque a jusqu'à présent supprimé environ 2% de ses effectifs, soit quelque 1.600 postes, a rapporté Reuters la semaine dernière.

En Asie, une cinquantaine de postes dans la banque d'investissement ont été supprimés en 2022, ont indiqué les deux premières sources. Plus de 90% de ces suppressions ont été effectuées dans les équipes de Morgan Stanley en Chine, tant onshore qu'offshore, a ajouté l'une d'entre elles.

Les restrictions sanitaires sévères imposées en Chine et le renforcement de la surveillance réglementaire des entreprises chinoises aux États-Unis ont pesé sur les marchés de capitaux asiatiques et sur les activités de fusions et acquisitions.

L'indice MSCI regroupant les valeurs d'Asie et du Pacifique (hors Japon) a reculé d'environ 18% cette année. Les introductions en bourse à Hong Kong, une source essentielle de revenus pour les banques étrangères dans la région, sont également au plus bas en 2022 depuis une décennie, montrent les données de Refinitiv.

Le bénéfice de Morgan Stanley au troisième trimestre a manqué les attentes des analystes, chutant de 30%, le ralentissement des transactions pesant sur ses activités de banque d'investissement.

(Reportage Scott Murdoch à Sydney et Kane Wu à Hong Kong ; version française Dagmarah Mackos, édiité par Kate Entringer)

par Scott Murdoch et Kane Wu